Le séisme de magnitude 7,8 qui a frappé le Népal le 27 avril a été un événement inattendu pour de nombreuses personnes. Pourtant, pour les gens qui gèrent les risques de catastrophe naturelle au sein des institutions d'aide au développement et des organisations humanitaires, ce séisme devait arriver tôt ou tard (a). À bien des égards, n'importe où au Népal, il suffisait de regarder par la fenêtre pour voir l'Himalaya, des montagnes spectaculaires formées siècle après siècle, séisme après séisme.
Dans cette optique, en 2012, le Dispositif mondial de réduction des effets des catastrophes et de relèvement (a) (GFDRR) et la Banque mondiale ont fourni une assistance technique d'ampleur modeste mais en fin de compte essentielle pour cartographier la vallée de Katmandou afin de répertorier l'emplacement des établissements de santé et d'éducation. En s'appuyant sur les enseignements tirés des catastrophes passées, les équipes du GFDRR et de la Banque ont compris qu'avoir des cartes avec des données fondamentales de base et d'autres informations de localisation est essentiel aux activités de préparation aux catastrophes, de relèvement et de reconstruction.
Suite au séisme qui a frappé Haïti en 2010, une nouvelle méthode de création de données cartographiques a vu le jour lorsque la communauté internationale des cartographes bénévoles (« la foule ») a nettement amélioré les données de base référencées sur OpenStreetMap (a) (OSM) pour la ville de Port-au-Prince et ses environs. Les efforts de cartographie ont débuté juste après le séisme et, grâce au système de licence libre et ouverte qui a été adopté, les données ont été actualisées tout au long des opérations d'assistance, faisant ainsi d'OSM l'outil de choix des équipes en charge des secours. Les experts estiment (a) qu'en ayant recours aux méthodes traditionnelles, il aurait fallu des années et des dizaines de milliers de dollars pour produire ces données. Conscients de toute la puissance de la foule, la Banque mondiale, le GFDRR et d'autres partenaires ont appuyé des projets visant à cartographier les zones à risque avant qu'une catastrophe ne survienne. Cela a concerné des zones urbaines du monde entier, notamment certaines villes d'Indonésie, des Philippines, du Malawi et du Bangladesh, en raison de leur exposition aux catastrophes naturelles.
Le risque de séisme de grande amplitude au Népal a motivé le projet Open Cities (a), un programme mis au point dans le cadre de l'Initiative pour le libre accès aux données et la résilience (a) (OpenDRI), qui a débuté la cartographie des réseaux routiers (a), des écoles (a) et des établissements de santé (a) en 2012. Ces activités avaient pour but d'améliorer la préparation aux catastrophes et la réduction des risques, en sachant que les moindres données seraient précieuses le jour où l'inévitable séisme se produirait. En partenariat avec l'USAID et le département d'État américain, des étudiants volontaires de l'université de Washington ont apporté leur aide à distance et commencé à cartographier et numériser des informations sur plus de 130 000 bâtiments (a). Les opérations de cartographie à distance ont été menées en parallèle avec des vérifications approfondies sur le terrain. À Katmandou, le projet Open Cities a cherché à sensibiliser les habitants aux risques de séisme, lesquels sont devenus de plus en plus visibles à mesure que davantage de bâtiments vulnérables étaient cartographiés.
Sur les deux années qu'a duré le projet de la Banque mondiale et du GFDRR, plus de 1 500 personnes ont été formées à l'utilisation d'OSM à Katmandou, et beaucoup d'entre elles ont rejoint le nouvel organisme Katmandu Living Labs (KLL). Fruit du projet Open Cities, KLL continue de tirer parti des connaissances locales, de créer des données en libre accès et de promouvoir des technologies civiques. Nama Budhathoki, fondateur et directeur de KLL, explique la démarche : « Le projet Open Cities nous a fourni de nombreuses opportunités pour explorer, innover et créer une base sur laquelle faire avancer le mouvement OpenStreetMap au Népal. Nous avons consacré beaucoup de temps à former la population et à donner à celle-ci un accès à la technologie et aux données. La technologie n'est utile que si nous pouvons la relier au quotidien des personnes, pour résoudre les problèmes de tous les jours ».
L'intervention humanitaire d'urgence était en marche avant même que la poussière du séisme d'avril 2015 ne soit retombée. Grâce aux travaux réalisés par le projet Open Cities et KLL, il a été possible pour la première fois de disposer d'une carte téléchargeable en libre accès des zones urbaines touchées ainsi que d'une base de données à jour des établissements de santé et d'éducation. Pendant la crise, les cartographes d'OSM ont également mobilisé les données cartographiques existantes de Katmandou, ce qui leur a permis de se concentrer sur les communautés rurales touchées qui n'étaient pas cartographiées. KLL a mené à bien des travaux de cartographie considérables depuis un simple bureau de fortune installé à Katmandou. L'efficacité des activités coordonnées à l'échelle internationale des plus de 7 000 bénévoles impliqués a clairement illustré la réussite du projet Open Cities en matière de renforcement des capacités.
KLL a continué de cartographier la ville de Katmandou au terme du projet initial du GFDRR et de la Banque mondiale. L'État népalais et les organismes internationaux ont largement tiré parti des cartes des zones urbaines et rurales dans le cadre des activités de secours et de relèvement. Dans les 6 mois qui ont suivi le séisme, les données OpenStreetMap du Népal ont été consultées par plus de 3 300 utilisateurs en utilisant une plateforme GFDRR pour convertir les données OpenStreetMap dans des formats plus facilement exploitables pour les interventions de secours et de relèvement. La Banque mondiale et d'autres partenaires de développement ont également utilisé ces données pour identifier les écoles répertoriées dans le pays et évaluer les dégâts pour chacune d'elles. D'autres travaux sont en cours pour évaluer plus en détail les dommages structurels qu'ont subi les bâtiments scolaires afin de hiérarchiser les opérations de reconstruction. Lorsque la reconstruction débutera, un suivi sera effectué sur le site Web du projet Open Cities.
Le projet Open Cities réalisé à Katmandou démontre à quel point il est précieux de disposer de données géographiques et de cartes précises, ouvertes et accessibles lorsqu'une catastrophe survient. Il souligne également l'intérêt d'avoir ces données avant la catastrophe pour informer les activités de planification et de préparation. Ce qui importe dans cette histoire, ce ne sont ni les données ni la technologie, mais les citoyens qui bâtissent des capacités locales et durables. À travers l'Initiative pour le libre accès aux données et la résilience, le GFDRR et la Banque mondiale continueront de contribuer à la mise en place, dans le monde entier, de réseaux communautaires capables de produire et d'exploiter les données géographiques nécessaires pour renforcer la résilience aux catastrophes naturelles.
« En l'absence de cartes des risques adéquates, les effets potentiels des catastrophes naturelles et du changement climatique restent invisibles jusqu'à ce qu'une catastrophe ne les dévoile brusquement. Dans ce domaine, impliquer les citoyens locaux constitue une excellente occasion de combler rapidement ces lacunes tout en démontrant l'urgence d'agir. Actuellement actif dans plus de 60 pays, le GFDRR apporte son assistance à différents partenaires qui travaillent sur des initiatives semblables au projet Open Cities pour aider des communautés vulnérables à mieux appréhender leur exposition aux risques de catastrophe naturelle », explique Francis Ghesquiere, directeur du secrétariat du GFDRR