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Djibouti doit redoubler d'efforts pour réussir à éduquer les enfants de demain

04 février 2015


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Des élèves de primaire (3e année) dans une école rurale bénéficiaire du projet.

Photo : Banque mondiale l N. Yarrow, novembre 2014 à Djibouti

LES POINTS MARQUANTS
  • Les progrès que Djibouti a réalisés dans l’accroissement de la scolarisation au primaire sont remarquables : environ 60 % des enfants en âge d’aller à l’école sont désormais inscrits. Cependant, les filles, les populations rurales et les plus démunis sont toujours laissés pour compte.
  • Un nouveau programme de la Banque mondiale, financé par le Partenariat mondial pour l’éducation, viendra appuyer les efforts déployés par le gouvernement pour accroître le nombre d’élèves scolarisés en milieu rural.
  • Les programmes en vigueur donnent des résultats, mais Djibouti devra élargir leur champ d’action pour parvenir à une scolarisation de 100 % des enfants.

En consacrant depuis plusieurs années ses efforts au système éducatif public, Djibouti a réalisé de remarquables progrès dans le domaine de la scolarisation, mais il lui reste plusieurs défis à surmonter. Le taux net de scolarisation au primaire, soit le pourcentage, pour une année donnée, d’enfants ayant l’âge légal de scolarisation qui sont effectivement inscrits au primaire, se situe aujourd’hui autour de 60 % selon les statistiques sur l’éducation de la Banque mondiale. En outre, une fois désagrégé, ce taux montre une situation autrement plus délicate : chez les filles, les ruraux et les pauvres, le taux d’inscription est plus faible et le décrochage scolaire plus élevé.

Fer de lance de l’élargissement de l’accès à l’éducation, le ministère de l’Éducation a vu son action soutenue par des donateurs internationaux, dont la Banque mondiale, sous la forme de dons et de prêts concessionnels. Ces initiatives ont eu pour effet de quadrupler le nombre d’enfants scolarisés en l’espace de trois décennies : selon le ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle, 125 000 élèves étaient scolarisés au primaire et dans le secondaire en 2014, contre 31 000 élèves en 1984 selon la Banque mondiale.

Dans le cadre de la campagne de scolarisation en cours, la ville d’Arta, au sud-est de Djibouti, bénéficie depuis peu d’un programme financé par le Partenariat mondial pour l’éducation (GPE) et placé sous la supervision de la Banque mondiale. Le Programme d’accès à une éducation de qualité prend en charge la construction de salles de classe, la réfection et l’agrandissement d’écoles en zones rurales, la formation des enseignants et la fourniture de supports pédagogiques, ainsi que l’achat d’appareils auditifs et de lunettes pour les élèves qui en ont besoin.

Les élèves photographiés ci-dessus achèveront bientôt la troisième année du cycle primaire. Le programme financera la construction de salles de classe pour les accueillir en quatrième, cinquième et sixième années, tandis que le ministère de l’Éducation y affectera des enseignants. « Ce que ce programme a de plus remarquable », explique Tahina Razafindramary, responsable-pays au GPE, « c’est que les enfants non scolarisés, notamment ceux qui vivent dans des régions isolées et ceux qui souffrent de handicaps, auront la possibilité d’accéder à l’enseignement primaire et d’achever le premier cycle du secondaire. »

Au regard de la Somalie et l’Érythrée, des pays voisins dont les taux de scolarisation sont bien moins élevés, Djibouti a accompli un travail remarquable. Cependant, en dépit de ces bons résultats, le pays est loin d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement et risque d’être pris, dans les années à venir, dans le cercle vicieux d’un « équilibre de bas niveau », tant en ce qui concerne l’accès à l’éducation que sa qualité.


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Les données pour l’Érythrée (2012), l’Éthiopie (2006) et le Yémen (2012) proviennent des statistiques de la Banque mondiale sur l’éducation (World Bank EdStats) ; celles qui concernent la Somalie découlent d’estimations faites à partir d’une compilation des sources de l’UNICEF et de l’Education Policy and Data Center (EPDC). Les données pour Djibouti sont tirées de l’enquête sur les ménages 2012.


« Ce que ce programme a de plus remarquable, c’est que les enfants non scolarisés, notamment ceux qui vivent dans des régions isolées et ceux qui souffrent de handicaps, auront la possibilité d’accéder à l’enseignement primaire et d’achever le premier cycle du secondaire. »


Ce nouveau projet va certes contribuer à remédier aux difficultés auxquelles est confronté Djibouti, mais cela ne suffira pas. Le ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle et les bailleurs de fonds pour l’éducation se sont mobilisés en faveur d’un plan sectoriel d’une durée de trois ans (Plan d’action de l’éducation 2014-2016), et ont invité les investisseurs internationaux à verser une contribution 25 millions de dollars supplémentaires pour l’éducation pré-primaire, primaire et secondaire (formation technique et professionnelle comprise). Avec une dotation de 3,8 millions de dollars, le nouveau projet ne manque pas d’envergure, mais ne peut combler qu’une partie des besoins. En s’appuyant sur les cinq dernières années comme période de référence (2008-2013), on constate que l’accès à l’école primaire a progressé de seulement 1,6 % par an. À ce rythme, l’objectif de l’éducation primaire pour tous ne sera pas atteint avant 2040. Le Plan d’action de l’éducation entend progresser bien plus rapidement vers cet objectif. Cependant, sans ressources et capacités additionnelles, sa mise en œuvre intégrale dans les délais impartis demeure compromise.

Pour parvenir à un taux de scolarisation au primaire de 100 %, il faudra un bond quantitatif tant sur le plan de l’accès à l’école que sur celui de la qualité des acquis scolaires. Selon les chiffres de l'UNSECO, le taux officiel de scolarisation au primaire a chuté entre 2012 et 2013 parce que la population a crû plus vite que le nombre de places disponibles dans les écoles, une légère baisse certes mais dans la mauvaise direction. Il faut accorder une priorité stratégique aux populations rurales et nomades, aux filles, ainsi qu’aux catégories à faible revenu des zones urbaines et rurales. La scolarisation des enfants vivant dans les régions les plus isolées et les plus désavantagées ou dans les communautés nomades pourrait nécessiter la mise en place de structures à un seul enseignant ou itinérantes qui, au lieu d’obliger les élèves à se rendre à l’école, amèneraient l’école au plus proche des enfants.

Parmi les approches possibles, l’extension du Plan d’action de l’éducation à dix ans, qui s’accompagnerait, en plus de nouveaux engagements de financement de la part des acteurs nationaux et internationaux, de l’instauration de points de référence spécifiques portant notamment sur les taux de scolarisation dans les zones urbaines et rurales défavorisées et sur l’évaluation internationale des acquis scolaires. La mise en œuvre du Plan pourrait également être assortie d’une campagne d’information auprès des parents qui porterait sur la scolarisation et la réussite scolaire, et d’un accroissement des capacités ministérielles. Aucun effort ne doit être épargné pour donner à chaque enfant de Djibouti la possibilité d’apprendre.



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