WASHINGTON, le 10 janvier 2017 – Chaque matin, sur les berges du lac Tanganyika, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), une femme d’une quarantaine d’années fait sécher des poissons qu’elle ira ensuite vendre à Kalemie, à quelques kilomètres de là. Elle s’installe stratégiquement à l’intersection de deux axes routiers : les passants et les gens qui vont travailler s’arrêtent souvent devant son petit étal pour acheter à manger. À la fin de la semaine, avec un peu de chance, elle aura de quoi nourrir ses huit enfants et acheter d’autres poissons à faire sécher.
À l’autre bout du pays, dans la capitale, Kinshasa, Kany Véronique Mafuta dirige une petite entreprise qui produit de la farine de manioc. La demande locale est forte, mais cette femme entrepreneur n’a pas les moyens d’acquérir de nouveaux équipements pour développer son activité : les banques ne lui ont proposé que des prêts à des taux d’intérêt prohibitifs.
Une réalité plurielle
Il faut distinguer en RDC deux catégories de femmes entrepreneurs. Il y a d’une part des femmes qui se lancent dans une petite activité par nécessité, pour joindre les deux bouts : elles vendent dans la rue des plats qu’elles ont cuisinés, revendent des produits manufacturés ou de grande consommation dans les zones rurales, ou font du petite commerce transfrontalier. D’autre part, on trouve aussi des femmes qui créent une entreprise et tentent de la développer sur un segment de marché prometteur. Les études montrent que, dans les villes, ces petites et moyennes entreprises (PME) dirigées par des femmes sont principalement concentrées dans trois secteurs : le commerce, les services et l’agriculture.
« L’entrepreneuriat féminin joue un rôle fondamental dans l’économie de la RDC. Nous voulions mieux comprendre les problèmes que ces femmes rencontrent, pour faire en sorte que nos projets à venir les aident effectivement à créer des entreprises viables et productives », explique Moustapha Ndiaye, directeur des opérations de la Banque mondiale pour la RDC. « Nous nous attachons à améliorer l’environnement économique pour les femmes — et pour les hommes — aussi bien dans les zones urbaines que dans les zones rurales. »
La productrice de farine de Kinshasa et la vendeuse de poisson séché de Kalemie ont toutes les deux l’esprit d’entreprise, mais leurs aspirations, leurs difficultés et leurs besoins sont très différents. Il faut donc un accompagnement personnalisé.
Celles qui se lancent dans l’entreprise par nécessité reflètent la réalité économique d’un pays fragile.
« Dans un pays où le taux de chômage est très élevé, la plupart des femmes n’ont pas d’autre choix que de créer une micro-entreprise pour subvenir aux besoins de leur famille », indique Milaine Rossanaly, spécialiste du secteur privé à la Banque mondiale. « En RDC, c’est bien davantage la recherche de moyens de subsistance que la recherche du profit qui motive les micro et petits entrepreneurs. »
Milaine Rossanaly estime qu’il faut soutenir ces femmes entrepreneurs en recourant à une approche globale qui associe la fourniture directe d’équipements, un accès à l’éducation, des soins de santé et une aide sociale.