Une activité d'appoint
Le mahua est un arbre indigène d'une douzaine de mètres de haut, présent dans toutes les forêts naturelles d'essences caduques en Inde centrale. Depuis des décennies, les villageois en récoltent en mars et en avril l'abondante floraison, puis la vendent à des distilleries qui en tirent un alcool. La plupart d'entre eux, vivant principalement de l'agriculture, trouvent dans cette activité un complément de revenus pendant ces deux mois de soudure.
Avant l'arrivée des filets, les cueilleurs ramassaient les fleurs par terre. Pour dégager le sol et se faciliter ainsi la tâche, ils faisaient brûler feuilles sèches et broussailles en allumant de petits feux sous les arbres et autour, là où les fleurs allaient tomber. Malheureusement, ces feux se propageaient souvent. Outre qu'ils détruisaient la végétation naturelle, ils perturbaient la faune et rejetaient des gaz nocifs dans l'atmosphère. Supposés sans danger, ils étaient en fait nuisibles à long terme pour l'environnement et pour la biodiversité des forêts.
Depuis 2020, pour éviter les incendies et inciter les villageois à protéger la couverture verte et la biodiversité, l'Office des forêts du Madhya Pradesh leur procure gratuitement des filets, dans le cadre du projet d'amélioration des services écosystémiques mené par la Banque mondiale. L'idée d'utiliser des filets est venue de la population locale. On en suspend deux par arbre de façon à y recueillir les fleurs, ce qui évite qu'une fois tombées sur le sol boueux, elles se salissent et que les animaux les piétinent.
Grâce aux filets, les cueilleurs gagnent du temps, puisqu'ils n'ont plus besoin de rester une grande partie de la journée dans la forêt, à ramasser les fleurs à mesure qu'elles tombent des arbres. Pendant ce temps, ils peuvent vaquer à d'autres occupations : les enfants vont à l'école, les femmes accomplissent les tâches ménagères et les hommes s'emploient à d'autres travaux d'appoint. En fin de journée, il n'y a qu'à récupérer les fleurs dans des paniers pour les faire sécher avant de les vendre.
Pour Asha, ancienne sarpanch (cheffe de village) de Budhni, dans le district de Sehore, qui souffre du dos et des jambes à cause d'une sciatique, la cueillette était pénible. Depuis qu'elle utilise les filets, elle n'a plus à rester penchée pour ramasser les fleurs pendant des heures. Elle peut désormais partir pour la forêt seulement en fin d'après-midi et recueillir aisément les fleurs dans les filets.
Ram Kishore Yadav, qui, en plus de son activité de cueilleur, est à la tête du Van Suraksha Samiti (comité de protection de la forêt), trouve les filets avantageux à deux titres. Pendant que les fleurs tombent dans les filets, « je suis libre dans la journée pour pratiquer d’autres activités, explique-t-il, par exemple dans la construction ou l'exploitation forestière. Comme ça, j'ai un double revenu. »