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Des jeunes Sénégalais témoignent : il est possible de réussir dans l’agriculture

01 novembre 2016


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Oumar Ba (gauche), Fatoumata Bineta Diop (centre) et Ibrahima Ndiaye (droite) ont participé à une discussion animée avec des experts en agriculture de la Banque mondiale à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté.

© Daniella van Leggelo-Padilla/Banque mondiale

LES POINTS MARQUANTS
  • L’agriculture est un secteur économique clé pour le Sénégal, contribuant de 12 à 15% du PIB.
  • Beaucoup de jeunes Sénégalais pensent que les profits tirés de l’agriculture ne sont pas à la hauteur du labeur et du temps investis.
  • Des entretiens avec trois jeunes agriculteurs soulignent la nécessité de changer de regard sur l’agriculture et de mettre en avant les opportunités de réussite.

DAKAR, le 1 novembre 2016 – L’agriculture a toujours été une activité économique centrale au Sénégal, où elle emploie 49,5 % de la population. Le secteur représente entre 12 et 15 % du PIB, et le secteur présente un potentiel de croissance substantiel. Ces dernières années, le gouvernement a réalisé des efforts considérables en faveur du secteur, en consacrant par exemple 112 milliards de francs CFA aux intrants et équipements agricoles. Il a aussi lancé une campagne visant à l’autosuffisance en riz d’ici 2017 et a massivement investi dans des pratiques agricoles adaptées aux enjeux du changement climatique.

Et pourtant, la perception des agriculteurs sénégalais est celle de petits cultivateurs aux conditions de vie très modestes, voire pauvres, qui travaillent sans machine, sous un soleil de plomb et pour une très faible rémunération.

À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, l’antenne de la Banque mondiale au Sénégal a interviewé trois jeunes qui ont décidé de travailler dans le secteur agricole. Ils expliquent pourquoi ils ont choisi cette voie et pourquoi il est important de changer de regard sur l’agriculture.

Ibrahima Ndiaye, 27 ans, producteur de noix de cajou à Kaolack

« Mon père est agriculteur. J’ai commencé à travailler à la ferme quand j’étais enfant, je m’occupais surtout des poulets. Après avoir terminé mes études à l’Institut de formation en administration et en création d’entreprises (IFACE) à Dakar, j’ai décidé de revenir à ma passion, l’agriculture.

Beaucoup de jeunes pensent que la réussite passe par des études de gestion ou de commerce et des emplois de bureau. En voyant ceux qui sont partis pour aller à Dakar, Saint-Louis ou Thiès revenir au village au volant d’une belle voiture et avec des vêtements à la mode, les jeunes du coin pensent qu’on ne peut réussir qu’en tournant le dos à la terre.

Quand j’ai décidé de me lancer dans la culture de la noix de cajou, j’ai demandé à mon père et à mon grand-père de me donner un lopin de terre. L’accès à la terre est un obstacle très dur à surmonter pour les jeunes, j’ai eu de la chance que ma famille possède des terres. Mais il y a toujours les difficultés d’accès à l’eau, aux intrants et au matériel mécanique.

Selon moi, l’exode rural s’explique surtout par le fait que l’on manque de machines agricoles. Au Sénégal, c’est le travail manuel qui domine encore. Les vieilles générations s’y plient parce qu’elles n’ont connu que ça, mais pour les jeunes, c’est différent : ils ne sont plus disposés à travailler si dur pour des profits qui sont loin d’être à la hauteur du labeur et du temps investis. C’est pourquoi je pense que la mécanisation agricole pourrait vraiment changer la donne. »

Oumar Ba, 31 ans, éleveur à Namarel

« Selon moi, si les jeunes Sénégalais ne sont pas tentés par l’agriculture, c’est pour deux raisons principales : l’absence de formation professionnelle et l’image négative qui colle à ce secteur.

La plupart des jeunes qui cultivent la terre ou font de l’élevage ont appris auprès de leurs ainés et de leur famille, mais ils n’ont pas eu accès à des formations sur les techniques agricoles modernes. Cela limite leurs capacités et leurs rendements, et cela restreint aussi la vision qu’ils ont de l’agriculture et de l’élevage, qu’ils n’envisagent pas au-delà de la ferme familiale. Alors que si on les formait, les jeunes éleveurs pourraient réussir à obtenir deux naissances par tête de bétail chaque année, ce qui leur permettrait de gagner suffisamment leur vie.

J’ai un ami qui est revenu d’Italie et qui a monté un élevage avicole. Aujourd’hui, il gagne bien sa vie, a une voiture et emploie d’autres jeunes. C’est l’exemple parfait du jeune qui a réussi dans l’agriculture, mais malheureusement ces exemples ne sont pas suffisamment promus dans notre culture. Aux yeux des jeunes Sénégalais, l’agriculture est encore un secteur traditionnel qui ne fournit pas des débouchés lucratifs. »

Fatoumata Binta Diop, 29 ans, coordinatrice au Directoire national des femmes en élevage (DINFEL)

« Je ne suis pas moi-même agricultrice mais je viens d’une région, Kolda, dans le sud du Sénégal, où l’agriculture occupe une place très importante et emploie beaucoup de femmes. Je suis coordinatrice au Directoire national des femmes en élevage (DINFEL), une association composée d’agricultrices qui souhaitent passer le relais à la jeune génération. Je suis chargée d’assurer la promotion de la filière agricole auprès des jeunes, hommes et femmes, par le biais d’événements et de programmes de formation. C’est important que les générations plus âgées transmettent leur savoir aux jeunes, et que ces derniers apportent leurs propres connaissances et techniques pour préserver la vitalité du secteur agricole et assurer sa profitabilité. Il est vraiment essentiel de mettre en avant les parcours de réussite pour attirer les jeunes vers l’agriculture, de leur montrer qu’il est possible de vivre confortablement en étant agriculteur. »


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© Daniella van Leggelo-Padilla/Banque mondiale

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