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DISCOURS ET TRANSCRIPTIONS

Examen à mi-parcours de l’IDA17

18 novembre 2015


Makhtar Diop, vice-président pour la Région Afrique Examen à mi-parcours de l’IDA17 Washington DC, États-Unis

Tel que préparé pour l'allocution

 

Je vous remercie Madame la présidente.

Excellence, Monsieur le Président Macky Sall ; Excellence, Monsieur le Premier ministre Lionel Zinsou ; Honorables Ministres ; Représentants de l’IDA ; Distingués invités; Mesdames et Messieurs.

Je tiens avant tout à m’associer à Sri Mulyani Indrawati pour remercier le gouvernement sénégalais de nous accueillir tout au long de la semaine. Je vous souhaite également la bienvenue à Dakar pour cet examen à mi-parcours d’IDA17.  Permettez-moi aussi de présenter mes plus sincères condoléances au peuple de France après les abominables attentats perpétrés vendredi dernier à Paris. Nous sommes réunis ici pour aider de notre mieux les pays les plus pauvres. Cette mission n’a jamais été aussi importante qu’aujourd’hui dans un monde en proie à autant de fragilité, de conflits et de violences.

Lors de notre précèdent examen à mi-parcours d’IDA à Abidjan, l’Afrique était une des régions de la planète affichant une croissance économique parmi les plus rapides. Et cela grâce à de bonnes politiques macroéconomiques, des cours toujours plus élevés pour nos principales matières premières, et du fait d’un meilleur climat des affaires qui drainait une quantité importante d’investissements étrangers. Cette longue période de croissance économique, qui s’est élevée à plus de 5 % par an a été parfois appelée « L’essor de l’Afrique ». Elle a surtout permis de réduire le niveau de pauvreté sur le continent.

Les conditions économiques sont aujourd’hui beaucoup plus défavorables, et l’Afrique est confrontée à de forts vents contraires : le super-cycle des matières premières a pris fin ; la décélération de nombreuses économies émergentes nuit aux échanges et aux investissements ; et la hausse attendue des taux d’intérêt au niveau mondial affaiblira encore davantage la croissance.

Mais les performances économiques de la décennie écoulée doivent se poursuivre, et même s’accélérer. La Banque entend y contribuer dans le cadre de ses deux objectifs cardinaux, à savoir mettre un terme à l’extrême pauvreté et favoriser une prospérité partagée. Et nous redoublons nos efforts pour soutenir les pays africains à atteindre une croissance plus forte, plus résiliente, plus inclusive, et plus soutenable.

Aujourd’hui, un certain nombre de défis nous préoccupent tous – au premier rang desquels, malheureusement, les risques de conflits et de violences, ainsi que l’arrivée incessante de réfugiés d’Afrique et du Moyen-Orient. Mais aussi, plus positivement, notre défi d’atteindre les nouveaux Objectifs de développement durable ; et l’espoir de trouver un accord ambitieux et décisif sur le changement climatique à Paris le mois prochain.   

Pour résoudre chacun de ces défis, il nous faudra établir de nouveaux partenariats, trouver de nouvelles idées et nous engager à agir de manière déterminée. Cet accent porté au partenariat, aux idées et aux actions est le symbole de l’IDA17. C’est en effet ce que nous faisons chaque jour, dans plus de 80 pays, aux côtés de nos clients et de nos partenaires.

Cette revue à mi-parcours de l’IDA17 est une excellente occasion pour analyser ce que nous avons réalisé, et réfléchir à ce qu’il nous reste à faire. C’est ainsi que nous pourrons rassembler nos idées, nos ressources et nos engagements pour réussir dans un monde toujours plus complexe. L’IDA17 a apporté des innovations importantes. À mi-parcours, il est temps de nous interroger sur quelles innovations doivent être déployées, et quelles innovations de seconde génération l’IDA peut générer et soutenir. C’est dans ce cadre que je voudrais insister sur trois points.

