Le défi
L’économie du Burkina Faso, qui repose sur l’agriculture, reste dominée par une production de subsistance et marquée par la faible productivité des cultures et de l’élevage. Bien qu’en progression, la diversification reste limitée, tandis que le développement des filières agropastorales souffre du manque d’entreprises dans le secteur privé formel. Toujours prédominantes, les exportations de coton représentent environ 60 % du total des exportations agricoles, soulignant le besoin de diversifier la production et les exportations. Des interventions dans ce sens sont indispensables pour réduire la dépendance du pays à l’égard de quelques produits de base et l’aider à se lancer sur de nouveaux débouchés à forte croissance et forte valeur ajoutée. Le pays doit notamment améliorer la compétitivité de certaines filières pour cibler les marchés nationaux, infrarégionaux et internationaux.
Le Burkina Faso possède un avantage comparatif potentiel dans plusieurs cultures de rente non traditionnelles, comme les fruits (en particulier les mangues) et les légumes (oignons, tomates, pommes de terre et haricots), qu’il pourrait exporter vers les pays africains de la côte Ouest et vers les pays européens où la demande est forte, surtout pour les produits issus de l’agriculture biologique. Pour exploiter ses possibles sources de croissance, le Burkina Faso doit éliminer une série de contraintes. Il doit également renforcer la compétitivité de ses chaînes d’approvisionnement et accéder plus facilement à ces marchés.
La démarche
Le Programme d’appui aux filières agro-sylvo-pastorales (PAFASP) a été conçu pour promouvoir l’entrepreneuriat dans les zones rurales du Burkina Faso, où les populations ont du mal à obtenir des prêts auprès des banques commerciales ou des institutions de micro-finance. Il vise également à renforcer la compétitivité de l’agriculture dans d’autres filières que le coton — un objectif particulièrement déterminant pour assurer la diversification voulue de l’économie, tout en continuant de s’appuyer sur les ressources naturelles du pays.
Grâce à des subventions pour le co-financement, ce projet cherche à inciter les petites et moyennes entreprises à investir. Il soutient par ailleurs le développement d’infrastructures commerciales gérées par des opérateurs privés, essentielles pour l’activité des producteurs, notamment les plus petits d’entre eux, car elles respectent les mêmes normes de qualité que leurs concurrents étrangers.
Le projet cherche également à garantir la qualité et le volume de matières premières indispensables à un développement agroindustriel rentable, en appuyant les systèmes d’irrigation à petite échelle mis promus à travers le pays depuis une vingtaine d’années et qui sont aujourd’hui considérés comme un modèle à suivre dans la sous-région.
Les résultats
Grâce au financement initial dont il a bénéficié puis à un financement complémentaire, le projet (qui a couvert la période 2006-17) a bénéficié à plus de 385 000 personnes, dont 30 % de femmes, et a largement contribué au développement des quatre filières ciblées (viande/bétail, volaille, oignon et mangue) dont les organisations professionnelles sont désormais bien structurées et pleinement opérationnelles. En plus d’augmenter les revenus tirés de l’activité agricole, le projet a sensiblement développé les exportations agricoles.
Le projet a eu un impact direct sur le renforcement de la compétitivité dans ces quatre filières, avec notamment les résultats suivants :
- Les rendements des producteurs de mangues et d’oignon ont progressé, passant respectivement de sept à 22 tonnes et de 17 à 17,5 tonnes.
- Les exportations agricoles des filières ciblées sont passées de 6 500 à 206 000 tonnes sur les marchés sous-régionaux et de 17 500 à 275 000 tonnes sur les marchés internationaux.
- Le montant total des prêts consentis par des banques locales et des institutions de microfinance en faveur de microprojets a atteint 2,4 milliards de francs CFA, ce qui a permis de rapprocher les petits exploitants du système bancaire.
- Près de 162 microprojets ont donné naissance à des petites et moyennes entreprises pleinement opérationnelles et dont l’existence et le dynamisme devraient perdurer après la clôture du projet.
- Les superficies nouvellement irriguées grâce au projet atteignent environ 3 500 hectares, dont 1 200 hectares réservés aux vergers de manguiers, ce qui devrait stimuler la production face à une demande soutenue sur les marchés européens.
