Défi
Le principal défi en matière de développement était de veiller à ce que les réfugiés, les personnes déplacées à l'intérieur du pays et les communautés d'accueil — souvent situées dans des zones fragiles — aient accès à de meilleurs services de base et à des débouchés économiques. Cette tâche s'est heurtée à de multiples difficultés en raison de la complexité de la situation au Niger. Selon le HCR, l'escalade des conflits et la détérioration de la situation sécuritaire ont fait passer la population déplacée de force au Sahel à 4,1 millions de personnes en 2022, contre 3,6 millions à la fin de 2021. Ce chiffre englobe 1,1 million de réfugiés et demandeurs d'asile et 3 millions de déplacés internes. Au Niger, le nombre de réfugiés, de personnes déplacées à l'intérieur du pays et de rapatriés a passé de 280 000 en septembre 2018 à près de 706 000 en septembre 2023. Les déplacements forcés se sont également étendus géographiquement, touchant davantage de zones du pays, comme les régions méridionales de Maradi et de Tahoua. Le défi posé par l'augmentation du nombre de réfugiés et de personnes déplacées est d'autant plus grand que ces populations ne sont pas faciles à atteindre, car elles se déplacent fréquemment en raison de l'évolution des conditions de sécurité. Et comme de nombreux réfugiés et personnes déplacées vivent au sein des communautés d'accueil, des tensions sociales et économiques peuvent apparaître en raison du manque de ressources, de services et d'emplois. Par conséquent, les réfugiés, les déplacés internes et les hôtes des zones fragiles ont tous besoin d'un soutien adapté à un environnement de fragilité, de conflit et de violence.
Démarche
Entre 2018, date du lancement du PARCA, et 2023, date de sa clôture, son but a été d'améliorer l'accès aux services de base et aux débouchés économiques pour les réfugiés, les déplacés internes et les communautés d'accueil, dans un contexte opérationnel complexe. L'une des composantes du projet est axée sur la réhabilitation ou la construction de nouvelles infrastructures communautaires afin d'améliorer l'accès aux services publics de base, tels que l'éducation, la santé, l'eau et l'infrastructure économique. Un autre volet, soutient les opportunités économiques par l'intermédiaire de formations et de transferts monétaires via la téléphonie mobile.
Pour atteindre ses objectifs, le PARCA a été conçu de façon à tenir compte d'emblée de la fragilité, de la dynamique de la sécurité et des déplacements fréquents des bénéficiaires, afin de ne pas se laisser surprendre. Le PARCA a utilisé le système de géoréférencement GEMS de la Banque mondiale comme instrument de suivi, mais aussi de manière proactive pour la conception et la mise en œuvre du projet. Par exemple, le GEMS a permis de déterminer le lieu, le secteur et la dimension des investissements d'infrastructure et des activités génératrices de revenus du PARCA, répondant ainsi aux besoins locaux et contribuant à protéger le projet contre la possibilité que des parties prenantes influentes orientent les investissements en fonction de leurs intérêts propres. Il a également permis de légitimer les élus locaux (comme les maires) avec lesquels le PARCA a étroitement collaboré lors de la définition de projets, notamment en justifiant les choix d'investissement. Cet outil a aussi aidé le PARCA à envisager d'autres sites si l'insécurité croissante ou les déplacements des bénéficiaires empêchaient de mener à bien un projet à l'endroit prévu et nécessitaient le déplacement vers un autre site. Pour assurer la pérennité des prestations du PARCA, le processus exigeait, pour chaque investissement, deux protocoles d'accord initiaux : l'un avec l'administration locale, responsable de l'exploitation et de la maintenance des bâtiments locaux, et l'autre avec les ministères sectoriels, responsables de la fourniture de ressources (médecins pour les établissements de santé et enseignants pour les écoles, par exemple). Pour limiter les coûts et faciliter l'exploitation et la maintenance, le PARCA a appliqué les principes de construction standard du Niger, bien connus du secteur privé local. Les administrations locales ont été chargées de l'entretien et, lorsque des pièces détachées étaient disponibles, de les acheter sur place à des prix locaux.
Pour exploiter les compétences locales, de même que les informations sur la sécurité et les prix, le PARCA a également intégré les coûts de sécurité dans les contrats du secteur privé et a fait appel à des entreprises locales. Le PARCA a utilisé la technologie mobile pour effectuer des transferts monétaires sécurisés aux bénéficiaires, ces aides étant destinées à favoriser des activités génératrices de revenus. Le PARCA devait faire preuve de flexibilité pour surmonter les difficultés. Il a donc opéré à partir de trois bureaux de mise en œuvre dans trois régions, ce qui a permis d'établir un lien plus étroit avec les activités du projet. Par ailleurs, le PARCA a travaillé en étroite collaboration avec les acteurs humanitaires et du développement, tant au niveau stratégique qu'opérationnel, afin d'exploiter leurs avantages respectifs, tels que ceux du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), du HCR et des organisations non gouvernementales (ONG) locales. Le parti-pris « spatial » du PARCA a soutenu toutes les populations résidant sur les sites de ses projets, quel que soit leur statut (réfugiés, personnes déplacées ou hôtes). Il a par conséquent renforcé les compétences transférables des individus, utilisables pour profiter des opportunités économiques, quel que soit l'endroit où ils s'installeront par la suite.
