Défi
En 2020, alors que la pandémie de COVID-19 se propageait dans le monde entier et que la Gambie enregistrait ses premiers cas, il n'existait aucun filet de protection sociale susceptible d'atténuer les conséquences sur la population du confinement, de la perte de revenus et de la baisse des envois de fonds. Le gouvernement et les partenaires de développement avaient certes publié une politique nationale de protection sociale (2015-2025) et un plan national de mise en œuvre de la protection sociale (2015-20), mais aucun de ces plans n'avait été mis en œuvre, en grande partie en raison d'un manque de financements intérieurs ou émanant des donateurs. Même si, depuis début 2017, la Gambie a accru son soutien à la protection sociale, les interventions étaient peu nombreuses et fragmentées. De ce fait, le pays était dans l’incapacité de riposter à la pandémie de COVID-19 de manière efficace, coordonnée et à grande échelle.
Démarche
Le projet de la Banque mondiale reprenait des éléments d'un projet antérieur dans le domaine de la santé qui avait déjà recouru à une combinaison d’allocations monétaires et d’interventions sur les changements sociaux et comportementaux afin de promouvoir les investissements dans le capital humain. Ce projet était intentionnellement large et simple de sorte à atteindre le plus de personnes possible (y compris 40 % des personnes vivant dans l’extrême pauvreté) dans un environnement peu doté en capacités. Cependant, avec la pandémie de COVID-19, il fallait réagir rapidement. La Banque mondiale a donc aidé les autorités gambiennes à mettre en place le programme « Nafa Quick », un programme de transferts monétaires quasi-universels et sans conditions d'une durée de quatre mois.
Résultats
Afin que le programme Nafa Quick puisse être immédiatement mis en œuvre, un système élémentaire de gestion des informations a été créé en juillet 2020 en vue de limiter les erreurs potentielles dans l'enregistrement des bénéficiaires et d'établir un dispositif de versement temporaire. Un mécanisme de prise en charge des réclamations, sous la forme d’une ligne d'assistance téléphonique gratuite, a également été mis en place en même temps afin de répondre aux questions et de recueillir et de traiter toutes les doléances. Les mesures visant à prévenir la propagation du virus sur les lieux des versements ont également nécessité quelques changements de procédure, notamment des séances plus fréquentes et de moindre envergure, l'obligation de porter un masque et de se laver les mains, ainsi que le recours à la police locale pour faire respecter la distanciation sociale. La campagne d’information et de communication mise en place pour accompagner le programme régulier de transferts monétaires et promouvoir les investissements dans le capital humain s'est effectuée par radio (et non en personne).
Plus de 78 000 ménages dans 30 districts parmi les plus pauvres du pays ont bénéficié de transferts monétaires temporaires quasi-universels et sans conditions pendant une période de quatre mois (juillet-octobre 2020). Les allocations versées par le programme Nafa Quick ont représenté une aide précieuse à une période de l'année difficile. Les mois de juin à octobre constituent la période de soudure, qui se caractérise par des pénuries pour les principaux aliments de base (riz et céréales), ainsi que par une hausse des prix des denrées alimentaires et un épuisement des réserves. En 2020, les mesures imposées pour faire face à la pandémie de COVID-19 n’ont fait qu’aggraver la situation. Deux séances de versements ont été organisées avant la fin de la période de soudure en octobre 2020. Les bénéficiaires ont apprécié la rapidité des paiements. Les versements ont été effectués selon un processus quasi-universel, ce qui a permis d'accélérer les opérations et d'éviter le risque de conflit social à un moment où l’ensemble de la population subissait des pertes de revenus et une baisse des envois de fonds.
Les versements ont permis aux familles de satisfaire leurs besoins essentiels et de compléter les denrées de base par des aliments nutritifs, évitant ainsi d’avoir à recourir à des mécanismes d'adaptation préjudiciables, comme la vente forcée d'actifs. Ils ont également produit des effets indirects sur l'économie locale, grâce à l’accroissement de la demande de nourriture et d'autres biens essentiels. En outre, les transferts monétaires ont même permis à quelques ménages d’investir dans leurs petites entreprises.
Contribution du Groupe de la Banque mondiale
L'Association internationale de développement (IDA) a fourni un don d'un montant de 30 millions de dollars, dont 10 millions ont été utilisés pour la lutte contre la COVID-19 par l’intermédiaire du programme Nafa Quick.
Partenaires
Le programme Nafa Quick a été mis en œuvre par l'Agence nationale de nutrition (NaNA), en collaboration avec les départements du développement communautaire et de la protection sociale du ministère des Femmes, des Enfants et de la Protection sociale. Un partenariat solide a également été noué avec les principaux partenaires de développement, notamment le Programme alimentaire mondial (PAM), le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et l'Union européenne (UE). Le programme de distribution alimentaire du gouvernement a précédé le programme Nafa Quick, et le PAM a apporté son soutien dans les districts non couverts par ce dernier. Un soutien complémentaire sous forme d'assistance technique a également été fourni, notamment pour renforcer la coordination dans le secteur de la protection sociale.
Perspectives
Les autorités gambiennes mettent en place des systèmes de protection sociale essentiels, notamment un registre social qui contiendra les données socio-économiques relatives à près de la moitié des ménages du pays. Cet outil permettra de réagir rapidement aux chocs futurs. En outre, il renforcera la coordination du secteur de la protection sociale et permettra de mieux cibler les interventions. La Gambie progresse également dans le lancement du programme Nafa, qui apportera un soutien à plus long terme à environ 15 000 ménages vivant dans l’extrême pauvreté dans vingt districts parmi les plus pauvres. Le programme Nafa aura également pour objectif de permettre aux femmes bénéficiaires de participer à des activités économiques productives.
Bénéficiaires
« Je suis très heureuse d'avoir reçu cet argent car des femmes vulnérables et sans voix comme moi ne sont ni ciblées ni aidées par les programmes communautaires », confie Fanta Mam Baldeh, 32 ans. Veuve et mère de huit enfants, elle vit à Macca Masire, dans le nord de la région d'Upper River. L’argent reçu lui sert à acheter de la nourriture pour sa famille et des vêtements pour ses enfants.
Pour Omar Touray, 51 ans, petit agriculteur dans la région de Central River-Nord et chef d'une famille de six personnes, ces transferts monétaires « tombent à point nommé, car le pays est actuellement confronté au double problème de la période de soudure et des conséquences négatives de la COVID 19 ». Omar compte utiliser une partie de l'argent pour acheter des produits de première nécessité : riz, arachides, huile.