ANTANANARIVO, le 22 septembre 2020 – Âgé de 70 ans, Ralaimoty avance difficilement vers la caisse en s’aidant d’un bout de bois qui lui sert de canne. Ce samedi matin, il est au lycée technique d'Alarobia, près de chez lui, à Soavimasoandro, pour recevoir 100 000 ariary (l'équivalent de 27 dollars) du gouvernement dans le cadre du programme de transferts monétaires non-conditionnels Tosika Fameno.
Depuis quelques mois, le lycée a été transformé en une vaste zone de paiement de ces allocations dont Ralaimoty et ses voisins bénéficient. Signifiant littéralement « soutien complémentaire », le programme Tosika Fameno a été mis en place par le gouvernement malgache pour aider les citoyens vulnérables d'Antananarivo, Toamasina, Moramanga et Fianarantsoa, économiquement affectés par les mesures de confinement mises en place pour arrêter la propagation du virus. Ayant enregistré plus de 15 187 cas et déploré 198 décès, ces quatre grandes villes ont été durement touchées par le virus.
« Je vis seul, mes enfants vivent maintenant leur vie et habitent loin de moi », confie Ralaimoty. « Avant l'épidémie, je vivais déjà de petits boulots que ma santé me permettait encore d’effectuer. Pendant le confinement, je ne pouvais plus sortir. Sans cette aide financière, je serais mort de faim. »
Le programme a identifié et fourni cette aide financière à plus de 244 000 ménages pauvres et vulnérables issus de 769 quartiers de ces quatre grandes villes. Comme Ralaimoty, ils sont les plus exposés au risque d'insécurité alimentaire.
Juste derrière lui, Tsilavina Elia Ratiana attend également son tour pour être reçue à la caisse, avec sa fille de neuf mois accrochée sur le dos. Cette maman de 25 ans est femme de ménage. « Avec le confinement, je ne pouvais plus aller travailler, et ne recevais donc plus de salaire, » explique-t-elle, soulagée de recevoir 100 000 ariary avec lesquels elle va acheter de la nourriture. « Mon mari est un vendeur de rue et avec le confinement, il ne peut plus sortir non plus. Le dernier mois a été très dur pour nous et nos trois enfants car en plus de la nourriture, nous devons aussi payer le loyer. Nos économies se sont rapidement épuisées et nous avons même dû demander de l'aide à nos voisins et à nos familles. Mais ce n'était pas suffisant car tout le monde avait du mal à joindre les deux bouts. Mon mari et moi sautions parfois des repas. »
Pour mener à bien ce programme, le gouvernement malgache a mobilisé ses partenaires techniques et financiers. La Banque mondiale a contribué à hauteur de 12,7 millions de dollars à travers son projet de filets de sécurité sociale II, mis en œuvre par le Fonds d'intervention pour le développement, aux côtés du Programme alimentaire mondial, de l'Union européenne, du Programme des Nations unies pour le développement, de l'UNICEF, de la Croix-Rouge malgache, de CARE et d'Action contre la Faim.
« Pendant la période de restriction où les revenus de ces ménages vulnérables sont affectés, les filets de sécurité sociale sont un moyen d'aider les familles à satisfaire leurs besoins alimentaires de base, à éviter de vendre leurs biens ou de sacrifier leurs moyens de subsistance pour survivre, à protéger leur capital humain, tout en respectant les règles de confinement, » souligne Julia Rachel Ravelosoa, économiste principale en protection sociale de la Banque mondiale pour Madagascar.
Développé par le Cash Working Group, la plateforme réunissant le gouvernement, les partenaires techniques et financiers et les acteurs de protection sociale dont la Banque mondiale est membre depuis sa mise en place à Madagascar en 2016, ce programme de transferts monétaires est étendu à la période de déconfinement et la réouverture des écoles afin de préserver le capital humain déjà fragile. La Banque mondiale est également en train de préparer un financement supplémentaire afin d’élargir le programme de transferts monétaires à davantage de zones géographiques et soutenir plus de personnes vulnérables.
« L'un des principaux objectifs de la Banque mondiale face à la pandémie de COVID-19 est de préserver les vies humaines et les moyens de subsistance, en particulier pour les plus vulnérables. Dans ce contexte, la protection sociale est l'outil le plus approprié, » insiste Marie-Chantal Uwanyiligira, responsable des opérations de la Banque mondiale pour Madagascar. « Cette aide d’urgence a également permis de renforcer l'utilisation de la technologie, en partenariat avec les sociétés de paiement mobile, pour accélérer la mise en œuvre du programme. Cela a permis d’établir les bases d'une plus grande inclusion financière pour les populations bénéficiaires. »
Depuis le début de la pandémie et bien avant l’apparition du coronavirus à Madagascar, la Banque mondiale a fourni un appui technique et financier au pays pour soutenir sa riposte à l'épidémie dans les secteurs de la santé, de la protection sociale et de l'économie.