ABIDJAN, le 12 juillet 2018 – Selon le dernier rapport sur la situation économique de la Côte d’Ivoire publié aujourd’hui, les perspectives à court et moyen termes sont favorables pour l’économie ivoirienne qui devrait maintenir une bonne trajectoire de croissance du PIB, de l’ordre de 7 à 7,5 % au cours des prochaines années. Intitulé « Pour que demain ne meure jamais : la Côte d’Ivoire face au changement climatique », le rapport souligne toutefois l’urgence d’accélérer ces efforts et de prendre des mesures supplémentaires pour éviter que les effets du changement climatique ne mettent en péril ces progrès économiques et ne fassent basculer des millions d’Ivoiriens dans la pauvreté.
« La bonne performance de l’économie ivoirienne, qui affichait un taux de 8 % en 2017, est essentiellement due au secteur agricole qui a bénéficié de conditions climatiques avantageuses. Elle a aussi bénéficié d’une certaine accalmie après l’instabilité politique et sociale du premier semestre 2017 et de conditions plus favorables sur les marchés internationaux », explique Jacques Morisset, chef de programme pour la Côte d’Ivoire et principal rédacteur du rapport. « Le gouvernement a également réussi à maîtriser ses comptes, avec un déficit moins élevé que prévu de 4,2 % du PIB, tout en continuant sa politique ambitieuse d’investissement, en partie financée par une politique d’endettement judicieuse sur les marchés financiers. »
Le rapport note toutefois que l’activité du secteur privé a ralenti en 2017 par rapport à 2016 et surtout 2015, ce qui pourrait réduire le rythme de croissance de l’économie ivoirienne au cours de prochaines années. Dans le contexte d’ajustement budgétaire prévu en 2018 et 2019, il est important que le secteur privé reste dynamique et devienne le principal moteur de croissance. D’autant que les incertitudes liées au climat social et politique et aux prochaines élections de 2020 risquent d’inciter les investisseurs à adopter un comportement plus attentiste.
Comme la croissance économique de la Côte d’Ivoire repose en partie sur l’utilisation de son stock de ressources naturelles, les auteurs du rapport consacrent un chapitre à l’impact du changement climatique sur l’économie. Ils dressent un constat alarmant : ce stock de ressources aurait diminué de 26 % entre 1990 et 2014. Plusieurs phénomènes visibles confirment cette dégradation, comme la déforestation, l’épuisement des réserves d’eau et l’érosion côtière. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), le changement climatique pourrait induire une baisse du PIB de l’ensemble de l’Afrique de l’ordre de 2 à 4 % d’ici 2040 et entre 10 à 25 % d’ici 2100. Pour la Côte d’Ivoire, cela correspondrait à une perte de l’ordre de 380 à 770 milliards de francs CFA en 2040.
« Ce rapport lance un cri d’alarme afin de susciter une prise de conscience rapide et collective », souligne Pierre Laporte, directeur des opérations de la Banque mondiale pour la Côte d’Ivoire. « La lutte contre le changement climatique va requérir des décisions immédiates et doit devenir une priorité pour que le pays maintienne un rythme de croissance accéléré et soutenable dans la durée. »
Le rapport accorde une attention particulière à l’érosion côtière et au secteur du cacao qui représente un tiers des exportations du pays et touche directement plus de 5 millions de personnes. Avec un littoral de 566 km, la Côte d’Ivoire compte aujourd’hui une population côtière de près de 7,5 millions d’habitants, qui produit près de 80 % du PIB national. Deux tiers de ce littoral est affecté par l’érosion côtière, avec des conséquences dramatiques pour les communautés et l’économie du pays.
L’État ivoirien, qui a déjà pris conscience de ce défi et élaboré une stratégie pour y face, doit accélérer sa mise en œuvre. Cela permettra par la même occasion de développer une économie « verte » et de créer de nouveaux emplois.