Nairobi (Kenya)
29 avril 2024
Seul le prononcé fait foi
Je vous remercie, Président Ruto.
Ce que nous voyons aujourd’hui, c’est une manifestation d’unité : des dirigeants du continent tout entier réunis pour trouver des points de convergence dans leurs aspirations singulières. Nous mettons en évidence la façon dont ces aspirations peuvent se conjuguer à une IDA efficace et dotée de ressources suffisantes pour opérer un changement générationnel. Mais aussi toute la tâche qu’il faudra accomplir pour concrétiser ces aspirations.
Le continent africain peut s’enorgueillir de sa population jeune et dynamique, dont la croissance est la plus rapide au monde. Il possède de vastes ressources naturelles, des terres fertiles, et l’esprit d’entreprise y est en plein essor. Cependant, un ensemble de défis bien définis éclipsent trop souvent ces bénédictions.
C’est la situation à laquelle nous sommes confrontés.
L’Afrique se trouve à la croisée des chemins. La voie que nous choisirons déterminera l’avenir des générations à venir.
Acceptons-nous le statu quo, un avenir où des millions de personnes resteront piégées dans la pauvreté ? Où le droit humain fondamental à l’électricité n’est pas garanti ? Où l’accès aux soins de santé laisse à désirer ? Et où les infrastructures sont insuffisantes pour soutenir le potentiel du continent ?
Ou saisissons-nous l’occasion de libérer le potentiel de l’Afrique, ouvrant ainsi une ère de prospérité et de progrès ?
La Banque mondiale est convaincue que la réponse à ces questions est claire. L’Afrique peut et doit tracer la voie vers un avenir meilleur.
Cela n’a rien d’une chimère.
Nous avons vu des exemples de réussite dans des pays qui ont su tirer parti de l’IDA, adopter la bonne gouvernance, investir dans l’éducation et l’infrastructure, et promouvoir un environnement propice au développement de l’activité commerciale. Ce faisant, ils ont contribué à tracer la voie à suivre pour d’autres.
- Commençons dans les années 1960 par la Corée dont la population est fort instruite, mais qui manque d’industries et de capitaux essentiels.
- L’histoire de la Chine démarre plus tard. En 1978, 770 millions de personnes vivent à la limite de la pauvreté dans ce pays, en proie à une croissance économique atone due à l’absence de concurrence sur le marché et à la rigidité des politiques de prix et de mobilité.
- La voie de l’Inde se dessine dans les années 1990 et 2000. Plombé par des marchés fortement réglementés, la domination monopolistique du secteur public et un déséquilibre commercial, ce pays fait alors face à une grande pauvreté.
Aujourd’hui, chacun de ces pays en plein essor. Chacun d’entre eux est passé du statut d’emprunteur de l’IDA à celui de donateur de l’IDA. Mais leurs parcours ont des points communs et des enseignements utiles à chacun d’entre nous.
- Dans ces trois pays, l’État a joué un rôle crucial dans la création d’un environnement propice à la croissance du secteur privé. Il a clarifié la politique réglementaire, mis en œuvre des réformes pour attirer des investisseurs nationaux et étrangers, et favorisé la concurrence.
- Chaque pays a bénéficié d’une augmentation significative de sa population en âge de travailler pendant des phases cruciales de son développement et a investi dans sa ressource humaine pour tirer parti du dividende démographique, se dotant ainsi d’une main-d’œuvre qualifiée et immédiatement disponible.
- Chacun a reconnu l’importance du commerce en tant que moteur de la croissance, et a mis en œuvre des politiques visant à réduire les obstacles et à renforcer les secteurs manufacturier et tertiaire, ouvrant la voie à une expansion économique rapide.
Et tous trois ont fait appel à l’IDA pour réaliser des investissements stratégiques dans l’éducation, la santé et le développement rural, des secteurs cruciaux pour tout pays en développement.
Ils ne sont pas les seuls : 36 pays sont sortis du régime IDA, dont 12 depuis 2000.
C’est le pouvoir transformateur d’une aide au développement bien menée.
S’agissant de l’Afrique, nous voyons des parallèles prometteurs.
Plusieurs pays africains connaissent une croissance économique et mettent en œuvre des réformes pour attirer les investissements privés. Bon nombre d’entre eux partagent une trajectoire démographique similaire, et la population en âge de travailler devrait y augmenter.
Cependant, beaucoup en Afrique connaissent des difficultés. Comparés aux tigres asiatiques, les investissements du secteur privé en Afrique restent faibles. L’insuffisance des infrastructures et l’accès limité aux financements freinent davantage la croissance. Et les obstacles que représentent la dette, le changement climatique et les conflits entravent les progrès.
