États fragiles et accès aux données
La Sierra Leone revient de loin : entre 1991 et 2002, elle a connu une guerre civile dévastatrice qui a fait plus de 70 000 morts et environ 2,6 millions de personnes déplacées. Plus récemment, le pays a subi de plein fouet l’épidémie d’Ebola qui a sévi en Afrique de l’Ouest en 2014-2015, et qui, outre le terrible fléau sanitaire qu’elle a représenté, a eu un immense impact sur le bien-être social et économique des Sierra-Léonais.
Encore aujourd'hui, moins de 2,5 % des citoyens disposent d'un accès à Internet, et plus de 40 % sont analphabètes. Alors que la Sierra Leone connaît toujours une situation extrêmement difficile, des solutions à faible technicité, comme les applications et méthodologies reposant sur des SMS, constituent la seule manière de toucher une part importante de la population.
Quel que soit le format, le public exige un accès libre aux données pour garantir une plus grande transparence de l’action gouvernementale. Mais les données sont également nécessaires aux pouvoirs publics et aux partenaires de développement pour améliorer l’efficacité de l’utilisation des ressources et de la prestation des services publics.
Les données sont aujourd’hui incontournables. Mais encore faut-il savoir y accéder, les comprendre et les exploiter. C’est à cette difficulté que sont notamment confrontés les membres de la société civile, tandis que les pouvoirs publics doivent quant à eux parvenir à rassembler les compétences nécessaires pour créer un environnement propice au développement de solutions TIC « maison » pour répondre aux problèmes de développement locaux.
Renforcer la capacité à analyser des données et tirer parti des compétences locales
Le bootcamp organisé en Sierra Leone a permis de former une cinquantaine de participants pour qu’ils contribuent à la résolution de ces deux difficultés, avec l’aide de codeurs, de programmeurs et de professionnels du développement provenant notamment de Sierra Leone, du Kenya et du Nigéria. Cette formation s’est déroulée au Sensi Tech Hub (a) de Freetown, un centre qui vise à bâtir une communauté locale d’innovateurs dans le domaine des TIC, avec l’assistance d’iDT Labs (a). Elle a notamment consisté à familiariser les participants avec un certain nombre d’outils d’analyse de données disponibles gratuitement (a).
Voici les cinq équipes gagnantes et leurs projets :
- Know Your City Campaign (a) : ce projet vise à cartographier les zones de Freetown exposées aux risques d’inondations et à d’autres catastrophes naturelles.
- Mbate Konli (a) : ce service vocal aide les habitants à trouver le centre de santé, le traitement à domicile ou le service d’ambulance le plus proche pendant une épidémie de choléra.
- Memba O! : cette appli de surveillance parlementaire fournit aux citoyens des informations sur le comportement de leurs élus (assiduité, votes, etc.).
- mWash : cette appli cartographie tous les points d’eau publics, et communique des informations liées à l’hygiène et à l’assainissement.
- The Free Health Care App (FHCApp) (a) : cette appli a pour objectif de restaurer la confiance des citoyens dans le système de santé publique gratuit en les aidant à débusquer les faux docteurs et à connaître la disponibilité des médicaments, ainsi qu’en leur fournissant une évaluation de la qualité des différents centres de santé.
Dans le monde entier, les solutions qui exploitent les TIC ont démontré leur capacité à résoudre des programmes de développement jusqu’alors insolubles. En Éthiopie, par exemple, offrir un accès fiable et peu coûteux par SMS aux prix du marché national et des marchés régionaux a contribué à résoudre les problèmes d’asymétrie d’information dont souffraient les agriculteurs.
La manifestation organisée à Freetown a clairement montré qu’il existe une forte demande en matière d’utilisation des données en Sierra Leone, mais aussi un immense potentiel. Les Sierra-Léonais ne manquent pas d’idées pour résoudre les problèmes de développement qui les touchent à l’aide de solutions reposant sur les TIC, ni d’ailleurs, de plus en plus, des compétences nécessaires, comme le montre la communauté high-tech naissante dans la capitale.
Du fait de l’importance des connaissances locales, les innovateurs sierra-léonais sont les mieux positionnés pour concevoir et mettre en œuvre ces solutions. La Banque mondiale se réjouit à présent de pouvoir accompagner l’incubation et le développement des applications mises au point par les cinq équipes gagnantes.