UNE BIODIVERSITÉ EXUBÉRANTE
En 2010, l’UNESCO a fait de la forêt de Kafa, qui s’étend sur plus de 760 000 hectares et abrite environ un million d’habitants, une réserve de biosphère nationale. Elle est le « poumon vert » de l’Éthiopie en raison de son rôle dans la séquestration du carbone. Et, avec ses centaines d’espèces de mammifères, d’oiseaux et de plantes, c’est un incroyable réservoir de biodiversité (a). La cardamome et le poivre long y poussent à l’état sauvage tandis que, depuis le sommet des arbres, les singes colobes noir et blanc gardent un œil sur les lions, les buffles et les autres animaux sauvages qui sillonnent la région.
Un singe colobe grimpe sur un arbre dans la réserve de biosphère de Kafa, en Éthiopie. © Kaia Rose/Connect4Climate, Banque mondiale , souligne le ministre d’État pour la gestion des ressources naturelles, Kaba Urgessa : « Il y a un point dont nous devons être sûrs et sur lequel nous devons être vigilants : si nous laissons les agriculteurs s’occuper seuls du café, ils risquent d’introduire des variétés non autochtones. Or, avec les fertilisations croisées, cela pourrait affaiblir les ressources génétiques. Seuls des contrôles sérieux permettent non seulement de préserver les caféiers, mais aussi nos forêts. »
Fleurs de café arabica sauvages. Réserve de la biosphère de Kafa, Éthiopie. © Kaia Rose/Connect4Climate, Banque mondiale TROIS ZONES DISTINCTES
À ce jour, l’Éthiopie abrite cinq réserves de biosphère. Ces sites institués sous l’égide de l’UNESCO ont pour objectif de préserver la diversité biologique et, parallèlement, d’impliquer les communautés locales tout en leur permettant de bénéficier de retombées positives. Chaque réserve de biosphère est divisée en trois zones interdépendantes : une zone centrale ou « noyau », strictement protégée, où toute activité agricole ou économique est proscrite ; une zone tampon, autour de la zone centrale, où des activités limitées de tourisme et d’éducation sont tolérées ainsi que la récolte de produits non forestiers, comme le miel ; et une zone de transition, en périphérie, où l’agriculture est autorisée.
Le projet de gestion durable des terres de la Banque mondiale (a) a accompagné les agriculteurs de la zone de transition, en leur apportant des conseils sur les pratiques agricoles durables, en soutenant leurs efforts pour enrayer la déforestation et la dégradation de l’écosystème, en améliorant la qualité des sols et en préservant la biodiversité.
« Le renforcement des moyens de subsistance dans cette zone de transition devrait alléger la pression sur la zone centrale et réduire l’obligation pour les habitants d’aller y chercher des ressources — et protéger ainsi durablement les caféiers sauvages », souligne Paul Martin, spécialiste principal de la gestion des ressources naturelles à la Banque mondiale.
Mesfin Tekle explique comment, depuis que la création de la réserve de biosphère, la déforestation a immédiatement marqué le pas, surtout dans la zone noyau. Le caféier supporte mal les fortes variations de température, et le fait d’abattre trop d’arbres contribue au réchauffement et à l’assèchement du sol, menaçant ainsi la survie même de ces végétaux, ajoute-t-il. Les opérations de la Banque mondiale dans la zone de transition ont aidé les communautés à privilégier des activités rémunératrices alternatives au lieu de couper du bois pour obtenir du charbon et de défricher les terres pour l’agriculture.
Depuis quelques années, les agriculteurs qui travaillent dans cette zone observent une évolution des saisons. Tadelech Kabede, une caféicultrice installée dans le woreda de Chena, près du noyau de la réserve, explique comment le caractère aléatoire des saisons et des précipitations l’avait obligée à modifier son calendrier de plantation. Mesfin Tekle constate que, dans la forêt, les plants de café s’adaptent : « Ce parfum, ce goût et cet arôme qu’apprécient les amateurs de café, ça vient de la nature. Si nous arrivons à préserver l’habitat des caféiers, alors les gens pourront déguster ce que la nature offre de mieux », se réjouit-il. « Le café, c’est la biodiversité ».
Café Arabica sauvage en cours de torréfaction. © Sue Pleming/Banque mondiale