LONDRES, June 7, 2013 - Ce n’est pas uniquement le comportement de l’individu, mais aussi des facteurs sociaux et structurels (pauvreté, marginalisation, stigmatisation, etc.), qui ont un impact sur l’épidémie de VIH en Europe et en Asie centrale. Telle est la principale conclusion d’un nouveau rapport publié aujourd’hui par le Groupe Banque mondiale, l’OMS/Europe et la London School of Hygiene & Tropical Medicine. Dans le cadre de cette étude ont été analysées des bases factuelles sur la vulnérabilité face au VIH et la riposte à cette épidémie dans tous les pays de la Région européenne de l’OMS.
Ce rapport, intitulé HIV in the European Region: vulnerability and response, braque les projecteurs sur les populations clés les plus exposées au risque de contracter une infection à VIH : les usagers de drogues par injection, les travailleurs du sexe et les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Il confirme que ces personnes sont touchées avec une fréquence disproportionnée par l’épidémie de VIH, qui gagne du terrain en Europe (le nombre de cas de VIH signalés a dépassé 1,5 million en 2011). Les cas de VIH dans ces trois groupes représentent quelques 50 % de l’ensemble des personnes diagnostiquées. L’instabilité économique et les risques de récession augmentent la vulnérabilité au VIH et aux infections.
« Le pourcentage effrayant de cas d’infection à VIH au sein des communautés pauvres et marginalisées des usagers de drogues d’Europe orientale et d’Asie centrale souligne l’importance cruciale et la pertinence, à l’échelle mondiale, des objectifs adoptés récemment par la Banque mondiale : mettre fin à la pauvreté extrême et promouvoir le partage de la prospérité », déclare David Wilson, directeur du Programme mondial de lutte contre le VIH/sida à la Banque mondiale. « Parallèlement, la progression du VIH dans les pays d’Europe méridionale les plus durement frappés par la récession montre les interactions profondes entre la pauvreté, l’exclusion et la maladie. »
« L’exclusion sociale est le principal moteur de l’épidémie de VIH en Europe. C’est un cercle vicieux : la marginalisation sociale augmente le risque d’être touché par le VIH et le VIH aggrave la marginalisation sociale en ajoutant un sceau d’infamie supplémentaire. Le résultat final est souvent d’être exclu de la prévention, du traitement et des soins contre le VIH, qui sauvent des vies », explique Martin Donoghoe, chef de programme pour le VIH/sida, les maladies sexuellement transmissibles et l’hépatite virale à l’OMS/Europe. « Nous sommes persuadés que notre nouveau cadre politique européen, Santé 2020, soutiendra le renforcement des systèmes de santé pour un accès universel à la santé, même pour les plus marginalisés de nos concitoyens. »
« C’est un moment important pour l’Europe. Il faut garder un rythme soutenu en matière de prévention du VIH, dans un climat d’incertitude sur le plan de l’économie et du financement », dit le professeur Peter Piot, directeur de la London School of Hygiene & Tropical Medicine. « Les bases factuelles recueillies dans le cadre de nos collaborations avec le Groupe Banque mondiale et l’Organisation mondiale de la santé montrent comment des institutions peuvent travailler ensemble afin de générer les informations et les politiques nécessaires pour mener à bien cette entreprise. »
Parmi les conclusions importantes du rapport, il convient de mentionner les suivantes :
- 25 % des diagnostics de VIH en Europe sont à mettre en corrélation avec un usage de drogues par injection, les proportions étant bien plus élevées en Europe de l’Est (33 %) qu’en Europe occidentale (5 %) et centrale (7 %) ;
- le VIH reste relativement peu répandu chez les travailleuses du sexe d’Europe qui ne s’injectent pas de drogues (moins de 1 %), mais il l’est plus chez celles qui s’en injectent (plus de 10 %) ainsi que chez les travailleurs du sexe masculins et transsexuels ;
- le sexe entre hommes est à l’origine de 10 % des diagnostics de VIH en Europe, les pourcentages les plus élevés étant signalés en Europe occidentale (36 %), suivie par l’Europe centrale (22 %) et l’Europe de l’Est (0,5 %). Cependant, l’augmentation est plus forte en Europe centrale et en Europe de l’Est.
Cette analyse met en lumière le rôle essentiel joué par les facteurs environnementaux dans le contexte de l’épidémie de VIH et des réactions préventives face à celle-ci. La criminalisation du travail du sexe, du sexe entre hommes et de l’usage de drogues, combinée à une stigmatisation sociale, à de la violence et à des violations de droits, constituent des obstacles qui entravent l’efficacité de la lutte contre le VIH.
La prévention du VIH requiert des changements sociaux et environnementaux, et ce rapport exhorte les décideurs politiques et les responsables de programmes de lutte contre le VIH à cibler les bonnes politiques et les bons programmes pour maximaliser l’impact sanitaire et social de la lutte contre le VIH en Europe et obtenir un meilleur rendement sur les investissements consacrés à la lutte contre le VIH.
Le Groupe Banque mondiale, l’OMS/Europe et la London School of Hygiene & Tropical Medicine présenteront ces nouvelles conclusions et recommandations le 7 juin à Londres, dans le cadre d’un événement comprenant un débat entre experts et décideurs de haut niveau sur le thème du maintien de la dynamique de prévention du VIH.