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TRIBUNE16 octobre 2024

Lettre ouverte : Le G20 doit augmenter son aide aux pays les plus pauvres du monde

Cette tribune a initialement été publiée dans le Financial Times.

Les pays les plus pauvres du monde traversent une crise de développement et ont besoin d’un meilleur accès à des financements abordables (Tribune, 1er octobre ; Lettre ouverte, 11 octobre).

L’Association internationale de développement (IDA) est le fonds de financement concessionnel de la Banque mondiale dédié à ces pays. L’IDA a depuis longtemps fait ses preuves et la prochaine reconstitution de ses ressources doit être pour la communauté internationale l’occasion d’agir en conformité avec ses préoccupations affichées en revoyant à la hausse sa contribution financière. Nous exhortons les ministres des Finances des pays du G20 à prendre la tête de cet effort et à augmenter leurs promesses d'engagement en faveur de la 21e reconstitution des ressources de l’IDA (IDA-21).

L’IDA est au service des pays les plus pauvres du monde depuis plus de 60 ans, mais son aide n’a jamais été aussi vitale. Les pays emprunteurs de l’IDA continuent de souffrir des séquelles de la pandémie de COVID-19 et d’autres crises qui ont mis un coup d'arrêt à plusieurs décennies de progrès dans la réduction de la pauvreté et le développement humain. Selon les prévisions de la Banque mondiale, dans près d’un tiers des pays à faible revenu, le revenu par habitant en 2026 sera inférieur au niveau de 2019. Alors que le premier des Objectifs de développement durable des Nations Unies vise à « éliminer la pauvreté sous toutes ses formes d’ici à 2030 », les projections actuelles indiquent près de 600 millions de personnes vivront toujours dans l’extrême pauvreté à cet horizon.

Nous sommes tous des économistes qui avons consacré une grande partie de nos carrières à l’éradication de l’extrême pauvreté et, à ce titre, nous pensons que l’IDA est particulièrement bien placée pour aider les pays à faible revenu à progresser plus vite. Les financements de l’IDA sont adaptés aux besoins et aux capacités propres à chaque pays. Ils sont acheminés par l'intermédiaire des gouvernements bénéficiaires, ce qui permet d'en assurer l’appropriation et l’alignement sur les priorités nationales.

Plus important encore, tandis que les pays les plus pauvres ont vu leurs sources de financement extérieur se tarir ces dernières années, l’IDA a, elle, intensifié ses efforts : elle a quasiment doublé ses engagements en faveur des pays à faible revenu à la suite de la crise de la COVID-19 et a maintenu ses engagements financiers annuels à près de 35 milliards de dollars en moyenne au cours des trois dernières années.

Au cours de la dernière décennie, l’IDA est parvenue à augmenter son volume d’aide principalement en mobilisant au mieux les contributions — stables — de ses bailleurs de fonds et en recourant de plus en plus à des emprunts et au réinvestissement des remboursements sur ses prêts antérieurs. Ce modèle n’est plus tenable et, en l’absence d’une augmentation des contributions des bailleurs de fonds, l’IDA devra réduire ses engagements financiers annuels ou offrir des conditions moins favorables à ses emprunteurs, sachant qu’aucune de ces deux options n'est indiquée dans les circonstances actuelles.

C’est pourquoi nous appelons les membres du G20 à accroître d’au moins 20 % leurs contributions à IDA-21, ce qui permettrait à l’IDA de conserver ses niveaux d’engagements financiers annuels. Une telle initiative constituerait aussi un signal fort de solidarité et de soutien aux pays et aux populations les plus pauvres du monde et une réponse à la place privilégiée que les dirigeants africains accordent à l’IDA pour accompagner leur reprise et leur développement.

Nous remercions les membres du G20 pour leur attention et leur leadership, et nous espérons qu’ils saisiront cette occasion historique de changer la donne pour les pays et les populations les plus pauvres du monde.

Prof. Daron Acemoglu
Massachusetts Institute of Technology, États-Unis

Prof. Michael Kremer
Université de Chicago, Illinois, États-Unis

Mavis Owusu-Gyamfi
Présidente-directrice générale de l’African Center for Economic Transformation, Accra, Ghana

Prof. Joseph Stiglitz
Université Columbia, New York, États-Unis

Jean-Paul Adam
Directeur de la division Politiques, suivi et plaidoyer au Bureau du Conseiller spécial pour l’Afrique auprès du Secrétaire général des Nations Unies

Masood Ahmed
Président honoraire du Center for Global Development

K.Y. Amoako
Fondateur et président honoraire de l’African Center for Economic Transformation, Accra, Ghana

François Bourguignon
Chaire émérite, École d’économie de Paris (PSE)

Barbara K. Buchner
Directrice générale de la Climate Policy Initiative

Ha-Joon Chang
Professeur-chercheur au Département d’économie de l’École d’études orientales et africaines (SOAS) et codirecteur du Centre for Sustainable Structural Transformation (CSST), l’université de Londres

Stefan Dercon
Économiste et professeur de politique économique à la Blavatnik School of Government et au Département d’économie de l’université d’Oxford

Shantayanan Devarajan
Professeur de pratique du développement international à l’Edmund A. Walsh School of Foreign Service, université de Georgetown

Charles Kenny
Attaché supérieur de recherche, Center for Global Development

Justin Lin
Doyen de l’Institute of New Structural Economics, université de Pékin

Isaac M. Mbiti
Maître de conférences en politiques publiques et économie à la Frank Batten School of Leadership & Public Policy, université de Virginie

José Antonio Ocampo
Professeur à la School of International and Public Affairs, co-président de l’Initiative for Policy Dialogue (IPD) et membre du Committee on Global Thought, université Columbia

Dani Rodrik
Professeur d’économie politique internationale (chaire Ford Foundation) à la Kennedy School of Government, université Harvard

Jeffrey Sachs
Professeur et directeur du Center for Sustainable Development, université Columbia

Lord Nicholas Stern
Chaire I.G Patel d’économie et de gouvernance, London School of Economics and Political Science

Larry Summers
Professeur (chaire Charles W. Eliot) et président honoraire, université Harvard

Andrés Velasco
Doyen de la School of Public Policy de la London School of Economics and Political Science

Gernot Wagner
Économiste du climat à la Columbia Business School, université Columbia

Leonard Wantchekon
Professeur d’économie politique (chaire James Madison) et professeur de politique et relations internationales, université de Princeton

Ernesto Zedillo
Directeur du Yale Center for the Study of Globalization, professeur d’économie et de politique internationales, professeur d’études internationales et territoriales, université Yale ; ancien président de la République du Mexique

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