Le projet de la Banque mondiale a permis d’introduire des pratiques durables sur plus de 880 hectares de terres, bien au-delà de son objectif initial. Plus de 5 000 exploitants s’y sont convertis, notamment en diversifiant leurs cultures et en s’efforçant d’économiser l’eau. Plus de 226 microprojets ont donné un coup de fouet économique à la région, en créant des emplois directs et permanents : les 735 emplois directs ayant ainsi vu le jour améliorent le niveau de revenu des populations. Au cœur des priorités de ces microprojets : la gestion durable du sol et de l’eau, la conservation, l’artisanat, les activités rémunératrices liées aux oasis, comme la confiture et le miel de dattes, et l’écotourisme.
Pour la Banque mondiale, sortir les écosystèmes tunisiens du gouffre est devenu une priorité. « Ce projet met certes l’accent sur la gestion durable de l’eau, mais il cherche aussi à endiguer la dégradation des sols et l’appauvrissement de la biodiversité, qui ont des conséquences délétères », souligne Taoufiq Bennouna, spécialiste senior pour la gestion des ressources naturelles. « Des emplois ont été créés — dont la moitié pour des femmes et des jeunes, qui auparavant étaient souvent contraints d’émigrer — grâce aux nombreuses microentreprises dans le tourisme, la production agricole, avec le miel et la confiture de dattes, ou encore les manifestations culturelles. » L’expert de la Banque mondiale rappelle qu’au moins 30 jeunes adultes qui se préparaient à partir ont changé d’avis pendant la mise en œuvre du projet pour devenir eux-mêmes entrepreneurs.
Les femmes, nouvelles gestionnaires des oasis
Hanadi Rejeb a toujours été passionnée par l’éducation, la botanique et la biologie. C’est donc tout naturellement qu’elle est devenue l’un des piliers de la revitalisation de l’oasis d’El Guettar. « On considère notre culture comme patriarcale, et je suis l’une des rares femmes à participer pleinement au développement économique et social de ma région », confie-t-elle. Pour elle comme pour sa collègue Wafa Ben Ismail, avec la hausse des revenus et la diversification des moyens de subsistance, la vie des femmes des oasis est en train de changer.
En 2014, Wafa Ben Ismail a obtenu son mastère en sciences de l’environnement. Le coordonnateur national pour le développement durable lui a proposé un poste de « bénévole », qu’elle a occupé pendant six mois. « J’ai réussi à m’imposer » raconte, tout sourire, la jeune femme qui finira par être embauchée. Les deux ont pour ambition d’accompagner d’autres femmes pour qu’elles se joignent à elles et contribuent à faire renaître l’oasis.
Les oasis abritent une diversité biologique exceptionnelle et sont une source de revenus capitale pour certaines régions. Mais la baisse des précipitations et le spectre du réchauffement climatique sont autant de signaux d’alerte incitant à accélérer les initiatives de préservation de ces écosystèmes uniques et des communautés qui en vivent. Les microprojets mis en œuvre en Tunisie s’attachent à nettoyer les oasis, introduire le compostage, restaurer et diversifier les espèces et à rajeunir les palmeraies. Les populations locales ont également demandé à être formées pour améliorer l’irrigation, la gestion durable de l’eau et l’accès à l’eau potable. La promotion d’une production de miel et de confiture de dattes a par ailleurs permis de créer des emplois.
Aujourd’hui, face à l’aggravation des effets du changement climatique, de nombreux acteurs veulent sauver les oasis sahariennes (a), du Maroc jusqu’en Libye, où le sable empêche les palmiers de se développer et grignote progressivement les palmeraies. Tous ces pays s’efforcent d’endiguer la désertification, mais leurs interventions ne sont pas suffisamment intenses.
Fin 2018, le projet avait déjà bénéficié à plus de 17 000 personnes, dont un tiers environ sont des femmes.
« Ce projet prouve toute l’efficacité d’une approche intégrée, transversale et participative de la gestion de l’eau et de la dégradation de l’environnement, dont les meilleures pratiques peuvent inspirer le reste de la région. Les pays nous demandent avec insistance d’étendre notre intervention pour permettre la restauration d’oasis dans d’autres pays », souligne Lia Sieghart, chef de service responsable du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord au pôle d’expertise Environnement et ressources naturelles de la Banque mondiale. « Ce projet a favorisé la création d’emplois et des activités de soutien aux habitants et aux oasis. Nous entendons bien continuer d’accompagner ce processus de renforcement de la résilience climatique. »