DAKAR, 9 avril 2025 – Les gouvernements des pays du Sahel -- Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, et Tchad --, se sont réunis à Dakar pour un forum de haut niveau, marquant le dixième anniversaire de la Déclaration sur l'irrigation au Sahel, dénommé Forum Dakar+10. A cette occasion, ils ont lancé un appel à l’action pour accélérer les investissements dans l’irrigation afin de réaliser l’objectif de mettre 1 000 000 d’hectares de terres sous maîtrise totale d’eau d’ici 2035.
Au terme de trois jours de débats et de réflexions, les ministres des pays du Sahel ont adopté la nouvelle Déclaration de Dakar par laquelle ils s’engagent à promouvoir une irrigation performante, efficace, durable et résiliente face aux défis environnementaux et socioéconomiques.
À la lumière des défis mondiaux récents et face à l'interconnexion croissante des crises - qu'elles soient environnementales, sanitaires, économiques ou géopolitiques -, les Etats ont opté pour des politiques de souveraineté alimentaire, sortant ainsi du paradigme de l’importation des produits agricoles. « La souveraineté alimentaire est possible non seulement au regard des immenses potentialités en eau, en terres et en énergie de la région, mais aussi grâce aux nouvelles technologies dans le domaine de l’irrigation », a déclaré Dr. Abdoulaye Mohamadou, Secrétaire Exécutif du Comité permanent Inter-Etat de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS).
La Déclaration de Dakar de 2013 sur l'irrigation au Sahel avait établi une vision ambitieuse de renforcer la résilience, la sécurité alimentaire et la prospérité économique. Les réalisations au cours de la décennie témoignent du chemin parcouru vers cet horizon stratégique. Le bilan dressé par les participants a fait ressortir que les superficies aménagées, bien qu’augmentées d’environ 285 000 hectares, n’ont cependant pas atteint l’objectif fixé.
Le Forum a été l’occasion pour les participants d’adopter une nouvelle stratégie qui définit cinq grandes priorités d'investissement visant à favoriser une transformation dans l'irrigation au Sahel. Ces priorités incluent : (i) le soutien aux programmes d'irrigation nationaux qui intègrent un aspect régional ; (ii) l’amélioration de la performance des schémas d'irrigation publics et communautaires ; (iii) la promotion du développement de l’irrigation dirigé par les agriculteurs ; (iv) la réduction du déficit d'investissement ; (v) la mise en œuvre d’une approche territoriale intégrée ; (vi) la diversification des sources d'eau pour une meilleure résilience climatique ; et (vii) le renforcement de la résilience des systèmes d'irrigation face aux défis environnementaux et conflictuels.
La pertinence de partenariats entre les États, les institutions financières, les chercheurs et le secteur privé a été mise en avant pour promouvoir des solutions innovantes et inclusives. « Investissons dans des systèmes d’irrigation modernes et résilients, qui permettront d’accroître la productivité agricole, de réduire notre dépendance aux aléas climatiques et de garantir un avenir prospère à nos populations, » a déclaré Dr. Mabouba Diagne, Ministre de l'agriculture, de la souveraineté alimentaire et de l'élevage du Sénégal. « Ensemble, faisons de l’irrigation durable un pilier de la transformation agricole au Sahel. »
Les participants ont insisté sur le rôle fondamental des agriculteurs dans la production, y compris leur contribution au financement des systèmes d'irrigation. Ils ont convenu d’accroître la mobilisation des ressources des budgets nationaux pour le financement de l’irrigation, d’améliorer les cadres de gouvernance pour accroitre la performance de l’agriculture, d’accélérer la transformation des systèmes de production irrigués actuels vers des systèmes de cultures diversifiés et axés sur le marché en améliorant les chaines de valeur, et d’assurer l'entretien et la modernisation des infrastructures existantes. Ils se sont engagés à renforcer la coopération régionale pour mieux coordonner les initiatives d'irrigation transfrontalières, faciliter l'harmonisation des normes et de la planification stratégique, et à suivre les progrès vers des objectifs collectifs d'irrigation au Sahel.
« Dakar+10 doit être un tournant décisif dans le développement d’une agriculture irriguée résiliente aux aléas climatiques et dont l’essor est indispensable au renforcement de la sécurité alimentaire, à la création d’emplois tout au long de la chaine de valeurs et donc, à la réduction de la pauvreté dans notre région », a affirmé Chakib Jenane, directeur du développement durable pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre à la Banque mondiale.