Défi
Inégal et incertain, l’approvisionnement en eau douce est un défi pour la Tanzanie. L’eau est intrinsèquement liée à une croissance économique inclusive, à la sécurité alimentaire et à la réduction de la pauvreté. L’absence de services d’approvisionnement en eau potable et d’assainissement est un obstacle au développement durable de ce pays d’Afrique de l’Est. En 2005, plus de 14 millions de ruraux et 1,8 million de citadins sont privés d’eau potable. Par ailleurs, près de 10 millions de personnes en milieu rural vivent dans la pauvreté.
En raison d’un entretien insuffisant des infrastructures d’eau et d’assainissement, la Tanzanie doit améliorer la gestion et le développement intégré de ses ressources hydriques. Il est par ailleurs essentiel d’améliorer l’investissement dans la protection et la préservation de sources d’eau vitales, comme les aquifères et les zones humides.
Démarche
Dans sa conception, le projet répond aux besoins du secteur de l’eau, mais aussi, plus largement, de l’économie et de la société. Axé tout particulièrement sur la stratégie gouvernementale de réduction de la pauvreté, il a pour objectif d’améliorer la gouvernance de la gestion des ressources hydriques par le biais de mesures destinées à pérenniser les services d’eau et d’assainissement en milieu rural et urbain.
Ce projet s’inscrit dans la première phase quinquennale du Programme de développement du secteur de l’eau (2005-2025) porté par les autorités et visant, entre autres objectifs, à améliorer la gouvernance et la gestion des ressources hydriques.
Il comporte un important volet de renforcement des institutions du secteur de l’eau, dans l’optique de réduire la pauvreté et d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) en matière d’assainissement et d’hygiène. Ses principaux axes stratégiques sont les suivants : promouvoir l’adoption de latrines chez les ménages ; mettre en place des installations pour se laver les mains dans des villages de tailles diverses concernés par le programme ; et œuvrer à des activités de renforcement des capacités en vue d’améliorer la gouvernance des ressources en eau à long terme.
Résultats
Mené aux côtés d’autres partenaires de développement et avec le soutien financier du gouvernement tanzanien, le Projet d’appui au secteur de l’eau (2007-2015) a touché directement 14 461 715 bénéficiaires des zones rurales et urbaines de Tanzanie, dont plus de 7 millions de femmes, au total. Grâce aux mesures destinées à améliorer la qualité de l’eau, réduire la pauvreté et élargir l’accès à l’assainissement, le projet a œuvré à une plus grande inclusion. La réussite du projet a reposé sur les contributions collectives de partenaires de développement multiples, ainsi que sur la coordination générale assurée par la Banque mondiale au niveau du programme multisectoriel.
Voici les principaux résultats obtenus au cours du projet :
- 3 millions de citadins ont accédé à des sources d’eau améliorées ;
- six offices de l’eau ont été mis en place au niveau des bassins hydrographiques, en plus d’un conseil central, avec la mission de mettre en œuvre un plan de gestion intégrée ;
- 9,2 millions de ruraux ont accédé à des sources d’eau améliorées ;
- 5 150 000 personnes ont bénéficié d’un accès à un assainissement amélioré ;
- 35 908 points d’eau ont été aménagés dans les secteurs ciblés par le programme ;
- 244 270 nouveaux raccordements à l’eau courante ont été réalisés ;
- 4 330 permis d’utilisation des ressources hydriques et 24 autorisations de rejet ont été accordés ;
- les investissements dans l’approvisionnement en eau et le renforcement des capacités effectués dans le cadre du projet ont profité à 23 centres régionaux ainsi qu’aux autorités chargées de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement ;
- plusieurs organes institutionnels (comité de pilotage, groupes de travail dans le secteur de l’eau, groupes de travail techniques) ont été créés ;
- 1 680 écoles se sont dotées d’installations sanitaires ou les ont rénovées ;
- 16 183 villages ont signé la déclaration d’amélioration de l’assainissement des ménages.
Contribution du Groupe de la Banque mondiale
La Banque mondiale a dans un premier temps accordé à la Tanzanie un crédit d’un montant de 200 millions de dollars, par le biais de l’Association internationale de développement (IDA). Ce premier financement a été ensuite suivi d’un crédit supplémentaire de l’IDA de 44,9 millions de dollars approuvé en mai 2014. À la clôture du projet, le financement réel de l’IDA s’élevait à 251,69 millions de dollars.
