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Comment passer d’une agriculture de subsistance à l’agro-industrie dans la région instable de l'Extrême Nord du Cameroun ?

19 mai 2017


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Photo: Odilia Hebga/Banque mondiale

LES POINTS MARQUANTS
  • Au Cameroun, 60% de la population active travaille dans le secteur agricole. Et dans la région de l’Extrême Nord, où sévit Boko Haram, menaçant la sécurité et les conditions vie des habitants, la culture du Sorgho est très répandue et les agriculteurs pratiquent essentiellement une agriculture de subsistance.
  • La création de coopératives, leur permet de booster leur production et de la revendre à des entreprises agro-industrielles.
  • Avec l’appui d’un projet de la Banque mondiale, la coopérative CROPSEC est ainsi parvenue à vendre 2 000 tonnes de Sorgho entre mars 2016 et janvier 2017, soit un gain de 392 millions de francs CFA (environ 660 000 dollars).

YAOUNDÉ, le 19 mai 2017-Dans un champ situé à la périphérie de Maroua, dans la région de l’Extrême Nord du Cameroun, Marie Bahane, regarde avec satisfaction les 22 sacs de sorghos qui sont en train d’être emmenés au siège de sa coopérative afin d’être nettoyés et conditionnés pour être vendus. L’année dernière à la même période, elle avait uniquement réussi à produire 8 sacs de sorgho.

Cette agricultrice de 45 ans est originaire d’une région en proie à l’insécurité et aux aléas climatiques.  Une région où les agriculteurs, par manque de ressources, d’accompagnement ou de techniques modernes dans leurs filières, se contentent très souvent d’exercer une agriculture de subsistance. C’est pour remédier à cette situation que le projet PIDMA (Projet d’investissement et de développement de marchés agricoles) tente d’apporter un début de solution et un nouveau souffle à ces agriculteurs, en favorisant la création de partenariats entre les producteurs agricoles et l’agro-industrie. Objectif ? Accroître la production des cultures de maïs, sorgho et manioc tout en améliorant la qualité et la productivité agricoles des membres de quelque 300 organisations de producteurs.

« Je suis membre de la coopérative CROPSEC et grâce au projet, j’ai pu recevoir des intrants et apprendre de nouvelles techniques pour améliorer la productivité de mes champs. Depuis j’ai pu non seulement augmenter la superficie sur laquelle je cultivais le sorgho, mais j’ai constaté une nette augmentation de ma production lors de la dernière campagne. Aujour'dhui, je cultive plus de 22 tonnes de sorgho. » nous dit Marie ravie. « J’ai pu augmenter mes revenus, cela m’a permis d’envoyer tous mes enfants à l’école cette année et surtout de pouvoir les faire soigner lorsqu’ils sont malades. »

La coopérative CROPSEC (Conseil régional des organisations paysannes de la partie septentrionale du Cameroun) est une coopérative pilote entrée en partenariat avec le PIDMA en 2014. Elle est dirigée par Mariam Haman Adama et compte 1023 membres, dont 59% de femmes. Dans le cadre de ce partenariat, la coopérative a élaboré un plan d’affaires pour produire, collecter, nettoyer et commercialiser du sorgho à des entreprises agroindustrielles. Elle a noué un partenariat avec la société agroindustrielle Guinness, qui lui achète du sorgho pour fabriquer l’une de ses boissons. De leur côté, les agriculteurs, membres de la coopérative, reçoivent des intrants et produisent du sorgho qu’ils vendent ensuite à la coopérative. Cette dernière, collecte, assure le nettoyage et le reconditionnement le sorgho et se charge de le revendre.

« Grâce aux partenariats établis entre les organisations de producteurs, les acheteurs agro-industriels et les institutions financières, le projet PIDMA a permis d’améliorer l’activité de la filière du sorgho, dans les régions du Nord et de l’Extrême Nord, de manière à répondre aux besoins de l'agro-industrie, puis à satisfaire une part importante de la demande du marché agricole national, tout en améliorant les moyens de subsistance des agriculteurs locaux », déclare Myriam Chaudron, chargée du projet pour la Banque mondiale.

Avec l'appui du projet, la coopérative a pu négocier un meilleur prix de vente, passant ainsi de 15 000 à 19 600 francs CFA le sac de 100 kg (soit d’environ 25 à 33 dollars). Entre mars 2016 et janvier 2017, 2 000 tonnes de sorgho ont ainsi été nettoyées et livrées à Guinness pour une valeur de 392 millions de francs CFA (environ 659 378 dollars), et la coopérative commence à jouir d’une certaine notoriété dans le secteur, tant au niveau régional, que national et international. Dans un futur proche, elle cherche à élargir le nombre de ses membres et à trouver de nouveaux débouchés et de nouveaux clients. « Nous espérons pouvoir, d’ici trois ans, diversifier nos activités et proposer des produits de sorgho transformés, tels que la bouillie, le cake ou le pain de sorgho, ou encre le lait. » confie Mariam Haman Adama. « Avec l’appui du PIDMA et le soutien des banques, nous allons y arriver ».


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