LES POINTS MARQUANTS
- À travers son Mécanisme de soutien à la mise en œuvre des contributions déterminées au niveau national, la Banque mondiale a aidé le gouvernement marocain à mieux comprendre l’impact des politiques climatiques sur différents secteurs de l’économie et contribué au renforcement des compétences techniques et de la coordination intersectorielle.
- L’accélération de la concrétisation des engagements climatiques exige une cohérence accrue entre les politiques et les cadres de dépenses publiques des différents ministères et secteurs.
- La défense vigoureuse de politiques permettant d’étendre les systèmes d’énergie renouvelable et les mesures d’efficacité énergétique dans les bâtiments pourrait ouvrir des perspectives pour réduire sensiblement la consommation énergétique du pays.
Les Marocains vivent aux avant-postes du changement climatique. Dans certaines régions septentrionales, le littoral perd déjà chaque année 1 mètre de côte, à cause de l’érosion. Sans parler des autres conséquences visibles du changement climatique, de la hausse des températures à la progression du sable du Sahara, qui engloutit oasis et écosystèmes fragiles, en passant par la raréfaction des précipitations ou les pénuries grandissantes d’eau.
Le Maroc a opposé une vigoureuse riposte à ces défis. Au titre de la contribution soumise pendant la période préparatoire à la conclusion de l’accord de Paris, le royaume s’est engagé à réduire d’ici 2030 ses émissions de gaz à effet de serre (GES) de 17 % par rapport au statu quo, envisageant même une baisse de 42 %, conditionnée à l’obtention d’une aide internationale.
Membre du Partenariat pour la mise en œuvre des contributions nationales (NDC Partnership) (a), le Maroc a planché avec les équipes de la Banque mondiale sur des analyses et des initiatives de renforcement des capacités en appui à une planification et une coordination transversales de l’action climatique pour pouvoir tenir ses engagements. Les trois axes de collaboration suivants paraissent les plus prometteurs sur le plan des transformations.
Premièrement, des modèles économiques ont été élaborés en étroite concertation avec des experts locaux, ce qui a permis au ministère de l’Économie et des Finances, au secrétariat d’État chargé du Développement durable et à des ministères sectoriels clés d’évaluer l’impact des politiques climatiques sur différents secteurs de l’économie. Ces modèles sont indispensables pour informer les responsables politiques et les investisseurs potentiels sur différents aspects, depuis l’évolution du comportement des consommateurs, plus sensibles à l’efficacité énergétique, à l’incitation des agents privés à investir dans des solutions sobres en carbone. En décidant d’étendre les systèmes d’énergie renouvelable distribuée et en améliorant l’efficacité énergétique, le secteur du bâtiment pourrait ainsi économiser environ 9 TWh par an — soit près d’un quart de sa consommation actuelle et plus de 8 % de l’objectif de réduction des émissions de GES fixé dans la contribution nationale du Maroc à l’horizon 2030. Pour exploiter ces opportunités, une plateforme interministérielle a également été mise sur pied, dans l’objectif de privilégier la fiscalité verte et les bâtiments économes en énergie mais aussi de mobiliser différents secteurs pour accélérer les réformes politiques et renforcer l’action climatique en général.
Deuxièmement, un travail analytique a été engagé pour avancer des recommandations stratégiques et concrètes en appui à la mise en œuvre des volets d’adaptation de la contribution nationale. Face aux ressources hydriques limitées du pays, à l’épuisement de ses nappes phréatiques et à sa forte dépendance à l’agriculture pluviale, la relation eau-énergie-alimentation a notamment été identifiée comme un enjeu critique. La réglementation ne suffira probablement pas à éviter une surexploitation des nappes, d’où la nécessité d’adopter d’autres solutions (a) susceptibles de donner de bons résultats, comme les approches communautaires de la gestion des modes de consommation, les instruments économiques pour gérer la demande ou encore une sensibilisation accrue aux pénuries. De plus, étant donné l’importance de la coordination intersectorielle pour l’action climatique, l’alignement de la politique et des cadres de dépenses publiques sur les programmes sectoriels et ministériels sera lui aussi décisif. Les effets du changement climatique ne se limitent pas à un seul secteur : l’épuisement des nappes phréatiques touche aussi bien la fourniture d’énergie que l’agriculture. « Pour apporter des réponses efficaces sur le plan de l’adaptation, il faut faire collaborer différents ministères. La collaboration intersectorielle permet non seulement de garantir une efficacité accrue des dépenses publiques mais aussi de mobiliser les capitaux privés, absolument indispensables », explique Craig Meisner, co-chef d’équipe pour le projet.
Troisièmement, le renforcement des capacités du pays est essentiel : groupement d’intérêt public servant de pôle pour le partage d’expertises et d’expériences internationales en matière d’action climatique, le Centre de compétences pour le changement climatique du Maroc (4C Maroc) a participé à l’élaboration d’un système de suivi, de notification et de vérification afin de superviser la mise en œuvre de la contribution nationale en étroite concertation avec les autres initiatives engagées dans le royaume. 4C Maroc pourrait, à terme, s’imposer comme une plateforme régionale de collaboration et de partage de savoirs sur l’action climatique en Afrique. D’autres pays africains pourraient s’inspirer de ce principe pour rationaliser et accélérer le déploiement de leurs propres initiatives en la matière.
« En mettant en place des approches sectorielles — à travers la modélisation des impacts climatiques, la réforme des politiques transversales et une coordination institutionnelle plus étroite de l’action climatique — le Maroc démontre ses capacités d’anticipation face aux enjeux, rassemblant des informations pour sa prochaine contribution nationale visant à installer un développement sobre en carbone et à l’épreuve du climat », se félicite Alexandrina Platonova-Oquab, co-chef d’équipe pour le projet.
Les solutions intersectorielles sont la clé de l’efficacité de la lutte contre le changement climatique.
Chefs de projet :
Alexandrina Platonova-Oquab est spécialiste senior du financement carbone à la Banque mondiale. Pour la contacter : aplatonova@worldbank.org
Craig Meisner est économiste senior de l’environnement à la Banque mondiale. Pour le contacter : cmeisner@worldbank.org
Grzegorz Peszko est économiste principal à la Banque mondiale. Pour le contacter : gpeszko@worldbank.org