La photo saisit un instant de joie : la fierté d’un père qui prend la pose avec son jeune fils, aux côtés de son propre père qui sourit et étend affectueusement le bras en direction du bébé. L’enfant regarde avec perplexité l’objectif, en essayant d’appréhender le monde autour de lui.
Trois générations de Roms immortalisés dans un moment de bonheur.
Naturellement, ce que la photo ne montre pas, c’est l’après. Alors qu’il n’est qu’au seuil de la vie, cet enfant se retrouve déjà prisonnier d’un cercle vicieux inexorable, celui de la pauvreté et de l’exclusion dont souffrent la majorité des Roms dès leur naissance et tout au long de leur existence.
Dans sa troisième année, à un âge où l’on entre généralement en maternelle, ses chances de bénéficier d’une éducation seront déjà compromises. Marginalisés, les enfants roms accèdent difficilement à l’éducation, en particulier dans la petite enfance.
Or le développement du jeune enfant favorise l’acquisition de compétences indispensables pour réussir pleinement dans la vie, à l’école, au travail et ailleurs. Les enfants qui bénéficient de programmes de développement de la petite enfance apprennent mieux à leur entrée au primaire et sont en définitive mieux rémunérés à l’âge adulte. Un éveil éducatif dont sont privés beaucoup d’enfants roms de moins de 5 ans.
Alors que près de 75 % de la totalité des enfants résidant en Europe et en Asie centrale sont inscrits en cycle pré-primaire, moins de 50 % des enfants roms âgés de 3 à 6 ans sont préscolarisés. En Serbie, par exemple, sur l’ensemble des enfants roms de 3 à 5 ans vivant dans un habitat précaire, seuls 6 % participent à des programmes d’éducation pour la petite enfance.
Les petits Roms sont également beaucoup plus exposés à la pauvreté, ce qui se traduit souvent par un accès limité à l’eau courante, à l’électricité et à des installations sanitaires intérieures.
Tout l’enjeu des programmes de développement de la petite enfance réside précisément dans le fait qu’ils sont particulièrement bénéfiques aux enfants issus de milieux défavorisés (a). Voilà pourquoi il faut absolument veiller à ce que ces projets et initiatives incluent la communauté rom marginalisée.
Les 1 000 premiers jours de la vie sont cruciaux : en améliorant l’offre, la qualité et l’accessibilité financière des services pour la petite enfance et en renforçant les compétences parentales, on peut considérablement accroître les chances des enfants roms, avec des bienfaits qui les accompagneront jusque dans leur vie d’adulte.
Afin de contribuer à remédier à ces carences, le Groupe de la Banque mondiale poursuit son action en faveur des Roms dans de nombreux domaines. Cette action consiste notamment à diffuser des enseignements stratégiques pour l’inclusion, à appliquer à grande échelle les meilleures pratiques ou encore à nouer des partenariats.
Les interventions ciblant la petite enfance et destinées à soutenir le développement du jeune enfant peuvent en effet compenser les inégalités auxquelles se heurtent la plupart des Roms dès leur naissance. Elles doivent porter à la fois sur une offre éducative de meilleure qualité et plus complète et sur le développement des compétences parentales.
En effet, il est déterminant pour les enfants roms, défavorisés, de pouvoir bénéficier d’une scolarisation pré-primaire, mais aussi d’une plus grande stimulation cognitive dans leur foyer. Parce que leur famille vit dans des conditions de grave pauvreté et qu’elle est sous-éduquée, ils sont nombreux à être exposés à la malnutrition et à être privés d’un véritable suivi parental.
Ces privations dans la petite enfance entraînent un accès inégal à une éducation primaire de qualité.
Les fondements de cette inégalité s’expliquent par des conditions de vie fondamentalement inéquitables, dont la majorité des Roms sont victimes tout au long de leur vie, dès leur naissance. Si un enfant débute dans la vie en disposant d’un accès limité à une éducation préscolaire, à un logement et à des équipements sanitaires décents, il aura moins de chances de grandir en bonne santé, de réussir à l’école et de se trouver une situation.
C’est pourquoi le Groupe de la Banque mondiale et ses partenaires promeuvent une série d’initiatives de développement complémentaires qui s’attaquent en premier lieu au défi de l’éducation de la petite enfance dans le but de briser ce cercle vicieux de l’inégalité des chances qui se nourrit des discriminations ethniques et étouffe les aspirations individuelles, et de donner ainsi à l’enfant de la photo des raisons de sourire, tout au long de sa vie.