Les Comores sont enfermées dans un piège de faible croissance depuis plus de 40 ans, avec une croissance moyenne d'environ 2,6 % sur la période 1980-2022, et un taux de pauvreté estimé à 39,8 % en 2022. Les entrées d'investissements directs étrangers (IDE) ont représenté en moyenne 0,6 % du PIB sur la période 2011-2020. En termes de richesse par habitant, le capital physique produit du pays a diminué de 27,7 % entre 1995 et 2018.
Cette croissance limitée s'explique en partie par des facteurs structurels, tels que la faiblesse des institutions, une population peu nombreuse, le capital humain et physique limité et l'éloignement géographique, qui pèsent sur le développement du secteur privé.
Pour stimuler la croissance aux Comores et saisir de plus grandes opportunités, le Mémorandum économique des Comores recommande trois voies : débloquer les investissements du secteur privé, renforcer les institutions fondamentales et améliorer la résilience économique autour d'un ensemble d'options politiques clés :
Accroître les investissements du secteur privé, compte tenu notamment des ressources fiscales limitées du pays et de l'inefficacité de plusieurs entreprises d'État :
Au cours de la période 2000-2019, l'investissement privé a représenté moins de 8 % du PIB, en moyenne, aux Comores. Dans le cadre d'un scénario de réforme modeste, l'augmentation de l'investissement privé à 10 % du PIB d'ici 2030 et son maintien jusqu'en 2031-50 pourraient augmenter le taux de croissance du PIB de 0,37 point de pourcentage en 2023-50. Dans le cadre d'un scénario de réforme ambitieux, l'augmentation de l'investissement privé à 13 % du PIB d'ici 2030 et son maintien jusqu'en 2050 pourraient accroître le taux de croissance du PIB de 0,62 point de pourcentage. La réalisation de ces performances macroéconomiques dépendra de la capacité des autorités à améliorer les infrastructures et la connectivité, à attirer les investissements directs étrangers et à stimuler les investissements nationaux, à accroître l'intermédiation et l'inclusion financières, notamment en réduisant le risque de crédit et en faisant respecter l'État de droit, et à améliorer les compétences de la main-d'œuvre. Toutefois, il faudrait également renforcer les institutions fondamentales, améliorer la résilience économique et garantir l'utilisation durable des ressources.
Accroître la marge de manœuvre budgétaire en améliorant la mobilisation des ressources nationales et la gestion des finances publiques :
Entre 2016 et 2019, les Comores ont mobilisé des recettes - y compris des dons - d'une valeur de 16,8 % du PIB. Environ quatre cinquièmes des recettes intérieures du pays proviennent des impôts. Pour créer une marge de manœuvre budgétaire grâce à la mobilisation des recettes intérieures, le pays pourrait renforcer les capacités des administrations douanières et fiscales, réduire les dépenses fiscales, élargir l'assiette fiscale, faciliter le respect des obligations fiscales et améliorer la confiance des citoyens grâce à une plus grande transparence fiscale. Une augmentation de l'efficacité des dépenses publiques grâce à une meilleure gestion des investissements publics ou à une meilleure affectation des ressources pourrait générer entre 0,03 et 0,15 point de pourcentage de croissance supplémentaire du PIB entre 2022 et 2050.
Stimuler la croissance dans des secteurs sous-exploités tels que le tourisme et la pêche :
Le potentiel de productivité du pays se manifeste par l'abondance de ses ressources, notamment dans les domaines du tourisme et de la pêche. Cependant, le secteur touristique du pays reste à un stade pré-émergent et ne contribue que marginalement à la croissance économique. Entre 2015 et 2019, le nombre de visiteurs internationaux a augmenté en moyenne de 15,1 % par an et 21 400 emplois directs et indirects ont été créés (soit 9,9 % de l'emploi total). Il y a trois priorités pour débloquer la croissance liée au tourisme : (i) augmenter les options d'hébergement de qualité en mettant l'accent sur le développement vert et inclusif ; (ii) améliorer la connectivité inter-îles ; et (iii) améliorer la gestion de l'environnement, en particulier en ce qui concerne la gestion des déchets, le contrôle de l'extraction du sable et la dégradation de l'environnement.
En ce qui concerne la pêche, le capital naturel marin fournit une base de ressources essentielle pour le développement de l'économie comorienne. La pêche comorienne présente une opportunité considérable de croissance économique durable en raison de l'abondance des ressources halieutiques nationales et de l'existence d'un marché national du poisson. L'investissement dans les infrastructures physiques de marché, de transport et d'énergie renouvelable serait essentiel pour améliorer la productivité du secteur. Enfin, le développement du secteur de la pêche doit être envisagé dans le cadre plus large d'une approche d’« économie bleue ».
Tirer profit des avantages de la mondialisation et de la régionalisation :
Les Comores ont systématiquement enregistré des déficits commerciaux au cours des dernières années. Le niveau des exportations de biens est inférieur à celui des exportations de services, tandis que le niveau des importations de biens est supérieur à celui des importations de services. Les exportations du pays ont été très volatiles car les produits d'exportation dépendent fortement de l'impact des conditions météorologiques sur les récoltes. Les Comores pourraient notamment augmenter la valeur de leurs exportations en s'intégrant davantage dans la chaîne de valeur mondiale (CVM) pour les clous de girofle. Les Comores pourraient également bénéficier de l'adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui augmentera l'ouverture commerciale et réduira ses coûts commerciaux, et de sa participation à la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), qui pourrait favoriser la croissance et la diversification des exportations, attirer les investissements et entraîner une accélération de la croissance. Plus précisément, les secteurs du tourisme et de la pêche pourraient bénéficier de l'adhésion à l'OMC et de la zone de libre-échange continentale africaine grâce à la réduction des prix des produits importés, à l'amélioration des normes d'importation et à l'augmentation de la taille des marchés pour les produits exportés.