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Chine : les formations professionnelles changent la vie des migrants ruraux

07 août 2015


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LES POINTS MARQUANTS
  • En Chine, les travailleurs ruraux qui migrent vers les villes y occupent en général des emplois subalternes et mal payés, faute de compétences techniques et générales suffisantes.
  • Pour ces migrants, une formation professionnelle peut déboucher sur des emplois mieux rémunérés et ouvrir la voie à la création d’entreprise.
  • Un projet soutenu par la Banque mondiale contribue à améliorer la qualité et la pertinence des formations professionnelles afin de renforcer la compétitivité des travailleurs migrants sur les marchés du travail urbains.

Province de l’Anhui – Avec l’accroissement de la productivité agricole en Chine, l’emploi dans ce secteur est en recul depuis des années tandis que, dans le même temps, le dynamisme économique des villes induit une demande accrue de main-d’œuvre. Dans la province intérieure de l’Anhui, pratiquement la moitié des travailleurs ruraux sont partis pour la ville en quête d’emplois en dehors de l’agriculture. Mais faute de compétences techniques et générales suffisantes, ces migrants occupent en général des emplois subalternes et mal payés sur les marchés du travail urbains.

L’acquisition de qualifications professionnelles améliore les perspectives d’emploi

Zhang Jian a quitté son village voici dix ans pour travailler dans une compagnie d’électricité. Actuellement, il suit un programme pour devenir ingénieur électricien. « L’avantage de cette formation sur le tas », dit-il, « c’est que je peux appliquer immédiatement ce que j’apprends et cela m’aide à améliorer mon travail au jour le jour. »

La formation que suit Zhang Jian relève du Projet de développement des compétences pour l’emploi des migrants ruraux, soutenu par la Banque mondiale et déployé dans les provinces de l’Anhui, du Ningxia et du Shandong dans le but de renforcer la formation professionnelle et d’aider ainsi les migrants ruraux à décrocher des emplois plus intéressants, accroître leurs revenus et améliorer leurs conditions de travail.

Un an avant Zhang Jian, Pan Guoqing a suivi un programme technique. Une fois son diplôme en poche, il est retourné à l’usine qui l’avait embauché auparavant et grâce à ses nouvelles qualifications, il a très vite obtenu une promotion et une augmentation de salaire.

Pour lui, le développement des compétences est le seul moyen de faire carrière et de passer d’un emploi non qualifié à un poste très qualifié. Dans son cas, ce qui a énormément compté, c’est la possibilité de rester en contact avec ses tuteurs et de bénéficier ainsi d’un véritable apprentissage tout au long de la vie.

« Chaque fois que je me heurte à un problème, je les appelle pour leur demander des conseils — et cela m’aide beaucoup », explique-t-il.

Les employeurs sont tout autant satisfaits de ces possibilités de formation. 

La société Anhui Xingrui Gear Transmission Company s’est associée au collège technique et professionnel de Liu’an pour assurer une formation sur le tas à ses salariés. « C’est un scénario gagnant-gagnant pour les deux parties », souligne Wei Wei, responsable des ressources humaines. « L’amélioration de la qualité du travail profite à l’entreprise. » Sa société collabore avec le collège technique et professionnel de Liu’an.

La formation professionnelle ouvre la voie de l’entreprenariat

Bao Jun est issu d’une famille d’agriculteurs du district de Dangtu, dans la province de l’Anhui. Après avoir fréquenté l’établissement de mécanique et d’ingénierie de Wuhu, il a rejoint le lycée technique et professionnel de Ma’anshan pour des études de génie mécanique et électrique. Une fois diplômé, il a trouvé un emploi dans le secteur de l’automobile. Aujourd’hui, il gère sa propre concession :

« Tout ce que j’ai appris à l’école me sert au quotidien. Quand j’ai commencé, je ne gagnais que 2 500 à 3 000 yuans par mois (entre 400 et 480 dollars). Aujourd’hui, je suis mon propre patron et mon activité se développe au rythme de 10 à 20 % par an, avec un chiffre d’affaires annuel d’environ 1,5 million de yuans (soit quelque 24 200 dollars).

Bao Jun est resté en contact avec son lycée technique. Récemment et avec le soutien de ses anciens enseignants, il a rencontré certains élèves pour leur parler de son métier. Depuis, cinq étudiants travaillent comme stagiaires dans sa concession.« Une fois leur stage fini et si cette activité leur plaît, ils pourront tout à fait rester chez nous pour travailler », précise-t-il.

Bao Jun ne cache pas son ambition : « Je rêve de faire de mon entreprise l’une des grandes concessions automobiles du pays ».

