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Franc succès dans la lutte contre le criquet pèlerin en Mauritanie et dans le Sahel

07 janvier 2010


LES POINTS MARQUANTS
  • Un projet financé par l’IDA permet de réduire les risques d’invasion de criquets pèlerins dans la région du Sahel
  • Le criquet pèlerin présente un risque considérable pour la production agricole et la sécurité alimentaire dans la région
  • Plusieurs pays – Burkina Faso, Gambie, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Tchad – évitent ainsi une invasion de criquets pèlerins

NOUAKCHOTT, 7 janvier 2010—Début décembre 2009. Les membres de l’équipe du Centre national de lutte antiacridienne (CNLA) de Mauritanie applaudissent de joie. Ils ont réussi à maîtriser, à un stade très précoce, une importante invasion acridienne qui aurait pu compromettre et la sécurité alimentaire de la région du Sahel et les moyens d’existence de ses populations vulnérables.

« Après des années de dur labeur, le CNLA a finalement atteint le niveau de préparation nécessaire pour gérer efficacement les interventions antiacridiennes d’urgence et éviter toute aggravation de la situation », selon Amadou Oumar Ba, le chef d’équipe du Programme d’intervention antiacridienne d’urgence en Afrique de la Banque mondiale, faisant référence à la situation en Mauritanie.

Le CNLA travaille depuis des années dans des conditions difficiles pour trouver les moyens de prévenir la dégradation de l’environnement par les criquets pèlerins et mettre en place un système d’alerte rapide afin d’éviter la dévastation des cultures.

Le centre vient de montrer que la prévention est le moyen le plus efficace de lutte contre ces prédateurs qui ravagent les cultures depuis des siècles dans la région saharo-sahélienne au Maghreb.

La stratégie de lutte contre la propagation

Le criquet pèlerin représente une menace constante pour la production agricole dans de nombreux pays du monde. Se déplaçant par essaims de plusieurs milliers, ces insectes peuvent détruire des centaines d’hectares de terres en quelques heures. On estime à 65 000 km2 la superficie des terres cultivées détruites en 2004 par des essaims de criquets pèlerins dans neuf pays du Sahel et du Maghreb, dont la Mauritanie, soit une perte de l’ordre de 200 millions d’euros.

« Les acridiens ont une capacité d’adaptation surprenante », fait remarquer Mohamed Abdallahi Ould Babah, directeur du CNLA et coordinateur national du Programme d’intervention antiacridienne d’urgence en Afrique, une opération financée par la Banque mondiale et d’autres bailleurs de fonds. « Ils évoluent en solitaire et il est parfois difficile de les détecter car ils font corps avec leur environnement, attendant le moment propice pour se rassembler et lancer leur attaque ».

Ould Babah et son équipe ont constaté très tôt que la pulvérisation à grande échelle d’importantes quantités de pesticides lorsque l’invasion a déjà commencé n’était pas le meilleur moyen d’atténuer la menace. Outre le fait qu’elles ont peu d’effet sur cet acridien, les substances chimiques utilisées constituent une grave menace pour la salubrité du milieu et la santé humaine. C’est pourquoi le CNLA a élaboré une stratégie de lutte préventive et d’alerte rapide consistant à utiliser des quantités réduites de pesticides sur de petites populations de criquets pèlerins, avant qu’ils ne puissent constituer des essaims et d’envahir les zones agricoles où ils peuvent détruire les cultures de subsistance et de rente.

Après les pluies torrentielles enregistrées au cours de l’été 2009, le CNLA a élaboré un plan d’intervention précoce visant à réduire la population des criquets en les empêchant de se reproduire en grand nombre. La première phase de ce plan a été mise en œuvre en juillet, au début de la saison des pluies. Cinq équipes d'exploration ont été dépêchées dans les régions des Hodhs et d’Assaba, à l’ouest du Tagant et au nord du Brakna, à l’extérieur de la capitale Nouakchott, où elles ont exercé une surveillance intensive.

« Dans le cadre de leur mission, ces équipes ont constaté que les criquets sous leur forme solitaire, dispersés sur de très vastes étendues de terrain, représentaient une grave menace lorsqu’ils commençaient à se rassembler pour former de petits essaims », a expliqué Ould Babah. Ce phénomène était favorisé en grande partie par les précipitations, l’humidité et la végétation.

Afin d'empêcher que les criquets se rassemblent et envahissent de grandes superficies, le CNLA a lancé la phase 2 de son plan en octobre, déployant sur le terrain 25 équipes, qui ont détruit les premières populations en utilisant de petites quantités de pesticides. En novembre, le traitement de 13000 hectares de terres seulement avait suffi pour endiguer l’invasion.

« Pendant tout le processus, les pays voisins comme le Maroc et le Mali étaient en attente, prêts à apporter un appui sous la coordination de la CLCPRO, qui est la Commission chargée de la lutte antiacridienne dans le Sahel et le Maghreb », a relevé M. Denis Jordy, Chef d’équipe du projet régional de la Banque mondiale. « Malgré les conditions de sécurité difficiles, les activités de prévention ont également été réalisées avec succès au Niger, où des essaims similaires ont été repérés. »

Éviter la dévastation des cultures comme en 2004

« En l’absence de ce plan et d’un système efficace de lutte préventive et d’alerte rapide, nous redoutions le pire », a déclaré Amadou Diallo, chef d'unité d'intervention du CNLA.

Amadou Diallo estime que si la Mauritanie avait connu un retour massif de criquets pèlerins matures au début de la dernière saison des pluies - retour qui aurait pu entraîner une invasion notable - le pays aurait subi des dommages considérables.

« Nous aurions été contraints de procéder à un vaste déploiement d’équipements et de ressources financières et, par la suite, de faire face au déplacement des essaims de criquets vers les pays situés au nord de la Mauritanie (Maroc et Algérie) », a-t-il ajouté. Les activités de surveillance se poursuivent en prévision de la prochaine saison des pluies.

Au fil des ans, le CNLA a contribué à renforcer la lutte contre le criquet pèlerin en Mauritanie en faisant preuve de vigilance, en déployant des efforts de prévention, en adoptant une démarche anticipative et en assurant une communication efficace en cas de crise. Son action est financée dans le cadre du Programme d’intervention acridienne d’urgence en Afrique, une opération appuyée par la Banque mondiale au moyen d’un prêt de 60 millions de dollars, qui couvre sept pays du sahel (Burkina Faso, Gambie, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad).

Ce projet, qui devrait prendre fin en juin 2010, a eu un impact significatif et a contribué à réduire la vulnérabilité des pays concernés aux invasions acridiennes actuelles et futures

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