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Malgré la guerre, la diaspora syrienne prépare le terrain au réinvestissement

07 avril 2017


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Rawpixel.com | Shutterstock.com

Ils sont originaires des quatre coins de la Syrie, dirigent des entreprises diverses et sont disséminés à travers le monde. Ils représentent toutes les sensibilités politiques de leur pays et sont de tous âges. Qu’en ont-ils en commun ? Ce sont essentiellement des dirigeants ou créateurs d’entreprise issus de la diaspora syrienne.

Depuis 2011, date à laquelle le conflit syrien a éclaté, ils s’emploient à créer des opportunités en faveur de leurs compatriotes réfugiés, en réinvestissant dans les pays qui les accueillent et dans les entreprises qu’ils possèdent dans ces territoires. C’est-à-dire en Jordanie, en Turquie, au Liban et en Égypte, mais aussi dans les pays du Golfe et en Europe.

Près de six ans après le début du conflit, ces membres de la diaspora syrienne se sont réunis (a) pour la première fois, en Allemagne, fin février 2017. Une rencontre placée sous le signe de l’enthousiasme et de la motivation, et rythmée par les applaudissements et les friandises orientales confectionnées par des réfugiées syriennes dans un magasin syrien de Jordanie. Comme l’a lancé l’un des participants à l’auditoire, ils se sont rendus à ce forum parce qu’ils étaient « en quête d’espoir ». « C’est un moment important pour nous. Pour la première fois, nous sommes en mesure d’agir », a salué un autre participant.

C’est ainsi qu’a été créée la Syrian International Business Association ou SIBA.

Ce jour-là, tous ont décidé d’unir leurs forces pour améliorer à court terme les perspectives économiques des réfugiés syriens. À court terme, ils entendent jouer un rôle dans la reconstruction de la Syrie, une fois la guerre terminée.

« Nous pensons cette organisation de manière à la pérenniser, nous en sommes très fiers », a déclaré le rapporteur d’un groupe de travail qui a réfléchi à l’organigramme de la SIBA. « Oui, nous voulons porter une voix forte afin de travailler ensemble pour la Syrie », a ajouté un autre collaborateur.

Force est de constater que les diasporas prennent souvent les devants lorsqu’il s’agit de relancer une économie ou de prendre part à la reconstruction d’un pays en pleine crise ou au sortir d’un conflit. Comme en témoignent les exemples du Népal, de la Palestine, d’Haïti et du Rwanda.

Une fois la paix rétablie, leur aide prend diverses formes : envois de fonds, transferts de compétences, investissement direct étranger, entrepreneuriat, tourisme patrimonial, commerce d’objets jouant sur la fibre nostalgique (artisanat), philanthropie, bénévolat et défense des intérêts des populations concernées. « Pour [les membres de la] diaspora, la motivation va de soi, et ils savent ce qui fait défaut », explique Gervais Appave, conseiller spécial auprès du directeur général de l’Organisation internationale pour les migrations. 


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L’association va promouvoir et représenter les milieux d’affaires syriens dans le monde. 


La création de la SIBA n’est qu’un premier jalon. L’association va promouvoir et représenter les milieux d’affaires syriens dans le monde. Outre l’élargissement de son réseau et des activités de suivi, elle se donne cinq priorités :

  • éliminer les obstacles réglementaires (climat de l’investissement, mobilité, commerce et législation du travail) ;
  • promouvoir l’autonomisation des jeunes, l’égalité hommes-femmes et l’éducation (inclusion sociale, éducation primaire et secondaire, formation professionnelle, programmes de promotion de la femme) ;
  • accroître les possibilités d’investissement et rapprocher les investisseurs et les entreprises (identifier les secteurs et les marchés) ;
  • résoudre les difficultés liées au secteur financier (accès au financement, opérations de change et transactions monétaires) ;
  • systématiser les liens étroits entre milieux d’affaires et philanthropes.

Ces priorités font écho aux conclusions tirées de consultations menées par le Groupe de la Banque mondiale dans treize villes de dix pays pour identifier les facteurs qui incitent la diaspora à s’impliquer dans le développement et ceux qui freinent cet engagement. « Les pays d’accueil comme les réfugiés ont tout à gagner de cette coopération étroite », résume John Speakman, qui a mené les consultations pour la Banque.

Le Groupe de la Banque mondiale et le Centre de Marseille pour l’intégration en Méditerranée s’attacheront à faciliter le dialogue de la SIBA avec les responsables publics en matière de réglementation du travail, de climat des affaires, d’échanges commerciaux et d’investissement, en particulier dans le cadre des zones économiques spéciales mises en place dans les pays accueillant de larges contingents de réfugiés syriens. Cette démarche s’inscrira dans le Programme de la Banque mondiale pour la promotion de l’emploi en faveur de la population jordanienne et des réfugiés syriens.

« La Jordanie a déjà réussi à attirer 240 millions de dollars d’investissement syriens », souligne Mukhallad Omari, secrétaire général de la Commission d’investissement de Jordanie. « C’est la raison d’être de cette commission : servir de guichet unique à tout investisseur. »

L’exemple jordanien pourrait servir de modèle aux autres pays de la région qui accueillent des réfugiés syriens.

« Nous sommes disposés à tout mettre en œuvre pour soutenir l’investissement syrien, l’économie jordanienne et nos compatriotes », a conclu Yarub Al Qudah, ministre jordanien de l’Industrie, du Commerce et des Approvisionnements.


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