WASHINGTON, 7 août 2014 - L’Égypte, la Tunisie, l’Iran, le Liban, la Jordanie, le Yémen et la Libye sont enfermés dans un cycle de politiques inadéquates et de croissance médiocre qui empêche leur économie de connaître une croissance durable. C’est la conclusion de l’étude contenue dans le dernier numéro du Bulletin trimestriel d’information économique de la Banque mondiale consacré à la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, qui vient d’être publié.
Intitulée Predictions, Perceptions and Economic Reality - Challenges of Seven Middle East and North Africa Countries Described in 14 Charts (1), cette étude démontre que la situation des pays concernés a empiré après les soulèvements de 2011. La croissance reste faible et ne produit pas suffisamment d’emplois, même si certains signes récents laissent entrevoir une amélioration de la conjoncture en Égypte et en Tunisie. Le niveau toujours élevé des déficits budgétaires et l’accélération de l’augmentation de la dette publique laissent peu de place au financement d’investissements vecteurs de croissance. L’activité du secteur privé est anémique et les rares emplois créés dans le secteur public sont pourvus au gré des relations personnelles, une pratique qui est source d’amertume parmi les jeunes. Enfin, le passage de nombreux travailleurs dans le secteur informel a pour effet de créer un vaste groupe de personnes vulnérables, à la merci des chocs extérieurs.
« S’il est vrai que le niveau élevé du chômage constitue un problème particulièrement pernicieux dans ces pays, la question des travailleurs du secteur informel est encore plus préoccupante », estime Shanta Devarajan, économiste en chef à la Banque mondiale pour la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA). « Ces personnes, qui n’apparaissent pas dans les statistiques de l’emploi, se trouvent dans une situation particulièrement difficile en raison de la précarité de leurs revenus et d’un niveau de vie souvent proche du seuil de pauvreté ».
Ces sept pays ont les moyens de se hisser sur une trajectoire de croissance plus rapide, mais la viabilité de leur expansion dépend beaucoup des politiques économiques choisies par les pouvoirs publics. « Les responsables de l’action publique risquent d’adopter des politiques inadéquates s’ils s’opposent à la mise en œuvre des réformes nécessaires en se fiant aux prévisions faisant état de perspectives favorables pour l’économie de leur pays », commente Lili Mottaghi, économiste pour la région MENA à la Banque mondiale et auteur de l’étude. Des travaux ont mis en évidence une tendance à l’optimisme dans les prévisions de croissance relatives aux régions en développement, en particulier le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord. Ces projections, en effet, ne prennent pas nécessairement en compte les toutes dernières informations disponibles, ni les ruptures structurelles qui régissent parfois l’activité économique.
Il est nécessaire de prendre rapidement des mesures pour promouvoir les activités économiques nécessaires au bien-être durable de l’ensemble de la population des pays étudiés. Parmi ces mesures doivent figurer diverses réformes structurelles — ciblage des subventions, amélioration du climat de l’investissement, promotion de la bonne gouvernance, élimination des facteurs de rigidité sur les marchés des produits et du travail — qu’il convient de bien intégrer aux politiques économiques. Que les perspectives économiques à court terme soient prometteuses ou sombres, ces réformes s’imposent : si elles ne sont pas mises en œuvre, le secteur privé peinera à contribuer à la croissance et à créer des emplois.
(1) Prévisions, perceptions et réalité économique : les défis de sept pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord résumés en 14 graphiques.