Le taux d’extrême pauvreté dans la région MENA a quasiment doublé entre 2015 et 2018
Washington, 10 octobre 2020 — Selon un nouveau rapport de la Banque mondiale, le taux d’extrême pauvreté dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) a connu une nouvelle hausse, pour presque doubler entre 2015 et 2018.
Le rapport bisannuel de la Banque mondiale sur la pauvreté et la prospérité partagée signale que le taux d’extrême pauvreté dans la région MENA est passé de 3,8 % en 2015 à 7,2 % en 2018, la dernière année pour laquelle des données sont disponibles. Cette nouvelle hausse, qui s’ajoute à une première augmentation de 2,3 % enregistrée avant 2015, est principalement attribuable aux répercussions des conflits qui perdurent en Syrie et au Yémen. Cependant, ces conflits n’expliquent pas entièrement la baisse de l'activité économique observée au Liban.
« Ces nouvelles données peu réjouissantes nous rappellent comment les conflits, le changement climatique et les problèmes de gouvernance — auxquels s’ajoute à présent la pandémie de COVID-19 — combinent leurs effets pour détruire des vies, les moyens de subsistance des populations et la prospérité de la région tout entière, souligne Ferid Belhaj, vice-président de la Banque mondiale pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Nous continuons d’aider les pays de la région MENA à arrêter la propagation de la maladie et à protéger et prendre soin de leurs populations. Nous sommes également déterminés à aider les populations de la région à conclure un nouveau contrat social axé sur la transparence, la gouvernance, l’État de droit et l’intégration régionale, pour réduire la pauvreté et donner à chaque habitant, dans tous les pays, la chance de réaliser ses aspirations. »
Le rapport estime par ailleurs que le taux actuel de pauvreté dans la région MENA pourrait atteindre 7,9 %, dans un contexte où les conséquences de la pandémie de COVID-19 viennent aggraver les effets des conflits et des dérèglements climatiques. La pandémie menace en effet de précipiter au moins 3 millions de personnes de plus dans l’extrême pauvreté. Des projections récentes indiquent qu’à court terme, l’aggravation de la pauvreté pourrait être encore bien pire, et même aller jusqu’à multiplier par deux le nombre de pauvres dans certains pays.
« La pandémie entraîne dans la pauvreté des groupes de personnes qui avaient jusqu’ici été relativement épargnées et qui sont aujourd’hui frappées de plein fouet, à savoir les habitants des zones urbaines et les petits entrepreneurs informels, précise Nadir Mohammed, directeur régional de la Banque mondiale pour la Croissance équitable, les finances et les institutions au Moyen-Orient et Afrique du Nord. Le chômage, déjà exceptionnellement élevé avant la pandémie de COVID-19, s’est encore aggravé, ce qui réduit d’autant plus les perspectives d’emploi déjà très limitées des jeunes et des femmes de la région. Les résultats d’enquêtes menées par téléphone montrent que les familles sont désormais contraintes à puiser dans leurs économies et que l’insécurité alimentaire progresse. »
Le double choc de la pandémie et de l’effondrement des cours du pétrole a exacerbé les problèmes structurels sous-jacents des pays de la région MENA et touché tous les aspects de leurs économies. La pandémie a creusé les inégalités déjà présentes dans la région, exposant les vulnérabilités des systèmes sociaux, politiques et économiques, ce qui contribue à amplifier les effets de la pandémie elle-même. Son coût pourrait se chiffrer à environ 3,7 % du PIB régional de 2019, soit quelque 100 milliards de dollars.
Face à la pandémie, la riposte en plusieurs phases de la Banque mondiale dans la région MENA s’inscrit dans le cadre plus général de sa riposte mondiale, mais aussi de sa stratégie régionale. Au cours de la première phase, la Banque apporte son aide aux systèmes de santé publique et d’aide sociale d’urgence pour l’achat des produits nécessaires, l’amélioration de la surveillance et le renforcement des capacités sanitaires. À travers la région, la Banque a ainsi débloqué près de 700 millions de dollars pour aider les pays à faire face à leurs besoins les plus urgents, notamment en mettant en place sept nouvelles opérations et en réorientant les financements de dix projets en cours.
La Banque mondiale aide par ailleurs les pays à renforcer leurs dispositifs de protection sociale, notamment par le biais de transferts monétaires aux plus vulnérables et de programmes d’appui aux petites entreprises. Cette aide est essentielle étant donné la dualité des marchés du travail dans la région MENA, où beaucoup de travailleurs du secteur informel ne bénéficient guère d’une sécurité d’emploi et d’une protection sociale.
Dans le cadre des efforts engagés pour faciliter le redressement économique et le développement durable à long terme dans la région, la Banque mondiale aide les gouvernements à étendre la portée des programmes de transferts monétaires et les publics visés, en vue d’orienter les fonds vers les ménages les plus vulnérables et ceux qui risquent d’avoir perdu leur emploi ou leurs sources de revenus. Les équipes de la Banque mondiale collaborent avec les autorités nationales à la préparation de programmes de transferts monétaires au Liban, au Maroc, à Djibouti et au Yémen. Ces programmes viennent s’ajouter à l’aide consacrée par la Banque mondiale à ce type de dispositif lors du dernier exercice en Égypte et en Jordanie.
COVID-19 : l’action du Groupe de la Banque mondiale
Le Groupe de la Banque mondiale, l’une des principales sources de financements et de connaissances pour les économies en développement, prend des mesures rapides et de grande envergure en vue d’aider ces pays à renforcer leur action contre la pandémie. Nous nous attachons à appuyer les interventions de santé publique et à garantir la circulation de fournitures médicales de première nécessité tout en soutenant le secteur privé pour permettre aux entreprises de poursuivre leurs activités et maintenir les emplois. Nous prévoyons d’apporter jusqu'à 160 milliards de dollars de financements sur une période de 15 mois, afin d’aider plus de 100 pays à protéger les populations pauvres et vulnérables, soutenir les entreprises et favoriser le redressement de l’économie. Ce montant comprend 50 milliards de dollars sous forme de nouveaux dons et crédits hautement concessionnels fournis par l’IDA.