Je vous remercie de participer à cette conférence. Je vais parler des activités que nous menons pour venir en aide aux pays, du moratoire sur le service de la dette des pays les plus pauvres, des progrès réalisés en matière de transparence de la dette et de certaines des étapes à suivre. La toute dernière édition de notre rapport Perspectives économiques mondiales décrit une économie mondiale frappée de plein fouet. La pandémie et l’arrêt de l’activité économique ont ébranlé de la vie de milliards de personnes.
Les pays en développement sont confrontés à une crise sanitaire et économique sans précédent qui met en péril les acquis engrangés depuis des décennies sur le plan du développement et menace de faire basculer plus de 60 millions de personnes dans l’extrême pauvreté cette année. Les pauvres et les plus vulnérables sont les plus durement touchés, ce qui creuse davantage les inégalités déjà profondes causées par une croissance souvent trop lente pour créer des emplois, générer des revenus médians plus élevés et assurer de meilleurs niveaux de vie.
Face à la pandémie, nous nous employons à limiter les dégâts et à aider les pays à se préparer à la reprise afin qu’ils puissent se reconstruire en mieux et s’en sortir plus forts qu’avant. Les pays devront favoriser une affectation rationnelle des fonds aux secteurs productifs dans les nouvelles structures qui seront en place à la fin de la pandémie, en ayant recours à des systèmes à même de constituer et préserver un capital humain et physique plus important pendant la reprise. De nouveaux types d’emplois, d’entreprises et de systèmes de gouvernance devront voir le jour.
Le Groupe de la Banque mondiale augmente considérablement ses ressources, déployant d’importants flux positifs nets, surtout vers les pays les plus pauvres. Nous travaillons intensément sur des mesures rapides et de vaste portée visant à aider les pays pauvres à surmonter la pandémie, et nous avons franchi un cap important en mettant rapidement en œuvre des programmes dans plus de 100 pays en développement. Ces programmes permettent de renforcer les systèmes de santé, protéger les ménages les plus démunis, sauver des emplois et des entreprises et procurer de l’argent aux personnes qui en ont le plus besoin.
L’IDA et la BIRD collaborent avec les pays pour élargir la couverture des programmes de filets de sécurité sociale. L’IFC entend fournir 47 milliards de dollars de financement au secteur privé dans les pays en développement sur 15 mois. La MIGA quant à elle aide à créer un environnement d’investissement plus stable en atténuant et en gérant les risques résultant du climat d’incertitude.
Permettez-moi maintenant de parler du moratoire sur la dette que Kristalina Georgieva, Directrice générale du FMI, et moi-même avons défendu. Le paiement du service de la dette de tous les créanciers publics bilatéraux a été suspendu le 1er mai, ce qui a accru les ressources potentielles pour les pays les plus pauvres.
Les gouvernements des pays du G20 ont préconisé un traitement comparable de la part des créanciers commerciaux, une attente à laquelle ces derniers n’ont pas encore répondu. Ces atermoiements sont particulièrement frustrants au regard de l’aggravation de la pauvreté dans les pays débiteurs et du volume des ressources qui partent des pays pauvres vers les investisseurs, dont la plupart se trouvent dans des économies avancées comme les États-Unis, l’Europe et le Japon, et sont aussi des créanciers de grande envergure en Chine, dans les États du Golfe et dans d’autres pays.
Une partie importante de cette initiative consiste à aider les pouvoirs publics des pays débiteurs à apporter plus de transparence dans la gestion de leur dette et dans leurs pratiques d’investissement, et à rendre publics les montants de leurs dettes et les clauses y relatives. Il s’agit là d’une mesure essentielle à la création d’un climat d’investissement favorable susceptible d’attirer des volumes massifs de nouveaux investissements efficaces dont les pays débiteurs auront besoin pour bâtir des économies plus fortes. Ces facteurs contribuent déjà à différencier les pays sur les marchés des capitaux. Des progrès substantiels peuvent être réalisés cette année, mais ils nécessiteront beaucoup d’efforts de la part des créanciers, des débiteurs, du FMI, de la Banque mondiale et d’autres acteurs. La transparence devrait concerner l’ensemble des engagements financiers et instruments assimilables à de la dette de ces États, et limiter le recours aux accords de non-divulgation, aux nantissements, aux privilèges et aux contrats fondés sur des informations asymétriques – où le prêteur en sait plus que les populations du pays emprunteur.
Ces mesures en faveur du financement, des liquidités et de la transparence sont importantes et seront d’une grande utilité, mais elles ne suffiront pas.
Les Perspectives économiques mondiales font état d’une profonde récession mondiale qui s’accompagne d’un effondrement des échanges mondiaux, du tourisme et des prix des matières premières et d’une extraordinaire instabilité des marchés. La pandémie aura également des effets socioéconomiques graves et durables qui pourraient assombrir les perspectives de croissance économique à long terme, réduire les investissements en raison d’un climat de grande incertitude et entraîner l’érosion du capital humain.
Au-delà des mesures prises pour faire face à la crise immédiate afin de limiter les dégâts, les décideurs peuvent rendre une reprise forte plus probable en préservant les systèmes et infrastructures du secteur privé et en permettant aux marchés d’affecter des ressources aux activités productives. Le stress que la récession exerce sur les comptes de patrimoine peut mettre à nu les faiblesses des États et des entreprises. Les décideurs peuvent résoudre les problèmes liés à ces comptes de patrimoine en assurant la transparence des engagements financiers (à cet égard j’ai déjà parlé des dettes souveraines, mais les banques, les sociétés et les entreprises publiques ont besoin de beaucoup plus de transparence) et en mettant en place des mécanismes de règlement de différends plus rapides et plus efficaces.
De nombreux pays prennent déjà des mesures pour faciliter la résolution du problème de défaillance des entreprises. La judiciarisation et des procédures de règlement interminables constituent des problèmes majeurs. Certains pays ont instauré des moratoires assortis de délais pour les procédures de faillite pendant la période de pandémie afin d’encourager des formes de règlement plus rapides. À l’inverse, d’autres initiatives pourraient miner le processus de restructuration et ralentir la reprise, à l’instar des interruptions prolongées des procédures d’insolvabilité.
Malgré les difficultés auxquelles les gens sont confrontés, jusqu’ici nous ne sommes pas au bout de certaines de nos plus grandes préoccupations. Pour l’instant, la plupart des restrictions à l’exportation annoncées au début de cette année n’ont pas été mises en application et les prix mondiaux des denrées alimentaires sont pour la majeure partie restés stables.
En outre, des progrès importants sont réalisés en matière de connectivité numérique dans les économies en développement. L’un des avantages en est la capacité de certains pouvoirs publics à faire parvenir des aides financières à certains des ménages les plus pauvres. Il va de soi qu’il faudrait en faire davantage pour améliorer l’infrastructure numérique dans les économies en développement, et c’est là une partie importante de notre travail où nous espérons voir des progrès.
Pour conclure, je suis tout à satisfait des actions menées par les services du Groupe de la Banque mondiale pour venir en aide à nos pays clients. Ainsi que du rapport Perspectives économiques mondiales à paraître. Nous continuerons de prendre des mesures rapides et de vaste portée pour répondre aux besoins des populations des pays en développement. Je vous remercie une fois de plus de votre participation à cette conférence.