La jeunesse : une population vulnérable
La jeunesse est de loin la catégorie de population la plus exposée à cette épidémie de violence. En Amérique latine, chez les hommes âgés de 15 à 24 ans, le taux d’homicides atteint les 92 pour 100 000 habitants, soit environ quatre fois plus que la moyenne régionale. Selon un rapport que publiera le bureau de l’économiste en chef de la Banque mondiale pour la Région Amérique latine et Caraïbes cet automne, les jeunes gens âgés de 25 à 29 ans, des hommes en majorité, sont par ailleurs les principaux responsables de la criminalité et de la violence.
L’étude à paraître, intitulée Stop the Violence in Latin America: A Look at Prevention from Cradle to Adulthood, consiste en une approche factuelle des politiques de prévention qui sont parvenues à réduire les comportements antisociaux chez les plus jeunes et les ressorts de la criminalité chez les jeunes et les adultes. L’étude met également en lumière la complexité du problème de la violence dans la région.
« Si les statistiques mondiales et régionales sont déprimantes, la réussite de Medellín, Cali et Diadema est porteuse d’un message clair : la violence chez les jeunes peut être évitée, si les politiques sont adaptées et si la réduction de criminalité fait l’objet d’un engagement à long terme », indique Markus Kostner, responsable du développement social pour la Région Amérique latine et Caraïbes de la Banque mondiale. « Nous disposons de précédents éprouvés, attestant que des stratégies de prévention bien pensées produisent des résultats tangibles et durables. »
Traiter la violence comme un problème de santé publique
Les interventions les plus efficaces traitent la violence comme une crise de santé publique. Ces politiques éprouvées, qui s’inspirent des principes épidémiologiques, considèrent la violence comme un phénomène sous-tendu par une combinaison de facteurs de risque, découlant de réalités individuelles et sociétales, comme l’exposition à la violence domestique pendant l’enfance, le haut niveau d’inégalité, l’inefficacité des systèmes éducatifs et l’absence de perspectives d’emploi, pour ne citer que ces exemples.
La violence est latente lorsque plusieurs de ces facteurs interagissent, en formant des combinaisons qui peuvent varier selon les pays, voire selon les villes.
« Voilà pourquoi les stratégies de prévention de la violence efficaces consistent presque toujours en des stratégies multisectorielles et propres à chaque situation », explique Chloë Fèvre, spécialiste senior du développement social à la Banque mondiale. « Elles doivent également prendre en compte les spécificités hommes-femmes et cibler avant tout les jeunes : plus les facteurs de risque sont neutralisés tôt, plus les chances de réussite sont élevées. »
Faire de la prévention de la violence une priorité du développement
Lutter contre la violence est un impératif de développement. Une violence endémique se traduit par une moindre productivité, une dégradation de la santé et un renchérissement du coût de la sécurité. Le coût cumulé de la violence est stupéfiant : jusqu’à 10 % du PIB dans certains pays, avec des conséquences néfastes à long terme sur le développement humain, social, économique et durable.
Le Groupe de la Banque mondiale encourage ses partenaires dans le monde à multiplier le nombre de travaux et de données portant sur la violence et à incorporer des stratégies de prévention dans le cadre des projets de développement. Citons par exemple :
- Des travaux d’analyse sur l’importance de la prévention, qui fournissent une base de données factuelles solide pour l’élaboration des politiques. La Banque mondiale s’est inspirée de l’initiative Becoming a Man (a) de l’université de Chicago, qui cible de jeunes lycéens, pour en tester et en évaluer les principes au Mexique.
- Des programmes de développement urbain et de proximité, prévoyant des composantes dédiées à la prévention de la violence, à l’instar du Projet intégré de développement des communautés en Jamaïque (a) et du Projet d’amélioration de la gouvernance municipale et de la qualité de vie à Teresina (a), entrepris au Brésil, qui comprend l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan de prévention de la violence.
- Le Projet pour des municipalités plus sûres au Honduras (a), première opération de la Banque mondiale portant exclusivement sur la prévention de la violence. Une de ses composantes, axée sur l’emploi des jeunes, fait actuellement l’objet d’une évaluation rigoureuse qui s’intéressera à la manière dont la formation professionnelle, les emplois temporaires et les thérapies comportementales et cognitives influent sur le quotidien des jeunes Honduriens.
- La volonté de faciliter l’échange des connaissances entre les villes et les pays et de conjuguer les efforts de la Banque avec ceux d’autres partenaires, comme la fondation MacArthur, l’initiative 100 Resilient Cities de la fondation Rockefeller, l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID) et le Laboratoire d’action contre la pauvreté du MIT.