Mais c’est précisément à ce stade que réside la promesse du type d’effort de développement qui rassemble aujourd’hui les responsables gouvernementaux, la communauté internationale et le secteur privé.
Nous devons tous être des partenaires du progrès.
Nous avons tous un rôle crucial à jouer, les pouvoirs publics pilotant leurs propres programmes de développement et l’IDA se trouvant au cœur de ces stratégies.
Le développement économique ne suit pas une trajectoire standard. Cela dit, en comprenant le parcours des nations qui réussissent et en appliquant les leçons apprises de celui-ci, l’Afrique peut tracer sa propre voie vers un avenir économique plus radieux.
- Premièrement, en investissant dans la ressource humaine. Toute économie prospère repose sur une main-d’œuvre qualifiée, instruite et en bonne santé. Nous devons faire en sorte que chaque enfant ait accès à une éducation de qualité, de l’école primaire à la formation professionnelle et au-delà. Et nous devons nous employer à rendre les soins de santé accessibles.
o Face à ce défi, nous mettons l’IDA à contribution pour réaliser notre objectif de fournir des soins de santé abordables et de qualité à 1,5 milliard de personnes dans le monde en cinq ans, étendre nos interventions à de nouvelles communautés et élargir la portée de nos services à toutes les étapes de la vie d’un individu.
- Deuxièmement, en construisant des infrastructures efficaces et robustes. Il s’agit non seulement de routes et de ponts, mais aussi d’infrastructures énergétiques. Je crois fermement que l’accès à l’électricité est un droit humain fondamental et qu’il est à la base de tout effort de développement couronné de succès.
o Pourtant, la moitié de la population africaine, soit 600 millions de personnes, n’a pas accès à l’électricité. C’est pourquoi nous nous employons à fournir de l’énergie à 300 millions d’Africains d’ici 2030 — 250 millions de personnes pour la Banque et 50 millions pour la Banque africaine de développement.
- Troisièmement, en soutenant des secteurs créateurs d’emplois comme l’agriculture et la logistique, où le secteur privé pourrait à terme intervenir pour aider les agriculteurs à intégrer de nouveaux marchés, les entrepreneurs à se rapprocher des clients et les jeunes à accéder à l’information et aux possibilités.
o Il s’agit là d’un domaine d’intervention à fort potentiel économique. Mais deux problèmes se posent : premièrement, 6 % seulement des terres agricoles sont irriguées, contre 37 % en Asie ; et deuxièmement, l’Afrique a l’un des taux d’utilisation d’engrais les plus faibles au monde, ce qui induit des rendements représentant le tiers de la moyenne mondiale. En investissant de manière ciblée dans le bon engrais pour le bon sol — et dans l’irrigation —, nous pouvons pratiquer une agriculture responsable ET créer des opportunités.
o De tels investissements aident les communautés à gravir l’échelle économique et à faire en sorte que ce qui est fabriqué en Afrique ne soit pas seulement destiné à l’Afrique, mais que cela puisse être acheté HORS du continent.
La Banque mondiale est déterminée à jouer sa partition dans tous ces domaines. Nous continuerons de mettre à disposition des ressources financières, des compétences techniques et des conseils sur les politiques à suivre ; travaillant aux côtés des autorités nationales pour les aider à mettre en œuvre les réformes difficiles dans lesquelles elles s’engagent.
Nous sommes rejoints dans cette démarche par une armée d’amis et de partenaires issus du secteur privé et d’organisations militantes. Dans quelques instants, vous entendrez les dirigeants de cette coalition unique en son genre qui agissent sans tarder en faveur de l’IDA et de l’Afrique.
Leur action est déterminante pour faire en sorte que les pouvoirs publics disposent des ressources et du soutien dont ils ont besoin pour réaliser le potentiel de chaque nation.
Et je me réjouis à la perspective de les retrouver plus tard dans l’année, à l’occasion du Sommet économique africain, pour soutenir la Vingtième reconstitution des ressources de l’IDA.
Mais la responsabilité ultime incombe à l’Afrique elle-même. Ses dirigeants doivent adopter des réformes audacieuses, lutter contre la corruption et investir dans leur population. Ils doivent créer un environnement où la créativité s’épanouit et où l’innovation prospère.
L’avenir de l’Afrique n’est pas déterminé à l’avance. C’est un choix. Un choix entre stagnation et progrès, entre désespoir et espoir. Choisissons non pas la voie du moindre effort, mais celle qui offre le plus de potentiel. Faisons le choix d’un avenir meilleur et plus prospère pour l’Afrique, un avenir où chaque enfant a la possibilité de s’épanouir.