Chine : réduire la pauvreté en mobilisant les communautés

09 avril 2013



Grâce au soutien de la Banque mondiale et d’autres partenaires au développement, près de 1,4 million d’habitants de 18 comtés désignés comme pauvres dans les provinces du Sichuan, du Yunnan et de Guangxi ont bénéficié d’une sécurisation de leurs moyens de subsistance et d’un accès amélioré aux services de base à la suite d’investissements entrepris notamment dans les infrastructures rurales. Le projet a par ailleurs mis en place plusieurs stratégies de lutte contre la pauvreté, parmi différentes pistes examinées.

Défi

Depuis 30 ans, la Chine a accompli des progrès remarquables et remarqués sur le front de la lutte contre la pauvreté. Entre 1981 et 2005, le nombre de Chinois vivant avec moins de 1,25 dollar par jour est passé de 835 millions à 208 millions. Mais pour ceux-là, qui vivent dans des habitats dispersés, éloignés de tout et difficiles à atteindre, les choses seront plus délicates : la plupart des personnes victimes de la pauvreté absolue sont des ruraux et 80 % environ résident dans les provinces occidentales et centrales. Sans compter que la croissance économique parvient moins qu’avant à faire reculer la pauvreté, ce qui rend les initiatives conventionnelles de plus en plus onéreuses.

Les minorités ethniques et les handicapés représentent une part disproportionnée de ces déshérités du monde rural. Les premières, qui constituent à peine 9 % de la population totale, représenteraient environ 40 % des Chinois vivant encore (à l’époque de l’évaluation du projet) dans la pauvreté absolue. Quant aux handicapés et aux ménages comptant des handicapés en leur sein, ils composent une part importante et croissante de ces indigents. Selon les estimations, ils représenteraient environ un tiers des ruraux pauvres. On observe une corrélation entre pauvreté et handicap dans les régions défavorisées, l’un et l’autre se renforçant mutuellement.

Solution

Le projet a déployé une approche participative sur une échelle encore inédite en Chine, impliquant un grand nombre de villages isolés dans la planification et la prise de décisions. Les réalisations étaient sélectionnées par les communautés et les ménages parmi un éventail d’options large et peu contraignant, sachant que l’accent a été mis sur le rôle des femmes, qui ont véritablement pu se prononcer.

Le projet entendait soutenir le développement d’infrastructures rurales de base (routes, assainissement, adduction d’eau et systèmes d’irrigation à petite échelle, énergie, électrification et réseaux de télécommunication), de services d’éducation et de santé primaires et d’une agriculture de montagne viable, afin que ces populations des zones isolées, rarement visées par ce type de programmes, puissent obtenir de nouveaux moyens de subsistance.

Le volet en faveur des minorités ethniques était unique en son genre, faisant de ce projet l’un des plus ambitieux jamais montés par la Banque mondiale pour lutter contre la pauvreté de ces groupes marginalisés. Enfin, un don du Département du développement international (DfID) du Royaume-Uni a permis de fournir une assistance aux handicapés du comté de Yuexi, dans le Sichuan.


« Nous avons discuté ensemble des priorités, ensuite nous avons élu nos représentants puis nous avons voté sur les différents projets. Dans ma région, nous avons choisi de commencer par les routes, avant l’eau potable. »

Qiu’e Su

Membre du comité de gestion de l’eau potable, village de Pannei, comté de Longsheng, province du Guangxi


Résultats

Mis en œuvre entre 2006 et 2010, le projet a obtenu plusieurs résultats importants :