Partenaires
Le ministère tanzanien de l’Eau et de l’Irrigation avait pour charge de coordonner le projet. Toutefois, un certain nombre d’organes ont appuyé son exécution et son administration, notamment le ministère de la Santé et de l’Action sociale, le ministère de l’Éducation, des Sciences, de la Technologie et de la Formation professionnelle, l’administration régionale et locale du bureau du président, les collectivités locales, les organismes urbains d’approvisionnement en eau et d’assainissement, les organisations communautaires d’approvisionnement en eau, l’Institut de développement et de gestion de l’eau et les organismes d’exécution pour les régions et les districts chargés de la fourniture des services d’eau et d’assainissement. Ces différentes entités ont été directement impliquées dans la mise en œuvre et la gestion du projet, à l’instar du ministère de la Santé et de l’Action sociale qui a supervisé les modalités de mise en œuvre de la sous-composante assainissement et hygiène.
Le Département britannique pour le développement international (DFID), le gouvernement fédéral des États-Unis, la Banque africaine de développement, les ministères néerlandais des Affaires étrangères et de la Coopération au développement, le Kreditanstalt für Wiederaufbau (KfW), l’agence allemande de coopération internationale (Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit, GIZ) et l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA) ont par ailleurs octroyé des fonds supplémentaires.
Perspectives
Six des neuf plans de gestion et de développement intégrés des ressources en eau ont été réalisés et sont en attente de validation par l’office national de l’eau. Le ministère tanzanien de l’Eau et de l’Irrigation a lancé une étude pour identifier et mobiliser des sources de financement pérennes pour les offices des bassins hydrographiques. Grâce aux volets de consolidation institutionnelle et de renforcement des capacités, le suivi des points d’eau repose à présent sur des bases solides. Face aux changements climatiques et aux fluctuations de l’économie mondiale, l’État poursuivra ses investissements dans des dispositifs visant à renforcer le secteur de l’eau et de l’assainissement.
Bénéficiaires
Dans le village de Kidotoni (région du Kilimandjaro), Matilda Ngianaeli (52 ans) bénéficie d’un accès à un nouveau système d’adduction d’eau fonctionnant à l’énergie solaire.
“Avant, on allait puiser l’eau à bonne distance d’ici, dans un ruisseau de Makuyuni, et il fallait être endurant pour entreprendre ce trajet », explique Matilda Ngianaeli. « Quand on n’avait pas d’eau, on l’achetait à ceux qui avaient un vélo. Un bidon de 20 litres coûtait 500 shillings : ça faisait une sacrée somme, vu que l’on a besoin de plus d’un bidon par jour. Aujourd’hui, si votre logement n’est pas raccordé, vous pouvez toujours aller au point d’eau public, où 3 bidons de 20 l vous coûteront 100 shillings.”
Le lycée de Ngudu, avec ses 881 élèves et ses 49 enseignants, est l’un des nombreux établissements qui bénéficient aujourd’hui d’un accès à l’eau.
« Quand notre lycée a été raccordé, ça a été un événement incroyable », se souvient John Kimasa, proviseur du lycée. « Chaque jour, deux classes étaient chargées d’aller chercher de l’eau pour l’école à la prison de district voisine, soit une perte de deux heures sur le temps scolaire. Les professeurs et les élèves s’entendaient sur la façon de rattraper le temps perdu en dehors des heures de cours : c’était un gros problème, mais il fallait que nous couvrions le programme dans les délais. Aujourd’hui, nous sommes ravis que l’établissement dispose d’un branchement au réseau permanent et puisse stocker l’eau, en cas de panne ».
Les adolescents comme les enseignants pâtissaient du manque d’accès à l’eau : « Quand on n’a pas d’eau chez soi, il est difficile de se concentrer sur son travail », explique John Kimasa en soulignant que le lycée peinait à attirer des enseignants qualifiés en raison du manque d’accès à l’eau. « Mais depuis que nous sommes raccordés, nos professeurs sont plus motivés. Il nous manque toujours cinq enseignants, mais lors de la prochaine affectation, ils ne devraient pas hésiter à nous rejoindre. »
À Nyanguge-Muda, le système d’adduction d’eau a été achevé en février 2015 ; dans sa phase d’essai, il allège déjà le quotidien des habitants.
Quant à Mayanda, 40 ans, elle figure parmi les 3 500 bénéficiaires du nouveau réseau de canalisations d’Inonelwa, livré en juillet 2014 : « Comme je n’avais pas de vélo, je quittais la maison à 5 heures du matin pour aller chercher de l’eau. Je devais parfois pousser jusqu’à Nyangege, à six kilomètres d’ici. Quand je revenais, il était 9 h passées, et je pouvais enfin passer aux autres tâches ménagères. Seule la saison des pluies nous soulageait. »