Brigitte Acakpo-Addra travaille depuis plusieurs années dans la protection de l’environnement au Togo. Son pays a accompli des progrès encourageants sur le plan de la réduction des émissions liées à la déforestation et à la dégradation des forêts (ou « REDD+ » dans le jardon onusien de la lutte contre le changement climatique). Mais, regrette-t-elle, les femmes n’ont pas été suffisamment associées aux activités menées dans ce domaine ni aux processus de décision. Dérèglements du climat, régimes fonciers, effets néfastes de la déforestation : on ne leur a pas donné les moyens de mieux maîtriser et gérer ces enjeux.
Parce que les Togolaises jouent un rôle considérable dans l’exploitation des forêts et qu’elles y puisent des ressources essentielles à leurs moyens de subsistance (nourriture, combustibles, plantes médicinales, etc.), Brigitte Acakpo-Addra est convaincue qu’il faut faire bouger les choses. Elle crée en 2016 le Consortium Femmes REDD+ Togo (CF-REDD+), une plateforme de coordination nationale qui rassemble les membres des organisations féminines engagées dans la gestion des ressources forestières. Le consortium compte 62 membres, âgées de 30 à 60 ans et originaires des cinq régions administratives du pays.
Très vite, cependant, la jeune femme comprend qu’il sera difficile de réunir régulièrement les membres du groupe en raison de leur éparpillement géographique. Elle a alors l’idée de passer par WhatsApp. Le CF-REDD+ va utiliser l’application mobile pour organiser des réunions hebdomadaires d’information et de formation sur la préservation des forêts au Togo. La participation est au rendez-vous : aujourd’hui, 64 % en moyenne des membres du consortium prennent part à ces réunions à distance, pilotées par Brigitte Acakpo-Addra ou ses collaboratrices via la messagerie WhatsApp.
Grâce à ces rencontres virtuelles, les participantes ont pu élargir leurs connaissances sur le changement climatique et la réduction des émissions dues à la déforestation dans leur pays. Un travail de communication qui a pour effet d’accroître la participation des femmes en leur permettant d’intégrer des activités axées sur la préservation des forêts dans leurs associations respectives.
« En participant au groupe WhatsApp, je comprends mieux le changement climatique et la pertinence du processus REDD+ au Togo. Et je peux partager mes connaissances dans le cadre d’autres rencontres et au sein de mon association », témoigne Kokoe Mawulolo Logosu-Teko.
Les réunions virtuelles ont également permis de coordonner les initiatives du consortium. Au mois de mai dernier, une « tournée de sensibilisation nationale » dans 60 localités a assuré la promotion de pratiques respectueuses des forêts auprès de quelque 7 000 femmes et 300 hommes. Cette campagne avait notamment pour objectif de promouvoir l’utilisation de foyers améliorés afin de réduire celle de charbon de bois.
« Ces initiatives montrent aux femmes qu’elles peuvent être des actrices du changement et qu’elles ont la capacité de contribuer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’accroître la représentation féminine dans les activités du processus REDD+ », explique Brigitte Acakpo-Addra.
La présidente du consortium a récemment été choisie pour représenter les femmes au sein du Comité national REDD+, plus haut organe décisionnel du pays en la matière. Ses projets pour la suite ? Continuer à promouvoir une exploitation plus respectueuse et durable des forêts auprès d’un plus grand nombre d’habitants, créer des comités de suivi dans les villages, mais aussi aider des pays comme le Burkina Faso et Madagascar à fédérer les femmes autour de cet enjeu.
Lutte contre la déforestation et égalité des sexes à la Banque mondiale
L’action menée par le CF-REDD+ pour lutter contre la déforestation au Togo et valoriser le rôle socioéconomique des femmes mérite d’être saluée. C’est aussi un exemple dont pourraient s’inspirer d’autres pays soucieux d’associer davantage les femmes à la préservation des forêts.
En ce qui concerne la Banque mondiale, le Fonds de partenariat pour la réduction des émissions dues à la déforestation (a) continue d’aligner ses activités sur la stratégie institutionnelle en matière de genre et d’égalité des sexes (a). Concrètement, il s’agit de veiller à ce que les femmes soient traitées en partenaires et pleinement associées à la conception et à la mise en œuvre des projets de préservation des forêts. En s’appuyant sur cette stratégie et sur le plan d’action qui l’accompagne, le FCPF collabore avec les pays pour identifier les nouvelles initiatives qui pourront servir d’amorce à l’intégration systématique de la question des femmes dans les programmes de réduction des émissions dues à la déforestation.
À cet égard, l’exemple du Togo s’avèrera particulièrement utile. Il s’agit d’une illustration concrète de ce que représente le processus REDD+ : à savoir non seulement un engagement à réduire l’empreinte carbone liée à la déforestation, mais aussi un vecteur pour ancrer l’inclusion sociale et l’égalité des sexes dans le développement durable.