Au cours des dernières année, le Gabon s'est positionné comme un défenseur du climat, et a conduit une série d'actions en faveur d'une économie verte. Sa stratégie est orientée autour des secteurs de l'agriculture, des mines, de la gestion durable des ressources halieutiques et forestières, de l'énergie propre et de l'écotourisme. Son engagement pour la protection des forêts et la réduction de ses émissions de gaz à effet de serre porte ses fruits, et le Gabon est aujourd'hui le premier pays d'Afrique à recevoir un paiement de l'initiative pour la forêt de l'Afrique centrale (CAFI) hébergée par les Nations unies. Le Gabon peut continuer sur sa lancée et verdir son économie pour réduire la volatilité de sa croissance et sa trop forte dépendance vis-à-vis des ressources naturelles, ouvrant ainsi des opportunités de diversification économique, de création d'emploi, et de renforcement de sa résilience économique.
Malgré d'abondantes ressources naturelles, le pays peine à réduire la pauvreté au rythme de sa croissance économique. Le Gabon fait partie des pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure, néanmoins le PIB réel par habitant était 20 % plus bas en 2020 qu'en 1990, et un tiers des habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté de 5,50 dollars par jour. Bien que la base économique du Gabon se soit élargie pour inclure les industries du bois, des mines, et des services, le manque de diversification économique reste un défi. Le pays figure ainsi parmi les économies les plus dépendantes des matières premières, le pétrole, le manganèse et les autres industries extractives représentant 98 % de ses exportations de marchandise en 2021. Il en résulte une forte vulnérabilité de la croissance, des exportations et des finances du Gabon par rapport à la volatilité des cours mondiaux des matières premières.
La dépendance vis-à-vis du pétrole a entravé le développement d'autres secteurs économiques. Alors que le secteur public emploie plus de 50 % de la population active formelle, la croissance, le commerce et les investissements du secteur privé se trouvent contraints par des difficultés d'accès au financement, le manque de main-d'œuvre qualifiée, la bureaucratie, les lourdeurs réglementaires, les droits de douane élevés et l'inadéquation de l'infrastructure. Selon une enquête de la Banque mondiale conduite dans le cadre de ce rapport, 24 % des commerçants ont déclaré avoir dû verser des frais discrétionnaires aux points de contrôle le long des corridors commerciaux du pays. Ces pratiques de harcèlement ordinaire sont donc répandues et ont des effets négatifs sur l'économie locale et régionale. Par ailleurs, sur la route reliant la frontière camerounaise à Libreville, un camion peut s'attendre à être arrêté jusqu'à 44 fois, entraînant plus de 15 heures de retard et augmentant significativement les frais de transport. Le coût total lié à ces pratiques est estimé à environ 14 % du prix final des denrées alimentaires pour les consommateurs, ce qui renchérit le coût de la vie et impacte les ménages vulnérables et la classe moyenne.
Le manque de capital humain ralentit également la croissance gabonaise. Malgré une évolution constante du système de protection sociale au cours des 15 dernières années, les prestations sociales non contributives pour les pauvres restent sous-financées, fragmentées, et mal ciblées. Alors qu’un jeune Gabonais sur trois est au chômage, les deux tiers des postes vacants ne parviennent pas à être pourvus. La promotion de l'éducation et de la formation professionnelles et techniques, ainsi que des réformes pour mieux aligner le système éducatif avec les opportunités d'emploi pourraient contribuer à réduire les déséquilibres entre les offres et les aspirations.
Une transformation structurelle plus solide de l'économie gabonaise apparaît essentielle pour atteindre un meilleur modèle de croissance verte et de création d'emplois. Pour y parvenir, il convient de : renforcer l'offre de travail en améliorant la formation et les compétences ; développer un système de protection sociale plus efficace pour protéger les plus vulnérables ; et créer des opportunités économiques dans un environnement plus propice à l'investissement et au commerce, pour que le pays tire parti des opportunités liées aux chaînes de valeur régionales et mondiales. Dans ce contexte, l'économie verte offre une opportunité unique au Gabon d'atteindre plus rapidement une croissance plus inclusive et durable. Pour parvenir à diversifier ses exportations, le Gabon pourrait tirer parti de son capital naturel et investir dans des secteurs comme l'agriculture, la pêche, les services numériques, l'écotourisme, et la foresterie.
Recommandations
Voici les principales recommandations pour aider le Gabon à atteindre une croissance accélérée, durable, et inclusive :
- Aligner les aspirations avec les opportunités en : développant les compétences des élèves en sciences, technologie, ingénierie et mathématiques ; offrant aux jeunes vulnérables des programme ciblés et une aide financière pour qu'ils poursuivent leurs études secondaires et supérieures ; continuant d'adapter le système éducatif aux besoins du marché du travail par la promotion des filières techniques et professionnalisantes à tous les niveaux ; et mettant en place un système de filets sociaux bien ciblé et suffisamment financé pour mieux aider les groupes vulnérables.
- Renforcer l'environnement des affaires en : réformant la législation sur l'investissement et rationalisant les incitations à l'investissement, notamment celles applicables dans les zones économiques spéciales ; augmentant l'accès au financement pour les petites et moyennes entreprises ; renforçant le cadre réglementaire sur la concurrence ; adoptant un cadre juridique pour promouvoir le développement numérique, et soutenir le secteur informatique et technologique ; et créant des incitations, afin de promouvoir la recherche et le développement en matière de pratiques environnementales durables à travers les différents secteurs industriels.
- Verdir et diversifier le commerce et la production en : renforçant la formulation des politiques commerciales gabonaises et les capacités de mise en œuvre ; exploitant les opportunités créées par la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) afin d'augmenter l'accès aux chaînes de commerce régionales ; investissant dans l'infrastructure logistique et commerciale ; révisant la structure tarifaire de la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale) ; optimisant et numérisant les procédures de facilitation du commerce transfrontalier ; améliorant la législation forestière ; développant la production et les exportations du pays dans les secteurs de l'agriculture, des pêcheries et de l'industrie, et des services liés à l'écotourisme ainsi qu'aux services environnementaux et numériques.