Résultats
Entre 2018 et 2023, le PARCA a directement bénéficié à plus d'un million de réfugiés, de déplacés internes, de rapatriés et d’habitants des communautés d'accueil sur ses 1 185 sites répartis dans 18 communes (dont 11 considérées comme fragiles par le gouvernement et le HCR) de cinq régions : Agadez, Diffa, Maradi, Tahoua et Tillaberi. Sur l'ensemble des bénéficiaires directs du PARCA, près de 870 000 personnes (dont près de 245 000 réfugiés et plus de 297 000 femmes) accèdent plus facilement aux services de base comme l'éducation, la santé et l'eau, et près de 78 000 autres aux débouchés économiques. En outre, plus de 180 000 personnes ont bénéficié du renforcement des capacités et d'améliorations institutionnelles. Dans le cadre du PARCA, le secteur privé local a réalisé des chantiers à forte intensité de main-d'œuvre pour réhabiliter, construire ou équiper 328 infrastructures dans les communautés. Il a ainsi atteint, voire dépassé, ses objectifs initiaux :
- 148 salles de classe accueillent 8 880 élèves du primaire par an. Ils peuvent désormais étudier dans des écoles mieux équipées plutôt que dans des conditions de fortune ou en plein air.
- 20 centres de santé ont pris en charge plus de 373 000 patients.
- 61 points d'eau bénéficient à plus de 298 000 personnes en leur offrant un accès direct à l'eau potable et en réduisant le temps et les efforts nécessaires pour aller chercher de l'eau dans d'autres localités situées à plus d'une heure de marche et à environ six kilomètres en moyenne.
- 98 autres infrastructures, dont 23 installations commerciales soutiennent l'économie locale, comme le marché aux bestiaux de Telemces qui bénéficie à plus de 277 000 personnes. Le projet a aussi contribué à la revitalisation des alentours et à l'augmentation des recettes propres des collectivités locales de la zone rurale de Tillia, puisque le montant de la taxe sur le marché a augmenté d'environ 800 pour cent par semaine, selon le maire. Elle est donc passée d'environ 10 000 francs CFA (16 dollars) avant le projet à 700 000 à 900 000 francs CFA (1 160 à 1 490 dollars) après la construction du marché par le PARCA.
- 66,6 kilomètres de route ont été réhabilités entre Taza et Tillia, dans la région de Tahoua, ce qui a permis de réduire de plus de moitié le temps de trajet entre la ville de Tahoua et Tillia, c'est-à-dire de 8 heures à 3 heures et demie.
En outre, le PARCA a élargi l'accès aux débouchés économiques pour près de 78 000 bénéficiaires (dont plus de 31 000 réfugiés et plus de 34 000 femmes) en offrant d'abord à chaque personne trois stages de formation, notamment le cours de l'Organisation internationale du travail (OIT), et des formations sur les compétences financières et de vie. Elles ont ensuite reçu un transfert monétaire pour exercer des activités génératrices de revenus de leur choix, comme l'achat de biens et d'équipements pour améliorer l'offre des magasins locaux, la transformation de matières premières agricoles en biens de plus grande valeur, la préparation et la vente d'encens, la couture et la vente de vêtements, ainsi que la pêche et la vente de poisson. Toutefois, les changements politiques de juillet 2023 ont empêché le projet de mener à bien toutes ses activités. Par exemple, les plus de 81 000 bénéficiaires formés n'ont pas tous reçu leur paiement par téléphonie mobile en raison de problèmes de sécurité. De même, les près de 2 200 bénéficiaires restants (pour atteindre l'objectif de 83 500) n'ont pas pu être formés, car les ONG ont suspendu leurs activités pour des raisons de sécurité.
- Au total, plus de 81 000 bénéficiaires (dont plus de 31 000 réfugiés et plus de 35 000 femmes) ont suivi une série de trois stages, notamment le programme de l'OIT et les cours sur les compétences financières et les compétences de vie.
- Pres de 78 000 bénéficiaires (dont plus de 31 000 réfugiés et plus de 34 000 femmes) ont reçu 108 000 francs CFA (200 dollars) chacun pour mener des activités génératrices de revenus. Par exemple, en octobre 2022, les femmes de la ville de Diffa ont doublé la valeur du maïs qu'elles ont acheté 20 000 francs CFA (équivalent à 32,70 dollars) par sac et vendu sous forme de farine de maïs pour 40 000 francs CFA (65,40 dollars) par sac.
- Dans le cadre de l'allocation pour la prévention et la résilience au Niger (PRA), le projet a contribué à hauteur de 13 pour cent à l'aide apportée à 127 945 jeunes créateurs d'entreprises qui développent des chaînes de valeur agricoles ou d'autres activités économiques (ce qui correspond à l'objectif 1 du PRA sur l'amélioration de l'intégration socioéconomique des jeunes et des femmes).
Enfin, le PARCA a renforcé la gouvernance locale en intégrant les besoins des réfugiés et des personnes déplacées dans 15 plans d'investissement annuels municipaux au cours des cinq dernières années.