- Le projet a permis de remettre en état ou de construire des infrastructures productives et commerciales : 36 parcs de vaccination du bétail ont été créés, ainsi que huit foires aux bestiaux, deux marchés pour les volailles (commercialisation et transformation) et trois marchés de fruits et légumes ; trois installations de conditionnement et de transformation des mangues ont été modernisées ; et 60 séchoirs à mangue ont été installés ou modernisés.
La contribution du Groupe de la Banque mondiale
Les financements du Groupe de la Banque mondiale en faveur de ce projet s’élèvent à 116 millions de dollars. Plus généralement, au 5 juin 2017, son portefeuille d’opérations en cours pour le Burkina Faso comprenait 33 projets représentant un engagement d’environ 1,6 milliard de dollars, dont 20 sont financés par l’IDA (1,374 milliard), six par des fonds fiduciaires (76 millions) et sept sont des projets régionaux (149 millions). Ces opérations concernent les secteurs suivants : agriculture, énergie, transport, éducation, modernisation du secteur public, eau et assainissement, protection sociale, santé, gouvernance économique, engagement citoyen, commerce et compétitivité. Le Groupe de la Banque mondiale soutient également le renforcement des capacités dans le pays, à travers des travaux de recherche économique dans l’agriculture, l’énergie, la gouvernance, le commerce et la compétitivité ainsi que la gestion macroéconomique et budgétaire.
Les partenaires
Le Groupe de la Banque mondiale entretient d’étroites relations de partenariat avec les autres bailleurs de fonds du pays, en particulier l’Union européenne, la Banque africaine de développement et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), ainsi qu’avec des donateurs bilatéraux comme l’Agence française de développement, la coopération allemande, l’USAID et la coopération suisse au développement, dont les interventions portent sur l’agriculture. Cette collaboration s’est révélée particulièrement efficace pour soutenir les efforts constants des autorités burkinabè pour améliorer la sécurité alimentaire et diversifier la production agricole. L’étroite coopération entre le Groupe de la Banque mondiale et le gouvernement ainsi que l’approche suivie avec les partenaires expliquent la réussite du projet. Elles jouent un rôle clé dans la transformation du secteur agricole en assurant la promotion de chaînes de valeurs agro-sylvo-pastorales.
Les perspectives
Le Groupe de la Banque mondiale continuera de soutenir le Burkina Faso qui souhaite introduire des réformes stratégiques pour attirer les investisseurs privés dans la transformation des produits à forte valeur ajoutée, un secteur qui représente un vivier d’emplois salariés supplémentaires. C’est l’objectif premier d’une étude en cours, financée par la Banque mondiale, sur le potentiel agroindustriel du pays : il s’agit d’identifier les filières prometteuses afin d’orienter les interventions en leur faveur.
Les bénéficiaires
Natif de Bobo-Dioulasso, l’un des bassins de production de mangue les plus dynamiques du pays, Yaya Kone travaille dans ce secteur depuis près de 40 ans : « Au début, pendant la pleine saison, je ne pouvais traiter que dix tonnes environ de mangue séchée », raconte-t-il. « Mais aujourd’hui, grâce à la technologie du séchoir tunnel installée avec l’aide du projet, j’arrive à traiter environ 40 tonnes par campagne. Comme les affaires sont florissantes, j’ai pu m’acheter un troisième séchoir. Et toujours avec le soutien du projet, j’ai conclu un partenariat avec une entreprise néerlandaise qui finance l’installation de six nouveaux séchoirs. Si tout va bien, je devrais pouvoir bientôt traiter environ 100 tonnes par saison. »
Mariétou Sana est secrétaire-générale du groupe de femmes Sougri Nooma dans le village de Bogoya. « Avant, mes enfants et moi dormions à côté des oignons », explique-t-elle. « Malheureusement, j’avais beaucoup de mal à les conserver au frais et à éviter qu’ils moisissent après la récolte, donc j’étais obligée de les brader. Grâce à la technique du ruudu, un silo de conservation mis au point par le projet, je peux désormais conserver les bulbes plus de six mois après la récolte et les vendre au meilleur prix. En mars, un sac de 100 kilogrammes d’oignons partira autour de 20 dollars mais six mois plus tard, le prix peut grimper jusqu’à 100 dollars. »