Premier point, l’IDA a su répondre aux demandes et réaliser ce que nous attendions d’elle. L’IDA est toujours très sollicitée par l’ensemble des pays du continent. Au cours de l’année budgétaire 2015, qui a été la première année de l’IDA17, nous avons engagé 19 milliards de dollars. C’est le niveau le plus élevé atteint pour une première année de cycle financier à l’IDA. Cette même année, l’IDA a décaissé près de 13 milliards de dollars au travers de ses différents instruments. Nous avons de nombreux projets en attente pour le reste de l’IDA17, avec bien souvent une demande plus forte que les ressources disponibles. Permettez-moi également d’ajouter que l’IDA a accru ses moyens pour répondre aux chocs et aux urgences.

Personne n’aurait pu anticiper l’épidémie tragique de virus Ébola au début de l’IDA17. Mais elle a su y répondre avec force, en dégageant 1,2 milliard de dollars de financement et d’assistance technique. L’IDA a aussi répondu présent face à d’autres chocs tels que le tremblement de terre au Népal. Du fait des moyens mobilisés pour ces deux grandes urgences, les financements de l’IDA17 pour répondre aux crises sont aujourd’hui épuisés. Cela bien sûr affectera notre habilité à faire face à d’autres chocs ou crises, en particulier dus au changement climatique.

Au delà du besoin de reconstituer ces fonds, il nous faut mieux réfléchir à la nature des chocs et de la fragilité qui ont empêché d’atteindre une croissance économique encore plus forte et partagée en Afrique. Les catastrophes naturelles, qui se sont aggravées avec le changement climatique ainsi que la fragilité et les conflits en font partie.

La fréquence et l’intensité sans cesse plus fortes des phénomènes climatiques – inondations, sécheresses, cyclones- démontrent qu’ils ne sont plus isolés comme avant. Nous devons nous y préparer davantage. Face à des phénomènes qui sont devenus la norme, il nous faut donc un plan à long terme d’adaptation au changement climatique. C’est pourquoi nous annoncerons lors de la COP21 le mois prochain à Paris un Plan d’actions pour le climat en Afrique.

De même, il nous faudra mieux analyser les causes profondes de la fragilité en Afrique, tout en répondant aux crises qui surviennent. La fragilité est souvent due à des déséquilibres géographiques. Ce phénomène d’inégalités territoriales, par lequel on peut identifier « deux pays au sein d’un même pays », est manifeste dans plusieurs pays africains. De meilleurs indicateurs de développement humain dans une région d’un pays particulier sont corrélés à des investissements plus élevés dans l’éducation, et, la santé dans cette même région. Ces déséquilibres accentuent les inégalités, perpétuent le manque d’opportunités économiques et sont sources de conflits au sein des pays.

Au-delà des ces réponses à des situations d’urgence, l’IDA17 a apporté un appui décisif en matière d’infrastructures et de développement humain. Les financements fournis par l’IDA17 devraient entre autre permettre à 15 à 20 millions de personnes d’accéder à l’électricité, de vacciner 200 millions d’enfants, et de fournir des services essentiels de santé à 65 millions de personnes. Nos efforts ont également permis d’améliorer sensiblement les indicateurs de santé maternelle et infantile, ainsi que les taux d’achèvement des élèves des écoles primaires, pour donner seulement deux exemples parmi tant d’autres. Les résultats sont donc impressionnants, mais il nous reste encore beaucoup à faire.

En particulier, les pays d’Afrique doivent trouver des financements pour répondre à leurs énormes besoins en infrastructures. Plutôt que de se concentrer sur des projets, par exemple, énergétique dans chacun des pays, nous prônons une intégration régionale pour créer des synergies et pour libérer le potentiel de croissance dans les économies de chaque sous-région du continent. Dans ce domaine aussi, les demandes de financement à l’IDA dépassent largement ses ressources, et les financements régionaux sont déjà consommés.

C’est une parfaite transition pour évoquer mon second point, celui de l’évolution des financements pour le développement. Dans les pays éligibles à l’IDA, les besoins en investissement pour atteindre les objectifs de développement sont beaucoup plus élevés que l’épargne domestique et que les aides au développement disponibles. C’est pourquoi nombre de ces pays, y compris notre pays hôte le Sénégal, ont eu recours aux marchés financiers internationaux. Comment l’IDA peut-elle donc répondre aux besoins d’emprunts non-concessionnels de ce groupe de pays? Quel équilibre peut-on trouver pour que ces prêts permettent des avancées en termes de développement, tout en préservant la stabilité macroéconomique et la soutenabilité de l’endettement ? Nous avons pour cela besoin d’une IDA qui puisse s’appuyer sur ses succès passés, tout en proposant des solutions ambitieuses et innovantes. Nous vous ferons une proposition en ce sens au cours de la semaine, qui saura mieux répondre à la demande croissante de financement pour investir dans la croissance économique.

