Voici ce qu’il faut retenir des principales conclusions du rapport :
La croissance économique de Madagascar a été forte en 2018, mais a un peu ralentie en 2019
Tirée par une forte activité des secteurs axés sur l’exportation, la croissance a atteint 5,1 % en 2018, son plus haut niveau depuis dix ans. Elle s’est ensuite tassée au premier semestre 2019 sous l’effet conjugué d’une baisse de la demande extérieure et de la lenteur d’exécution des dépenses publiques. En effet, le nouveau gouvernement ayant pris ses fonctions à la suite de l’élection présidentielle fin 2018, la mise en place de la nouvelle administration et la révision du budget 2019 ont ralenti l’exécution des dépenses, notamment les investissements publics.
Les recettes d’exportation et l’activité industrielle ont également pâti d’un essoufflement important des principaux marchés à l’export, qui a coïncidé avec l’exacerbation des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, ces deux pays absorbant 25 % des exportations malgaches. Cette situation a entraîné une baisse de la demande et des prix des principaux produits d’exportation malgaches et s’est combinée au début de l’année à un recul des ventes et des commandes industrielles. La baisse des recettes d’exportation, notamment celles provenant des cultures de rente et du nickel, et le niveau constant des importations se sont traduits par une détérioration du solde de la balance courante.
Le renforcement de la confiance des entreprises et l’accélération des investissements publics devraient soutenir une croissance plus forte en 2020-2021
Après un début d’année atone, la confiance des entreprises et les prévisions de demande se sont redressées aux deuxième et troisième trimestres, en particulier dans le secteur manufacturier, ce qui est de bon augure pour l’investissement privé. Le secteur des services devrait rester le principal moteur de la croissance, malgré l’expansion rapide du secteur manufacturier. La progression du secteur agricole devrait être modérée, légèrement supérieure à celle de la croissance démographique globale, sous réserve de l’absence de catastrophes naturelles graves.
La croissance devrait atteindre 5,3 % en 2020, tirée par l’augmentation attendue des investissements publics, notamment dans les infrastructures routières, de santé et éducatives, et par un rebond des investissements privés après les élections, à la faveur du rétablissement progressif de la confiance. En 2021, la croissance devrait encore augmenter légèrement pour s’établir à 5,4 %, grâce au maintien de la reprise des investissements publics et privés. À moyen terme cependant, le potentiel de croissance de Madagascar continuera d’être freiné par le manque d’infrastructures, les progrès insuffisants en matière de développement du capital humain, le faible niveau de concurrence dans les secteurs clés et les problèmes de gouvernance.
Les risques de détérioration de la conjoncture économique plaident pour la prudence budgétaire
La transition politique réussie après l’élection présidentielle de 2018 a considérablement réduit les risques d’instabilité politique. L’économie malgache est cependant exposée à d’autres risques qui pourraient entraîner une baisse plus importante que prévu de l’activité dans les années à venir : un ralentissement économique marqué chez les principaux partenaires commerciaux du pays, une chute soudaine des prix de la vanille par rapport à leurs niveaux records actuels ou une hausse des prix du pétrole dans un contexte géopolitique de plus en plus tendu.
Les risques budgétaires doivent aussi être surveillés. Il s’agit des risques associés aux perspectives d’augmentation des déficits publics dans un contexte de faible mobilisation des recettes intérieures, des passifs éventuels vis-à-vis des entreprises publiques et de la multiplication de projets de partenariats public-privé spontanés. Le manque de marge de manœuvre budgétaire pourrait limiter considérablement la capacité du gouvernement à faire face aux chocs imprévus, y compris les catastrophes naturelles graves dont le coût est estimé à environ 1 % du PIB en moyenne, mais qui pourrait grimper en flèche en cas d’événements particulièrement sévères.
Les mesures visant à accroître la mobilisation des recettes de l’État sont essentielles
Le rapport souligne l’intérêt de procéder à un examen et à de possibles ajustements de divers abattements et régimes fiscaux préférentiels, qui réduisent de près d’un quart les recettes de l’État chaque année. Pour un pays tel que Madagascar, dont la capacité de recouvrement des impôts est l’une des plus faibles au monde, il s’agit d’un manque à gagner considérable. Les décisions en matière de dépenses fiscales nécessiteraient une analyse préalable de leur pertinence ou de leurs incidences potentielles, ainsi qu’une analyse comparative permettant de déterminer s’il ne serait pas plus approprié d’opter pour des dépenses publiques directes ou des mesures réglementaires.
En l’absence d’évaluations d’impact claires, le bénéfice net de ces dépenses fiscales est souvent incertain et les pertes de recettes aggravées par les risques de fraude. Une analyse coût-bénéfice plus systématique et transparente permettrait de cerner les mesures inefficaces qui absorbent des ressources pouvant être plutôt allouées à des investissements publics ou des dépenses sociales.
La croissance et la création d’emplois passent par le renforcement de la concurrence
Les secteurs clés de l’économie malgache sont caractérisés par un niveau élevé de concentration et de faibles niveaux de concurrence. Le chapitre spécial du rapport analyse les pratiques commerciales dans les secteurs de la vanille, du litchi et des télécommunications, qui sont représentatifs de cette tendance, et propose des solutions pour améliorer les cadres politiques et promouvoir des conditions de concurrence équitables afin de stimuler une croissance plus forte et plus inclusive.
L’examen du secteur des télécommunications, étroitement lié avec le reste de l’économie malgache, montre comment une concurrence accrue pourrait stimuler les investissements des opérateurs et ainsi contribuer à réduire les coûts et à améliorer la pénétration des services de téléphonie fixe et mobile. Dans le cas du litchi et de la vanille, la réduction des barrières à l’entrée sur les principaux marchés d’exportation serait susceptible d’améliorer les débouchés des petits exploitants agricoles et leur participation à la création de valeur.
Enfin, le rapport recommande notamment de renforcer les lois sur la concurrence et leur application par des organismes de réglementation indépendants et d’encourager les entreprises en place et les organisations professionnelles à adopter des pratiques exemplaires.