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En quête de conseils sur la réforme du secteur de la santé, Bahreïn se tourne vers la Turquie

17 février 2015


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Une patiente en pleine consultation en Turquie.


LES POINTS MARQUANTS
  • Désireux d’engager d’ambitieuses réformes de la santé, le royaume de Bahreïn cherche conseil auprès de la Turquie qui a réussi à opérer une transformation du secteur dans des délais relativement courts.
  • Grâce à son Programme de transformation du système de santé, la Turquie est parvenue à réaliser les objectifs du Millénaire pour le développement en matière de santé bien avant la date butoir de 2015.
  • L’importance de la progressivité des réformes, la rapidité de leur déploiement et les gains liés à la réforme des soins de santé primaires font partie des principaux enseignements.

La Turquie a lancé son Programme de transformation du système de santé en 2003. Auparavant, les services rendus étaient fragmentés et fortement centrés sur les soins à l’hôpital, dont le coût est plus élevé. Les soins primaires n’étaient pas adaptés et le personnel de santé formé trop rare et mal réparti sur le territoire. Globalement, le secteur était pénalisé par un manque de financements et une gouvernance médiocre. Avec le temps cependant, le programme a su regrouper les financements et les services et assurer une couverture maladie quasi universelle.

Aujourd’hui, la Turquie est souvent donnée en exemple, puisqu’elle est parvenue à améliorer ses performances et à atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) relatifs à la santé bien avant la date butoir de 2015. Le nombre de femmes mourant en couches a diminué de plus de moitié depuis 1990, à environ 20 pour 100 000 naissances vivantes en 2013, le nombre d’enfants décédant avant leur 1er anniversaire étant passé de 55,7 pour 1 000 naissances vivantes en 1990 à 16,5 en 2012.

Figure 1 : Objectifs du Millénaire pour le développement relatifs à la santé : les progrès de la Turquie


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Évolution de la mortalité des enfants de moins de 5 ans (OMD 4) 

Banque mondiale, 2015

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Évolution du taux de mortalité maternelle (OMD 5)

Banque mondiale, 2015

Quels enseignements Bahreïn peut-il retirer de l’expérience turque ?

  1. La progressivité des réformes de la santé améliore leur impact sur le plan politique. Dès le début, les décideurs turcs avaient conscience des écueils politiques d’une réforme du secteur de la santé. Ils ont commencé par se concentrer sur des mesures simples, rentables et tangibles, afin de s’assurer du soutien de la population. Ils ont ainsi banni (en 2002) la pratique consistant à garder les patients hospitalisés tant que leurs frais médicaux n’étaient pas acquittés, ouvrant ainsi la voie à des réformes de plus grande ampleur. D’autres évolutions institutionnelles clés ont également été introduites selon un calendrier soigneusement pensé. En prenant leur temps, les décideurs se sont donné les moyens d’évaluer les réformes engagées et de les ajuster progressivement.
  2. « Ça passe ou ça casse » : le tempo des réformes est décisif. La rapidité du déploiement des réformes est une autre caractéristique importante de l’expérience turque. Ayant fixé des délais ambitieux, les décideurs ont ensuite surveillé de près les progrès obtenus sur le terrain, sans pour autant précipiter les choses. La qualité des services publics de santé pâtissait d’une habitude très répandue parmi les médecins, qui passaient une grande partie de leur temps à travailler aussi pour le secteur privé. Les autorités se sont attelées à ce problème de manière progressive, en augmentant le salaire des praticiens hospitaliers et en le conditionnant aux résultats (2003). Elles ont attendu qu’une majorité d’entre eux renoncent à cette double pratique pour l’interdire purement et simplement en 2010.
  3. L’environnement macroéconomique et budgétaire a son importance. Entre 2003 et 2013, l’économie turque a connu une rapide envolée qui, conjuguée à la priorité accordée aux dépenses publiques de santé, a permis d’augmenter les financements. Aujourd’hui, la Turquie consacre 6,3 % de son PIB à la santé, contre 5,3 % en 2003, et a pu élargir son programme de « carte verte », un dispositif d’assurance-maladie volontaire pour les pauvres.
  4. Le regroupement des différents programmes sociaux améliore l’efficacité du financement de la santé. La Turquie a regroupé cinq dispositifs d’assurance-maladie distincts, aux niveaux de prestations et de cotisations différents, en un seul régime, la SSI (l’institution de sécurité sociale). Les autorités ont procédé par étapes : les trois premiers dispositifs — Sosyal Sigortalar Kurumu (salariés), Bag-Kur (travailleurs indépendants) et Emekli Sandigi (fonctionnaires à la retraite) — ont été fusionnés en 2006 ; en 2010, un dispositif destiné aux fonctionnaires est venu s’ajouter à la SSI ; et en 2012, le programme de carte verte est devenu partie intégrante de l’ensemble. Les niveaux de prestations ont été harmonisés et les cotisations calculées en fonction du revenu.
  5. Les réformes du financement de la santé doivent s’accompagner d’une évolution des prestations. Pour mettre un terme à la fragmentation des services publics de santé et aux doublons, le réseau hospitalier du régime des salariés a été intégré au système du ministère de la Santé dès 2005. Un programme pilote de médecine familiale a été lancé en 2005 et généralisé à tout le pays en 2010.
  6. Les réformes des soins primaires portent leurs fruits. Aujourd’hui, plus de 20 000 médecins de famille assurent gratuitement des soins primaires et préventifs. Leurs honoraires sont augmentés s’ils acceptent de s’occuper des femmes enceintes et des enfants mais aussi de soigner les populations dans les zones isolées ou moins avancées. Même si le système public de santé ne parvient pas encore à couvrir toute la population, les réformes des soins primaires ont été bien acceptées par les habitants.

Les voyages d’étude organisés par la Banque mondiale pour des responsables bahreïnis en Turquie et en Estonie se sont révélés riches d’enseignements sur l’adoption de politiques de santé optimales à l’heure où le royaume s’engage dans une réforme de l’assurance-maladie, des systèmes de rémunération des prestataires et de leur autonomie. Pour la Banque mondiale comme pour la délégation bahreïnie, il est fondamental de noter la place centrale accordée au patient dans les nouveaux systèmes de santé de l’Estonie et de la Turquie. Le droit à la santé est la pierre angulaire de ces réformes. 


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