Nous devons aider les emprunteurs de l’IDA à débloquer les financements pour réaliser les investissements qui sont déterminants pour les infrastructures et le développement humain. Ces financements proviendront de trois principales sources : 1) la mobilisation des ressources domestiques ; 2) attirer les financements privés ; et 3) ceux de l’IDA et des bailleurs.

Les pays emprunteurs de l’IDA doivent générer des recettes pour financer leurs investissements publics. Leurs capacités dans ce domaine varient fortement. Le FMI a défini une méthode d’analyse de ce que l’on appelle « l’écart de conformité » en matière de perception de recettes, pour aider les pays à renforcer leur gestion des impôts. Cet appui permet à la fois d’accroître les recettes publiques tout en améliorant la confiance dans les institutions. Inciter le secteur privé à investir ne fonctionne que lorsqu’il a confiance dans les institutions, et que la transparence dans la perception des impôts est assurée. Malgré cela, convaincre le secteur privé d’investir dans les pays éligibles à l’IDA prend du temps. L’IDA a donc un rôle clef à jouer pour soutenir les réformes de la gestion et du recouvrement des impôts et pour renforcer la gouvernance d’ensemble, conditions nécessaires pour que les secteurs porteurs de croissance reçoivent plus d’investissements privés.

Permettez-moi de vous donner un exemple récent dans lequel les financements de l’IDA ont eu un effet de levier. Le projet de gaz de Sanfoka qui a été récemment approuvé repose sur une garantie de paiement de 500 millions de dollars de l’IDA et d’une garantie-enclave de prêt de 200 millions de dollars de la BIRD. Ces garanties devraient mobiliser 7,9 milliards de dollars de nouveaux investissements privés pour l’extraction offshore de gaz naturel au Ghana. Le Ghana bénéficiera énormément de ce projet qui produira plus de 1000 mégawatts d’électricité propre, et remplacera ainsi la production électrique par combustion de gaz qui s’avère coûteuse et polluante. Le Ghana réduira ainsi ses importations de pétrole de 12 millions de barils par an. Ce projet sera surtout le plus grand investissement privé d’Afrique subsaharienne.

A l’avenir, nous avons besoin de l’IDA pour multiplier des innovations telles que le projet Sankofa et pour répondre aux besoins de financements de nos différents pays clients, y compris pour ceux qui peuvent financer leurs projets par des ressources non-concessionnelles.

Si de nombreux pays à croissance forte peuvent désormais accéder aux marchés financiers internationaux, l’IDA continue de jouer un rôle essentiel pour les pays pauvres et fragiles. Il s’agit en particulier des 34 pays dont les financements IDA prennent pour partie ou intégralement la forme de dons, et qui ont d’immenses besoins de développement mais ne peuvent recourir aux marchés financiers. Ce sont par exemple la République Centrafricaine, le Burundi, le Libéria, et le Soudan du Sud. L’aide publique au développement a un rôle à jouer dans le renforcement des institutions, afin de permettre à ces pays de sortir de la fragilité. C’est la raison pour laquelle l’IDA est si importante. La mobilisation de recettes nationales est souvent limitée dans ces pays et la dépendance aux financements concessionnels est élevée. Ces aides sont déterminantes dans les domaines de la santé, de l’éducation, et des programmes d’assistance sociale. Au titre de l’année budgétaire 2015, l’IDA a doublé ses prêts aux États fragiles et en conflits par rapport à l’année précédente. Soutenir ces pays est primordial, pas seulement pour chacun de ces pays pris individuellement, mais également pour les pays voisins afin de prévenir et limiter les externalités négatives et les effets de contagion. Mais aussi pour la croissance de l’Afrique dans son ensemble, qui pourrait être remise en cause par une diffusion de ces fragilités. Notre priorité donnée aux pays fragiles et en conflit n’est pas seulement un objectif louable : diminuer les facteurs de fragilité, et contribuer à une croissance inclusive sera déterminant pour prévenir la résurgence de conflits et de violence dans ces pays.