Zhu Zhixu a également créé sa société après avoir suivi une formation. À 48 ans, il est à la tête d’une entreprise de terrassement. En 2012, il a suivi un programme de formation sur ce métier organisé par le lycée technique et professionnel du district de Taihu.

« Grâce aux cours magistraux et à une formation sur un simulateur, j’ai appris à utiliser et entretenir une pelle mécanique. Ça m’a donné confiance et j’ai eu le courage de créer ma propre entreprise », raconte Zhu Zhixu.

Très vite, il loue et achète une dizaine de pelleteuses pour travailler sur des projets de construction dans le district et aux alentours. « Depuis quelques années, les affaires sont florissantes et à partir de 2013, nos recettes annuelles ont dépassé le million de yuans », indique-t-il. Non content de gagner davantage d’argent, il a aussi fourni des emplois à plus de 20 personnes.



Assurer une formation de qualité adaptée aux différents besoins

En plus de formations de courte durée comme celles suivies par Zhang Jian et Pan Guoqing, le projet a mis en place des formations plus longues adaptées aux besoins des migrants ruraux en fonction de leurs différents stades de carrière.

Ces programmes facilitent l’accès aux marchés du travail urbains et à des emplois de meilleure qualité.

You Dandan a 25 ans. Originaire d’un village de la province d’Anhui, elle ne voulait pas être condamnée aux travaux des champs, comme ses parents. Dès qu’elle a eu 15 ans, elle est partie à Ma’anshan suivre un programme de formation dans un établissement professionnel pour devenir guide touristique.

A priori, cela se présentait mal, car elle n’était jamais allée dans aucun des lieux qu’elle était censée présenter aux touristes.

Grâce à une salle de formation équipée d’un simulateur, fourni par le projet, la jeune fille a pu découvrir les principales attractions touristiques de la province et se forger une « expérience » de voyage dans ces différents endroits.

« Ce système me donnait le sentiment d’être vraiment sur place », raconte-t-elle. « J’ai pu ainsi acquérir de solides connaissances sur la manière de présenter tous ces lieux remarquables, d’expliquer aux touristes ce qu’ils voient et de leur faire découvrir le meilleur de la région. »

Au bout de trois ans d’études, elle a pu devenir guide, comme elle l’avait prévu. Un an plus tard, elle a été embauchée par une station locale de télévision qui recherchait un animateur pour une nouvelle émission de voyage.

Au-delà de la mise à disposition d’équipements modernes qui modifient radicalement l’expérience d’apprentissage, le projet cherche aussi à améliorer la qualité des formations prodiguées de manière novatrice. Il a ainsi créé des sortes de « master class » pendant lesquelles les étudiants bénéficient d’une formation ciblée assurée par un expert du domaine.

L’un d’entre eux, Zhen Yulin, anime un cours d’ingénierie électrique. Il a opté pour une approche intégrée de l’apprentissage et de la pratique et « synchronise » l’évaluation et l’apprentissage. Ses étudiants reçoivent des commentaires in situ et peuvent instantanément modifier leurs pratiques.

Il invite aussi des experts techniques à devenir formateurs à temps partiel pendant son cours, pour présenter aux étudiants les dernières avancées technologiques dans leur secteur.

« Ce cours sert de passerelle entre l’école et l’entreprise et permet de combler l’écart entre ce qu’un élève apprend à l’école et ce que son futur employeur recherche », analyse le « maître ».

« En plus de nouveaux équipements, le projet de la Banque mondiale nous a apporté des méthodes, des idées et des concepts nouveaux. Il a permis à notre établissement de se développer », souligne Liu Shufeng, directeur adjoint du lycée technique de Ma’anshan, dans la province de l’Anhui.

Entre 2009 et 2014, dans la province de l’Anhui, le projet a donné les résultats suivants :

  • 57 640 migrants ruraux ont bénéficié d’une formation assurée par dix établissements soutenus par le projet ;
  • 98 % des diplômés ont obtenu un certificat de qualification professionnelle – un chiffre en hausse de 50 % ;
  • la part de diplômés trouvant un emploi dans un délai de six mois est passée de 51 à 98,2 %.
  • le salaire mensuel initial des diplômés a plus que doublé, de 1 430 à 3 300 yuans ;
  • le nombre d’étudiants à temps plein dans les établissements est passé d’environ 8 000 à plus de 21 000 ;
  • le nombre de participants à des programmes courts de formation est passé de 18 000 à plus de 60 000;
  • plus de 300 diplômés des établissements soutenus par le projet ont créé leur propre entreprise avec, à la clé, plus de 2 100 nouveaux emplois.


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