LIMA, Pérou — En 2010, Monica était au bord de la faillite. Elle et son mari avaient perdu leur emploi, vendu leur voiture et inscrit leurs enfants dans une école moins onéreuse. Mais un jour, grâce à une émission de télévision sur le recyclage et l’art de donner une deuxième vie au plastique, elle a compris comment transformer ses déchets en fils et en matériaux tissés.
Designer de métier, Monica a décidé de se lancer dans la production de sacs en « tissu » fabriqué à partir de bouteilles en plastique recyclées et de les vendre sur le marché des produits écologiques, en plein essor au Pérou. Grâce à l’argent emprunté auprès d’amis et de la famille, elle et son mari ont pu créer leur propre entreprise.
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Cinq ans plus tard, leurs produits stylés, novateurs et conçus sur mesure, tous fabriqués à partir de plastique recyclé, connaissent un succès mondial. Monica et son mari externalisent la confection à quelque 16 petites unités situées dans le quartier de Gamarra, à Lima, où se trouve aussi le siège de leur société. Monica dirige la conception et la comptabilité, tandis que son époux gère les ventes et le marketing.
Lorsque Monica a rejoint le programme d’entrepreneuriat féminin proposé par l’USAID à Lima, en 2014, son affaire avait dépassé le stade de la « nécessité » pour entrer dans une phase de « croissance », c’est-à-dire que Monica ne vendait plus des sacs uniquement pour survivre, mais qu’elle connaissait un certain succès et qu’elle était prête à développer son activité.
Les problèmes rencontrés par Monica et la manière dont elle les a résolus n’ont rien d’unique. Dans le monde, quelque 9,34 millions de petites et moyennes entreprises (PME) sont dirigées par des femmes (a), lesquelles doivent relever des défis multiples mais spécifiques. Elles doivent notamment se battre pour ne pas être exclues des marchés dominés par les hommes, résister à la concentration dans des secteurs moins productifs et moins bien rémunérés et remédier à leur méconnaissance de la gestion d’entreprise.
Aider les entreprises telles que celle de Monica à se développer non seulement crée des emplois plus que nécessaires, mais aussi stimule la croissance et permet d’avancer vers une prospérité partagée.
Les voies vers la prospérité
Grâce à tout un éventail d’investissements et d’activités techniques et analytiques, menés en partenariat avec d’autres institutions, le Groupe de la Banque mondiale est le leader de la promotion de l’entrepreneuriat féminin.
Son fonds fiduciaire Women’s Leadership in Small and Medium Enterprises (WLSME Trust Fund (a)) travaille en partenariat avec l’USAID afin de produire des interventions novatrices et de repérer les actions efficaces pour aider les femmes entrepreneurs à développer leur activité.
Les dons du WLSME Trust Fund financent des interventions dans 11 pays, lesquelles mobilisent souvent des ressources extérieures dans le cadre de projets plus vastes. En juin, les équipes de l’USAID et de la Banque mondiale se sont réunies à Lima pour échanger les acquis de leur expérience et les premiers résultats de leurs actions sur toute la planète.
Au Pakistan, le programme WomenX (a) de la Banque mondiale propose une formation à la gestion, mais aussi un accès au financement, une aide à la création de réseaux et des activités de mentorat aux dirigeantes de PME opérant dans les secteurs traditionnels et non traditionnels. Une enquête sur les femmes chefs d’entreprise menée dans toute la ville de Karachi, la première de ce type dans le pays, a mis en évidence l’existence d’une communauté dynamique de femmes entrepreneurs isolées du reste des milieux d’affaires et doutant de leurs compétences et de leur savoir.
WomenX collabore avec des partenaires sur le terrain, dont une école de commerce de renom, à l’élaboration et à la mise en œuvre d’un programme d’études de commerce adapté aux besoins locaux et destiné à combler le déficit de savoir et de compétences de management.
Des sessions consacrées à la communication, à la négociation et au leadership renforcent la confiance des participantes et leurs capacités à se frayer un chemin sur des marchés dominés par les hommes. Ce programme facilite également la création de réseaux avec les milieux d’affaires, les fédérations professionnelles et les chambres de commerce en vue d’ouvrir aux participantes les portes de nouveaux marchés et de leur offrir de nouvelles opportunités.
Les participantes au programme pilote déclarent avoir pu s’intégrer dans de nombreux réseaux de pairs et mieux maîtriser la gestion financière à l’heure où elles envisagent de diversifier leur production et de conquérir de nouveaux marchés.
Au Togo, 83 % des actifs travaillent à leur compte, dans de petites entreprises ou dans l’entreprise familiale. Le projet d’appui au développement du secteur privé du Togo (Togo Private Sector Development Support Project) propose des formations et un mentorat personnalisé à un millier d’entrepreneurs, dont la moitié sont des femmes.
Des travaux de recherche montrent que la réussite entrepreneuriale est fortement corrélée à certains comportements dans le travail. Des formations à l’initiative individuelle aident à acquérir ces comportements, à développer l’esprit d’entreprise, à se tourner vers l’avenir, à savoir prendre les devants pour demander un retour d’information et à persister pour atteindre ses objectifs.
Au Togo, le WLSME cherche à comparer l’efficacité de la formation à la prise d’initiatives individuelles et à la capacité d’anticiper et de surmonter les obstacles avec celle d’une formation classique en gestion, pour les hommes et pour les femmes. Son programme accueille des participants présentant des niveaux d’études et des connaissances linguistiques variés : 56 % des participants ne sont pas allés au-delà de l’école primaire, beaucoup ne parlent pas le français et certains sont analphabètes.
Les premiers résultats montrent que cinq mois après la fin de la formation et du programme de mentorat, les entrepreneurs des deux programmes ont augmenté leur capital et leurs effectifs, et déploient de meilleures pratiques pour le marketing, la tenue des dossiers, la gestion des ressources humaines, la gestion des opérations et des performances et la recherche de l’information.
Du Kirghizistan à l’Inde, au Nigéria et au Pérou, tous ceux qui mettent en œuvre ces programmes sont frappés de constater à quel point les problèmes rencontrés par les femmes entrepreneurs sont similaires alors qu’elles opèrent dans des contextes extrêmement différents.
Les femmes entrepreneurs se sentent isolées mais reprennent confiance grâce aux programmes de formation. Elles tirent de grands avantages de leur intégration dans des réseaux, et surtout dans les réseaux de pairs constitués pendant la formation. Or, ce dont les PME dirigées par des femmes ont besoin, c’est d’être mieux acceptées par les institutions financières, les réseaux d’entreprises et les chaînes d’approvisionnement.