En Afrique de l’Ouest, le taux d’accès à l’électricité est de 52 % en moyenne, avec des coupures d’électricité pouvant atteindre 80 heures par mois. À 0,25 dollar le kilowattheure, l’électricité demeure cependant très chère dans la région et coûte deux fois plus que le prix moyen dans le monde.
La demande intérieure dans les pays d’Afrique de l’Ouest est souvent trop faible pour attirer des investissements dans de grands projets, capables de réaliser des économies d’échelle. De ce fait, ces pays dépendent généralement de petites centrales au fioul très coûteuses. Et, en l’absence de planification, ils sont contraints de louer des centrales électriques, ce qui augmente encore les coûts.
Il est donc essentiel que les pays voisins collaborent entre eux pour améliorer l’accès à une électricité fiable en Afrique de l’Ouest. C’est l’objectif du système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA). Il rassemble 14 pays – Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Gambie, Ghana, Guinée, Guinée-Bissau, Libéria, Mali, Niger, Nigeria, Sénégal, Sierra Leone et Togo – et 27 entreprises nationales d’électricité qui œuvrent de concert à la création d’un marché régional unifié de l’électricité.
Interconnecter pour échanger
Aujourd’hui, l’EEEOA assure l’interconnexion physique nécessaire aux échanges d’électricité entre les pays. Les échanges entre les dix pays déjà interconnectés représentent près de 7 % des échanges d’électricité dans la région. La ligne de transport la plus importante devrait être opérationnelle, d’ici 2020 ce qui permettra à l’électricité de traverser l’Afrique de l’Ouest, depuis les pays disposant de ressources énergétiques bon marché, propres et abondantes vers les pays qui en sont dépourvus.
La Banque mondiale estime que l’établissement d’un marché régional unifié de l’énergie permettrait d’économiser entre cinq à huit milliards de dollars par an grâce aux moindres coûts d’exploitation qui, à leur tour, réduiront les coûts de production.
En tirant un meilleur parti des ressources énergétiques bon marché dont dispose la région, les échanges d’énergie amélioreront la fiabilité globale de l’approvisionnement et rendront l’électricité plus abordable pour tous les pays. Autre avantage : cela favorisera une production électrique plus écologique puisque les anciennes centrales à fioul seront remplacées par des sources d’énergie plus propres comme le gaz naturel, l’énergie solaire et l’hydroélectricité. Le système électrique de la région sera en outre plus fiable et pourra plus facilement faire face à des pénuries accidentelles. Enfin, le marché unifié créé par ces 14 pays attirera plus facilement les investissements du secteur privé dans la production d’énergie.
« Il s’agit d’une occasion historique pour l’Afrique de l’Ouest. Mettre sur pied un système d’échanges solide permettra de réduire considérablement le coût moyen de la production énergétique dans la région et d’améliorer l’accès à une électricité plus propre et plus fiable », souligne Makhtar Diop, vice-président de la Banque mondiale pour l’Afrique. « La Banque mondiale partage entièrement la vision ouest-africaine d’un secteur de l’énergie moderne, capable de satisfaire les besoins de populations et d’appuyer le développement économique. Et nous sommes déterminés à accompagner nos clients dans la mise en place de ce marché régional. »
Depuis 2005 la Banque mondiale soutient l’action de l’EEEOA, aux côtés de plusieurs partenaires du développement, pour améliorer l’interconnexion physique et l’intégration des réseaux électriques nationaux. La Banque mondiale appuie depuis longtemps le secteur de l’énergie en Afrique de l’Ouest. À ce jour, elle a alloué 750 millions de dollars, par l’intermédiaire de l’Association internationale de développement (IDA), aux travaux de construction des infrastructures d’interconnexions primaires. 4 000 kilomètres de lignes de transport sont actuellement en cours de construction et leur mise en service est prévue pour le début des années 2020.
Des défis techniques et commerciaux
La complexité du marché de l’EEEOA soulève de nouvelles difficultés politiques et techniques. En effet, pour qu’un marché régional de l’énergie fonctionne, il faut non seulement des infrastructures adéquates, mais aussi une réelle collaboration entre dirigeants politiques, autorités de régulation et entreprises publiques d’électricité, et ce au niveau national et régional. Cela exige aussi que les différents pays évoluent au même rythme dans les domaines politique, réglementaire et institutionnel. À cet égard, il est encore nécessaire de travailler à la mise sur pied d’organismes et d’accords commerciaux solides.
Par exemple, les paiements entre partenaires commerciaux de la région sont irréguliers. En 2016, les arriérés ont atteint un tel niveau que l’EEEOA a constitué un groupe de travail sur la sécurisation des paiements des échanges d’énergie transfrontaliers. Afin de garantir la pleine réalisation de l’unification régionale du marché de l’énergie, ce groupe de travail a recommandé de mettre en œuvre différentes mesures susceptibles de renforcer la confiance dans le marché régional de l’électricité, en particulier l’amélioration de la solvabilité du secteur, la sécurisation des contrats, la fourniture de garanties et l’implication des institutions régionales.
Dans ce contexte, la Banque mondiale entend financer en priorité des projets destinés à renforcer la performance des entreprises publiques d’électricité, gage de meilleurs services et du développement des échanges d’énergie électrique en Afrique de l’Ouest.