Cela nous amène à notre troisième et dernier point : l’IDA intervient en temps de crises, dans les lieux où elles se produisent. L’interaction entre développement, sécurité et politique est aujourd’hui déterminante, comme le montre les flux actuels de migrants originaires d’Afrique et du Moyen-Orient. L’IDA17 a permis de réaliser des progrès considérables à ce titre. Nous collaborons étroitement avec les Nations Unies et d’autres partenaires dans le cadre de trois grandes initiatives en Afrique  – dans la région des Grands lacs, au Sahel et dans la Corne de l’Afrique.  Elles ont toutes trois été lancées conjointement par le président Jim Kim et le secrétaire général de l’ONU  Ban Ki-moon avec d’autres agences partenaires, au cours d’une visite dans ces pays.  Ces initiatives reposent sur un principe simple, mais, fondamental : grâce à ses compétences techniques et à sa capacité de mobiliser des fonds et de rassembler les autres partenaires, l’IDA peut contribuer à réduire les risques et à relancer l’économie lorsque les pays affichent une volonté politique claire pour résoudre les défis sécuritaires et de développement. L’IDA nous permet de coordonner et d’intensifier nos efforts dans ce domaine par son leadership, sa capacité à innover et son soutien financier.

La communauté  internationale s’est rassemblée en août dernier à Addis-Abeba et s’est engagée à soutenir le programme « multiplier par mille les milliards de dollars alloués au développement ».  Quelle sera la contribution de l’IDA ? De toute évidence, elle doit continuer de se concentrer sur le financement concessionnel qui constitue l’essence même de son action afin que ses pays membre les plus pauvres puissent toujours bénéficier de dons et de ressources concessionnelles.

Comment allons-nous pouvoir continuer à octroyer ces ressources concessionnelles, dans une économie mondiale qui marque le pas et compte tenu des contraintes budgétaires qui s’imposent aux pays bailleurs de fonds ? Cette semaine nous permettra d’évaluer les résultats du groupe de travail sur l’IDA17 portant sur la vision à long terme du développement et sa soutenabilité financière.

Plus généralement, l’IDA ne pourra soutenir efficacement les nouveaux Objectifs de développement durable si les pays emprunteurs n’augmentent pas leurs recettes domestiques et n’améliorent pas leurs capacités.

D’un autre côté, les pays qui recourent davantage aux emprunts non-concessionnels doivent augmenter leurs capacités de gestion de la dette, et d’évaluation de la faisabilité technique et financière des projets. L’IDA est déjà à l’œuvre dans ces domaines et se tient à la disposition des pays qui souhaitent sauter le pas et recourir au financement non concessionnels pour les aider dans cette entreprise.

À la lueur des trois points que je viens d’évoquer, nous pouvons constater que l’IDA est en pleine évolution. A l’heure du bilan des progrès accomplis pour atteindre les objectifs de l’IDA17, ces nouveaux défis mondiaux constitueront le socle de nos réflexions et de nos instruments financiers pour IDA18.

Nos efforts pour augmenter la mobilisation des ressources domestiques ne se feront pas « du jour au lendemain». Mais tout au long de l’IDA18, et  – au-delà. 

Ces pourquoi ils doivent s’accompagner d’un engagement durable en faveur de l’amélioration de la gestion des recettes ;  de davantage de gouvernance dans les entreprises publiques, surtout, celles qui fournissent de l’électricité ; et du renforcement du consentement à l’impôt dans le cadre d’un régime fiscal simplifié. Il faut multiplier les approches innovantes telles que le projet Sankofa car elles attirent de nombreux financements et investissements privés dans des secteurs productifs clés.

Puisque nous sommes en train de réfléchir à une vision de long terme pour l’IDA, prenons en compte les récentes innovations et opportunités pour améliorer la qualité de nos programmes en cours. Soyons également ouverts à toute nouvelle innovation pour concevoir des solutions financières sur mesure, capables de s’adapter aux défis de développement de nos clients toujours plus nombreux.

Merci encore de m’avoir donné l’occasion de m’exprimer ici.  Je me réjouis des échanges et discussions que nous aurons cette semaine pour atteindre tous les objectifs que nous nous sommes fixés pour l’IDA17, et, pour construire ensemble une IDA plus forte et durable.

 


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