KIGALI, 1er juillet 2019 – Quand Jean-Pierre Mbonimana a su que l’électricité était arrivée à Bweyeye, son village natal situé dans la province de l’Ouest (district de Rusizi), il a immédiatement quitté Kigali pour revenir y monter son entreprise.
« Le jour où j’ai appris que Bweyeye était raccordé à l’électricité, j’ai tout de suite su que je pourrais y créer un atelier de soudure qui marcherait bien sans craindre la concurrence ni dépenser trop d’argent », explique avec fierté ce père de quatre enfants, qui était parti à la capitale chercher du travail.
Il avait raison car, aujourd’hui, son petit village est un pôle commercial très actif, avec ses magasins et ses bars ouverts jusque tard dans la nuit, alors qu’avant, toute activité cessait à la tombée de la nuit — et l’atelier de Jean-Pierre tourne à plein régime : il gagne en moyenne plus de 150 000 francs rwandais (environ 165 dollars) par mois , bien plus que ce qu’il touchait en ville et, surtout, il est avec sa famille.
Selon la dernière édition des Cahiers économiques du Rwanda de la Banque mondiale intitulée en anglais Lighting Rwanda, le secteur de l’électricité du Rwanda s’est considérablement développé dans les dix dernière années , puisque désormais, plus de la moitié des habitants sont raccordés à domicile, contre 10 % en 2009. Les coupures de courant sont plus courtes et moins fréquentes, grâce à des investissements massifs, note également le rapport.
Mais si le Rwanda est en bonne voie pour améliorer l’accès à l’électricité, le coût du service est l’un des plus chers de la région et constitue toujours une entrave au développement économique et industriel du pays.
« Les efforts poursuivis par le Rwanda pour assurer un approvisionnement électrique bon marché, fiable et durable en fait l’un des pionniers du continent africain », observe Yasser El Gammal, responsable des opérations de la Banque mondiale pour le Rwanda. « Tout l’enjeu des cinq prochaines années consistera à veiller à ce que le programme d’électrification ne plombe pas les capacités financières de l’État. »
Les autorités du Rwanda ont bien compris le rôle clé de l’accès à l’électricité pour accélérer le développement économique mais également améliorer la santé et les niveaux de vie des citoyens. La stratégie nationale de transformation prévoit d’assurer un accès universel à une source d’électricité fiable à l’horizon 2024.
Pour ce faire, comme le rappelle le rapport, le gouvernement a introduit un certain nombre de réformes qui ont transformé la compagnie nationale d’électricité en société commerciale et permis au secteur privé de s’imposer peu à peu comme un partenaire d’investissement stratégique.
« Le Rwanda a réussi à attirer plusieurs investisseurs privés dans le secteur de l’électricité, en particulier pour les volets production et électrification hors réseau », souligne Joern Huenteler, spécialiste de l’énergie à la Banque mondiale. « Le rapport formule un certain nombre de recommandations qui pourraient aider le gouvernement à tirer le maximum des investissements privés en appui à la réalisation des objectifs sectoriels. »
Pour permettre au Rwanda de profiter des fruits de son programme de réformes dans les dix années à venir, de les approfondir et de réaliser sa vision d’un secteur de l’énergie moteur de la croissance économique, le rapport a identifié sept grands axes d’action prioritaires :
poursuivre l’extension du secteur conformément aux principes de la planification à moindre coût ;
donner à Rwanda Energy Group (RGE), la compagnie nationale d’électricité détenue par l’État, les moyens de créer de nouveaux partenariats public-privé en appui aux investissements identifiés dans le plan optimal, plutôt que de compter sur des initiatives non sollicitées du secteur privé ;
accélérer les efforts engagés pour sortir le secteur de l’énergie du tout carbone et privilégier l’adaptation au changement climatique ;
ajuster périodiquement les tarifs et renforcer progressivement le vivier de consommateurs pouvant supporter le coût total du service et se passer de subventions ;
offrir un cadre optimal pour inciter le secteur privé à se lancer dans l’électrification hors réseau et mettre en place des incitations ciblées pour rendre les installations solaires autonomes plus accessibles ;
promouvoir le commerce régional d’électricité par des contrats bilatéraux afin de bénéficier de sources d’approvisionnement meilleur marché et d’intégrer au mieux les ressources renouvelables, par essence variables ;
redoubler d’efforts pour moderniser le fonctionnement opérationnel de RGE.