  • L’approche participative a concerné un grand nombre de « villages naturels » isolés : 88 % de ces villages dans la province du Guangxi ont été impliqués dans les décisions prises, donnant lieu à la constitution de 399 groupes de villageois pour la mise en œuvre. Dans le Yunnan, 893 groupes de mise en œuvre ont été créés dans les villages naturels les plus démunis.
  • Les communautés rurales pauvres ont été consultées aux étapes cruciales ainsi que pour le suivi et l’évaluation finale des activités. Sur toute la période du projet, la part des ménages ruraux impliqués dans le choix des activités de réduction de la pauvreté est passée de 19,5 à 46,2 %. Dans le même temps, la part des ménages participant à la définition de ces activités est passée de 18,6 à 43,3 %.
  • Les femmes ont eu leur mot à dire dans le choix des activités prioritaires, lors des discussions sur les modes de mise en œuvre envisagés ainsi que pour la conception de systèmes ultérieurs de gestion et de maintenance. Le projet s’est attaché à satisfaire les préférences formulées par les habitants pour les écoles, les dispensaires locaux et l’eau potable.
  • Plusieurs pratiques innovantes ont été élaborées, qui ont permis de conforter l’engagement des communautés et le ciblage des plus pauvres — à l’instar d’une analyse participative de la pauvreté, de la passation de marchés par les communautés et des groupes de mise en œuvre dans les villages naturels isolés.
  • L’incidence de la pauvreté a enregistré un net repli (de 6,6 points) dans les zones couvertes, passant de 15,9 % en 2006 à 9,3 % en 2010.
  • Le revenu par tête des agriculteurs des villages concernés a progressé de 12 % par an sur toute la période, pour un gain de 9 % dans les villages hors projet et une moyenne nationale de 9,2 % pour les zones rurales. La consommation réelle par habitant a suivi le mouvement, augmentant de 39,8 % sur la même période.
  • L’état des infrastructures s’est considérablement amélioré : fin 2010, 98,8 % des villages naturels couverts étaient raccordés à l’électricité, 83,9 % à une route et 98,2 % à des services téléphoniques. La construction de routes de desserte a profité à 202 066 ménages (802 264 personnes) et l’amélioration du système d’adduction d’eau à 120 154 ménages (480 000 personnes).
  • Grâce aux dispositifs d’irrigation à petite échelle, les agriculteurs ont vu leur alimentation en eau s’améliorer, avec la possibilité d’augmenter leurs rendements, de se lancer dans des cultures de rente et de gagner plus d’argent. Sur le plan de l’approvisionnement énergétique, le biogaz et les réchauds efficients ont fait gagner du temps aux agriculteurs (en réduisant la corvée de bois) et fourni une énergie plus propre, sachant que l’arrivée de l’électricité a favorisé les petites activités de transformation.
  • En termes de santé, 21 150 femmes et 22 578 enfants ont bénéficié de soins. De plus, 21 085 nouveau-nés ont vu le jour dans des établissements modernes et 505 485 personnes ont reçu une assistance médicale.
  • Dans le comté du Yuexi (Sichuan), des services ont été mis en place qui ont permis à plus de 3 000 ruraux handicapés de participer à la vie socioéconomique et de se sensibiliser à la législation en vigueur afin de mieux faire valoir leurs droits.

« Pour moi, ce projet a surtout eu l’intérêt de nous pousser à écouter les agriculteurs au moment de la sélection des activités et à adopter une approche participative depuis la phase de planification jusqu’à la mise en œuvre. »

Canbin Huang

Directeur adjoint, bureau du gouvernement provincial chargé de la lutte contre la pauvreté, province du Guangxi

Contribution du Groupe de la Banque mondiale

Par le biais de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), la Banque mondiale a octroyé un prêt à la Chine de 99,71 millions de dollars, en plus de la faire bénéficier de son expertise et de sa vaste expérience de la réduction de la pauvreté, acquise ailleurs dans le monde.

Partenaires

Plusieurs donateurs ont collaboré pour faire de ce projet un modèle de coopération exemplaire. Le DfID a alloué une généreuse aide au projet d’ensemble, complétée par des dons additionnels distincts mais vitaux pour l’élaboration de l’approche participative, le système de suivi et d’évaluation, le projet pilote d’enseignement gratuit et le volet destiné aux handicapés du comté du Yuexi (Sichuan). Au total, son soutien a atteint 37 millions de dollars.

Perspectives

Les trois provinces couvertes ont transposé l’approche participative et les stratégies conçues pour le projet à l’ensemble de territoire. Elles ont aussi fait des émules dans le reste du pays pour différents projets de réduction de la pauvreté.

Le projet de développement durable dans les zones rurales pauvres (2010-2015), soutenu par la Banque mondiale et actuellement mis en œuvre dans 25 comtés et 800 villages des provinces du Shaanxi et du Henan ainsi que dans la municipalité de Chongqing, contribue à généraliser ce type d’approches et le principe du développement conduit par les communautés.


Image
40 000
Femmes et enfants ont reçu des soins médicaux.


Carte du projet (a)



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